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303. [
Kees Van DongEn
].
Léa J
AcoB
dite JaSMY
. 9 L.A.S. « Leo », juillet-octobre
1928, à Kees v
an
d
onGen
; 20 pages formats divers, enveloppes.
1.000/1.500
b
elle
correspondance
sur
leur
séparatIon
.
Vendredi minuit [7 juillet 1928]
. Elle raconte à « Kiki » son séjour à Londres, et ses sorties
mondaines : cocktails, soupers et « parties ». Elle a vu la Collection Wallace, lui donne des nouvelles
d’amis et propose de chercher une galerie pour lui : « Il me semble que tu avais une exposition
en vue pour novembre –
when ?
Ici il faut faire très bien – très chic – très cher »…
[31 juillet]
. Elle envoie
à Kiki un chèque pour payer ses propres impôts, car ses changements de noms rendent cela compliqué. Elle est certes
partie à Londres «
pour partir
tu le sais bien et combien difficilement mais comme tu es ma seule préoccupation je pense partout
où je suis à toi et à ce que tu ferais dans ce pays […] et si j’étais ton manager voilà ce que je proposerais – venir ici fin septembre –
passer octobre à faire tableaux sur Londres
très beau
– et q.q. portraits en même temps – la dame du Touquet – des gens de théâtre
tout cela pour une deuxième exposition en juin juillet 1929 ». Il pourrait faire une exposition à Londres ce novembre : « Fleurs,
vues de Paris et Versailles, portraits : femme jolie […] homme – 50 ans et ton père, enfants […] Lucien G
uItry
[…] Si j’étais ton
manager je te trouverais un atelier pour passer ce mois d’octobre à peindre à ton aise mieux qu’à l’hôtel. Je me documente sur
tout ici […] mais je ne sais pas quels sont tes projets… Je ne suis pas ton manager… Je ne sais même pas qui je suis »…
[7 août]
.
Elle n’a aucun projet, n’est pas en colère, mais se sent triste : « tes lettres me font le même effet, j’essaie d’y retrouver un peu de
douceur et d’affection, je ne trouve rien, je pleure […] Quand je réfléchis je ne sais pas pourquoi nous sommes séparés et surtout
pourquoi nous sommes malheureux chacun de notre côté. Si cette séparation était nécessaire, elle devrait faire […] au moins le
bonheur de l’un de nous ». Elle ne parvient pas à comprendre la véritable raison de cette rupture. Elle part pour Stockholm, et
sera de retour à Londres en septembre, où elle l’attendra…
[17 août]
. Elle a réfléchi à leur avenir, mais ce qu’il lui demande semble
impossible : «
Question sentiment
je ne peux pas – dans la même maison où j’ai été tout, devenir une sorte de “renoncée” […] je
ne le supporterais pas. Je ne peux pas, à mon âge, finir ma vie en réfugiée russe dans une chambre à tout faire avec ma bonne
[…] J’aime mieux tout à fait m’arracher de toi. […] Seulement comme tu es mon unique but dans la vie, si tu veux me prendre
pour manager ? vendeuse ? secrétaire ? Je crois que je puis t’être utile et
de ce fait donner à mon existence une raison d’être ». Elle refuse d’habiter
sous le même toit, mais propose de passer régulièrement à la boutique,
pour s’occuper du courrier, organiser des expositions, etc. Elle aimerait le
rejoindre à Biarritz pour des vacances, sans questions d’argents, de maison,
de domestiques, « ce qui je crois a tout gâché entre nous », mais elle préfère
investir son argent dans son projet d’exposition londonienne…
[28 aout]
.
De retour à Londres plus tôt que prévu, elle lui demande s’il va venir.
« Tout cela dépend de ton exposition d’Égypte »...
[29 août]
. Elle l’attend
fermement à Londres, essayant d’obtenir des prix au Savoy, et travaillant
pour lui : « nous parlerons, nous allons voir d’abord si nous pouvons, si
tu peux me supporter – ce sera notre honeymoon », ou bien le contraire :
« même si nous devons nous séparer ce sera ainsi en beauté sur un joli
souvenir »…
[6 septembre]
. Elle lui a trouvé par le manager du Savoy Hotel
« un petit flat sur la Tamise avec une vue superbe », et a organisé toutes
ses dépenses, ses repas, etc. Elle l’attend avec impatience, et lui propose
d’autres logements moins chers…
Samedi soir [10 septembre]
. Elle continue à lui parler
de possibilités de portraits, principalement dans le milieu du théâtre, et de ce projet
d’exposition à Londres. Elle s’est mise en contact avec la Galerie Leicester, qui était
déjà venue le voir à Paris, et qui a très envie d’une exposition au printemps. Elle leur
enverra dimensions et prix de toiles. En ce qui concerne leur couple, elle souhaiterait
reprendre une vie quasi conjugale, afin de voir s’ils peuvent continuer, sur les mêmes
bases d’avant son départ : « Je redeviendrai ton associée et ferai pour le mieux tu peux
le croire. Je tâcherai de ne pas t’irriter […]. Nous avons eu tout de même dix ans de
grande harmonie même avec les batailles »... Elle accuse cet « exil réciproque » d’être
la cause de leur séparation : « jamais je ne me suis doutée que cela pouvait avoir des
résultats si tragiques […] j’ai le gros cœur et je pleure. Mais toi ? Je crois que c’est la
seule chose possible en ce moment : nous aurons l’exposition d’Égypte – beaucoup de
choses à préparer – et pas le temps de nous battre. […] Si tu veux encore de moi, dis-
le »…
[25 septembre]
. « Kiki, alors tu ne veux pas ! J’avais fini par me persuader que tu
avais envie de me voir et que tu viendrais à Londres un peu pour cela !! ». Elle est très
triste, d’autant que c’est son anniversaire, « J’ai …8 ans ! ». Elle n’a pas le courage de
rentrer maintenant à Paris, préférant « errer par le vaste monde »…
Mercredi matin
[3
octobre]
. Elle arrivera à Paris le 6, car elle est obligée d’y passer pour faire ses malles,
prendre ses manteaux, « et puis j’ai grande en vie de te voir c’est ce qui domine tout ».
Elle sera incognito et ne veut voir que lui… o
n
joInt
une coupure de presse anglaise :
Van Dongen The Merciless,
par P.G. Konody.