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« 
Préface de Corneille
. – Difficulté de traiter un sujet déjà traité par un autre. Corneille s’est attaché à faire différemment,
mais non pas mieux que Mairet. Il cite plusieurs auteurs qui comme lui ont traité des mêmes sujets. Déjà Soph. avait été mis sur
la scène par Trissin en Italie et Mont-Chretien en France. Il s’est attaché surtout à la fidélité historique des caractères tels qu’ils
sont représentés par Tite-Live. Corneille n’était pas de l’école de l’embellissement, de l’annoblissement. Il voulait donc que tout
l’effet ressortît de la vérité de la chose devenue idéale à force d’être exacte »… Flaubert cite longuement les réflexions de Corneille,
puis commence une analyse détaillée de la pièce, scène par scène, accumulant des résumés d’action, extraits de vers et observations
critiques, rappelant d’abord : « La scène est à Cyrthe capitale du royaume de Siphax dans le palais du roi ». Ainsi, à la fin de I,
1 : « V. trouve cette exposition bonne. La mienne me paraît préférable »… Les premiers vers cités, dès la première scène, peuvent
annoncer les batailles des mercenaires contre Carthage dans
Salammbô
 :
« Ses troupes se montrant autour du soleil
Ont de notre ruine arrêté l’appareil.
À peine une heure ou deux elles ont pris haleine
Qu’il les range en bataille au milieu de la plaine.
L’ennemi fait le même et l’on voit des deux parts
Nos sillons hérissés de piques et de dards »…
Après l’expression d’amour d’Eryxe (II, 1), dans laquelle il admire des vers « exquis comme détail », il note : « Là-dessus V. dit :
on sent dans cette scène combien Eryxe est froide et rebutante »… La magnifique scène entre Sophonisbe et Syphax, dans laquelle
la reine refuse de se rendre aux Romains, quitte à sacrifier son mariage et à s’allier à Massinisse (III, 6), paraît tout aussi mal
comprise de Voltaire : « Voltaire n’a rien remarqué dans des vers tels que ceux-là […]. V. trouve que la situation de cette scène est
révoltante, “qu’elle tient du comique… On n’aime de telles aventures que dans les contes de La Fontaine et dans les farces” »… La
scène liminaire de l’acte IV inspire à Flaubert des réflexions sur les inconvénients de remettre en scène les mêmes personnages
deux scènes de suite : l’action « perd de son attrait, de son imprévu. En général on n’aime pas au début d’un acte ni tout à fait les
mêmes personnages qu’au suivant ni d’autres complètement nouveaux. Dans le premier cas l’intérêt n’est pas excité, la curiosité
est morte, partant l’attention dans le second […] on est ennuyé du mal qu’il faut se donner pour l’entendre et l’on n’écoute pas »…
Citons encore ces vers (V, 7) notés par Flaubert, qui annoncent la personnalité de Salammbô :
« Mais quant à Sophonisbe il m’est permis de dire
Qu’elle est Carthaginoise et ce mot doit suffire ».
Et Flaubert d’ajouter, après son analyse du dénouement : « Observ. que dans les scènes 4, 5, 6, 7 et 8 où se trouve Barcée, celle-
ci n’ouvre pas la bouche une fois. – Le confident ôtait tout à fait sa figure du 2
e
plan pour faire ressortir celle du premier mais
tellement enfoncée au second plan, que celle du premier y gagne peu. Au reste il faudrait essayer sur le théâtre pour juger si c’est
tout à fait inutile. On jouerait une fois par exemple avec cette confidente muette, une autre fois sans elle »…
Puis Flaubert aborde la
Sophonisbe
de V
oltaire
, qu’il analyse plus rapidement parce qu’il n’a pas à réfuter les jugements du
commentateur. La pièce fut représentée en 1774, « impr. d’abord en 1769 sous le nom de M. Lantin, comme la trag. de Mairet
refaite. […] La
Soph
. de Mairet composée en 1629 & jouée en 1633. […] V. paraît préférer celle de Mairet à celle de Corneille. M
r
Lantin (c’est-à-dire V.) “en ranimant la
Soph
. lui a laissé tous ses traits”. Il trouve le 5
e
acte trop court mais le cinquième acte d’
Ath
.
n’est pas beaucoup plus long. Il faut lire tout au long l’étrange page qui termine cette dédicace dans laquelle V. trouve qu’on
pourrait employer des jeunes gens à corriger, “
Agésilas
,
Attila
,
Suréna
,
Othon
,
Pertharite
,
Pulchérie
,
Œdipe
,
Médée
,
la Toison d’or
,
Dom Sanche d’Arragon
(
Dom
Sanche
 !!)
Andromède
. Enfin tant de pièces de Corneille […] qui ne furent jamais lues de personne
après leur chute”. Il trouve même qu’on
pourrait refaire quelques scènes de
Pompée
, de
Sartorius
, des
Horaces », etc. « Comme on
était déjà loin du 17
e
siècle ! Qu’eût dit de cela La Fontaine et Racine ! Je pense que Boileau lui-même en eût ri. Mais le meilleur
c’est que c’est dit avec bonne foi et conscience : “Ce serait à la fois
rendre service à la mémoire de Corneille
et à la scène française
qui reprendrait une nouvelle vie. Cette entreprise serait digne de notre protection et
même de celle du ministère
” »…
Vente Flaubert
(succession de sa nièce Caroline F
ranklin
-G
rout
), Antibes, 28-30 avril 1931, n° 60.
51.
Louis-Benjamin fleuriau de bellevue
(1761-1852) naturaliste, géologue et homme politique. 2
manuscrits
autographes (un signé « Fl. B. »),
Mémoire sur les chaudieres à eau-de-vie
, 1788, et
De la manière de planter la
vigne dans les environs de Paris 
; un cahier cousu de 19 pages in-4, et 9 pages in-4 (plus 1 page autogr. jointe).
400/500
D
istillation
des
eaux
-
de
-
vie
. Mémoire lu à l’Academie de La Rochelle en 1788 relatif à la distillation des vins, très couteuse
localement à cause du prix du bois, et dont l’avenir est menacé par la concurrence du Languedoc et de la Catalogne. Fleuriau rend
compte des résultats du concours organisé par l’Académie de La Rochelle, et du mémoire couronné (recommandations pour les
combustibles, les alambics, les fourneaux), puis des expériences faites par l’Académie pour vérifier les méthodes prônées et les
améliorations : avec une plus grande dimension dans les alambics, « l’on sera certain d’être parvenu à un degré de perfection dont
la methode ordinaire etoit très éloignée »… – Mémoire sur la culture de la vigne dans les environs de Paris : plantation (schéma à
l’appui), taille du cep « vers la fin germinal », intérêt de ces techniques pour la production rochelloise ; car « lors même que nous
ne songerions nullement à perfectioner nos vins, nous devons du moins chercher à maintenir la reputation de nos eaux de vie &
s’il est possible, le moyen de leur donner la même qualité que celles de la Champagne, de Cognac »…