Page 339 - BAT-PBA-CATAL LIVRES-V28.indd

Version HTML de base

338
“Un moment de la conscience humaine” (Anatole France)
423
ZOLA (Émile).
J’accuse...!
Lettre au Président de la République.
Paris, L’Aurore, jeudi 13 janvier 1898
.
Livraison in-plano de (2) ff., sous verre.
Édition originale de la fameuse lettre-manifeste d’Émile Zola adressée au président de la
République Félix Faure.
Elle a paru sur six colonnes à la une du journal
L’Aurore
le 13 janvier 1898 ; son titre,
J’accuse
- trouvaille
de Georges Clemenceau - s’étale, énorme et provocateur. “Le choc fut si extraordinaire, rapporte
Péguy, que Paris faillit se retourner.” Le tirage considérable de 300 000 exemplaires s’écoula aussitôt.
L’honneur des intellectuels.
Au lendemain de l’acquittement d’Esterhazy par le conseil de guerre, la voix légale de la révision semblait
condamnée. Zola s’employa donc à démonter point par point la procédure, mettant nommément en
cause les généraux, les experts en écriture et attaquant l’état-major et les conseils de guerre de 1894 et
1898. En tête de chaque paragraphe, la litanie des “J’accuse” vient scander le réquisitoire implacable.
Le but de l’écrivain était d’être poursuivi: “Qu’on ose donc me traduire en cour d’assises et que
l’enquête ait lieu au grand jour! J’attends.” Condamné, il dut prendre le chemin de l’exil.
La publication de la lettre de Zola fut, selon le mot de Jules Guesde, “l’acte le plus révolutionnaire du
siècle”. Si elle provoqua un regain d’antisémitisme, elle eut le mérite de réveiller le camp dreyfusard :
“Il y eut un sursaut, dit Péguy: la bataille pouvait recommencer.” Les intellectuels se pressèrent alors
pour signer les pétitions réclamant la révision du procès que
L’Aurore
publia dans la foulée. De France
et de l’étranger parvinrent des milliers de lettres et de marques de soutien.
“Le
J’accuse
simplifie l’Affaire en même temps qu’il l’éclaire. Il impose de la France - ou des deux
France -, à la fin du XIX
e
siècle, une vision à la fois lucide et sommaire. Mais la lettre de Zola continue
(...) à fixer la ligne de partage des deux camps qui s’affrontèrent, et peut-être désigne-t-elle durablement
deux types de pensées et d’attitudes, deux cultures, qui ont trouvé, au cours du XX
e
siècle, de nouvelles
raisons de s’affronter, dans “une guerre civile qui dure encore”” (Jean-Denis Bredin).
Le manuscrit autographe de
J’accuse
est désormais fixé à la Bibliothèque nationale de France.
Exemplaire légèrement bruni et déchiré aux pliures. Quelques manques.
(
En français dans le texte
, 1990, n° 297.-
Dictionnaire d’Émile Zola
, pp. 195-197.-
Dictionnaire des
œuvres politiques
, 1995, pp. 1295-1297 : notice de Jean-Denis Bredin.)
3 000 / 4 000