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Le “Spectateur nocturne” de la fin d’un monde
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[RESTIF de La BRETONNE (Nicolas Edme)].
Les Nuits de Paris,
ou le Spectateur nocturne.
Londres et Paris, 1788-1794
.
16 tomes en 8 volumes in-12, demi-basane brune, dos lisses filetés or,
tranches jaspées
(reliure du XIX
e
siècle).
Édition originale. Rare exemplaire complet des seize parties requises.
L’illustration comprend 16 figures hors texte de Binet.
Précieuse iconographie figurant, pour la plupart, Restif de La
Bretonne dans son curieux costume de “Spectateur nocturne”,
portant cape et chapeau à larges bords, surmonté d’un hibou. L’une
des planches représente un dîner chez Grimod de La Reynière.
Restif de la Bretonne chroniqueur de la fin de l’Ancien régime.
Les Nuits de Paris
sont plus qu’un recueil d’anecdotes pittoresques
sur le petit peuple parisien : pour leur étrangeté poétique, le mystère
qu’on devine dans les détails familiers, la bizarrerie des rencontres, la
fertilité du hasard autour du promeneur toujours vigilant, toujours
présent comme un Maldoror ou un Fantômas aux drames cachés
dans les ténèbres, on peut les rapprocher d’œuvres modernes inspirées
par la capitale,
le Spleen de Paris, le Paysan de Paris
ou
Nadja
” (Henri
Coulet,
Le Roman jusqu’ à la Révolution,
p. 493).
Cette vision hallucinante du Paris de la fin de l’Ancien Régime
est complétée en 1790 et 1794 d’une quinzième et d’une seizième
parties. Ces deux tomes sont un journal personnel de Restif, pendant
la Révolution - depuis le 23 avril 1789 jusqu’au 31 octobre 1793 - et
“possèdent, pour cette raison seule, un intérêt exceptionnel” (Rives
Childs). L’ultime chapitre, de l’aveu même de Restif dans
Monsieur
Nicolas,
“devait décrire toutes les horreurs de Marat et de son parti (…)
tous ces exécrables gredins”. Cela vaudra à son auteur une
convocation devant le comité de Police de la Commune de Paris qui
censurera plusieurs passages de l’ouvrage - avant de l’interdire tout
simplement. Le libraire Mérigot, déjà effrayé, n’osa pas le mettre
en vente, allant même jusqu’à détruire la plupart des exemplaires
en sa possession.
“Ce grand ouvrage, essentiellement parisien, a toujours été
recherché, alors même que les œuvres de Restif étaient encore
décriées, négligées et presque inconnues de notre génération, écrit
Paul Lacroix en 1875, ajoutant : c’est, en effet, un livre unique
qui représente la physionomie morale de Paris vers la fin du dix-
huitième siècle” (
Bibliographie de Restif de La Bretonne,
p. 299).
Précieux exemplaire complet du rarissime texte de la
seizième partie.
Paul Lacroix, à la fin du XIX
e
siècle, pensait qu’il n’en subsistait pas
10 exemplaires… Et tous les bibliographes de renchérir ; “rarissime”
pour Rives Childs, “presque introuvable” pour Cohen.
Elle comporte certains feuillets qui ont été censurés et remplacés
par des cartons.
Exemplaire en reliure uniforme.
Le frontispice du tome XVI, représentant Charlotte Corday, fait
défaut comme très souvent. Enfin, les 12 feuillets de tables non
chiffrés à la fin du tome XV manquent.
(Rahir,
Bibliothèque de l’amateur
, 612.- Rives Childs,
Restif de la
Bretonne,
pp. 303-306.)
3 000 / 4 000
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