Page 24 - CATAL-LIVRES-211112-V1.indd

Version HTML de base

23
Certains clichés sont en double ou triple épreuve, avec les mêmes
annotations au verso, mais d’une autre main (indiquant des
provenances diverses), tandis que certains Communards font l’objet
de clichés différents.
Qu’on les tienne pour annonciateurs de la photographie judiciaire
systématisée par Alphonse Bertillon à la préfecture de Police de
Paris (comme Christian Phéline dans
L’Image accusatrice
, 1985), ou
inscrits dans une continuité artistique avec les portraits d’hommes
politiques réalisés pour la presse sans intention policière à la fin du
second Empire par un photographe d’atelier (voir Stéphanie Sotteau
Soualle,
Ernest Appert, un précurseur d’Alphonse Bertillon ?
, site
en ligne Criminocorpus.cnrf.fr), ces portraits annotés sont d’une
exceptionnelle richesse documentaire et constituent en quelque sorte
l’œil du pouvoir
de l’époque.
Ces photographies sont au nombre de celles que Lucien Descaves
– grand admirateur des Communards et notamment de Gustave
Lefrançais dont il fut l’exécuteur testamentaire, ici portraituré
–, aimait à consulter secrètement lorsqu’il rendait visite à son ami
Huysmans, fonctionnaire au ministère de l’Intérieur, dans les années
1880-1890. “Quand j’allais chercher Huysmans, vers cinq heures, rue
des Saussaies, il arrivait quelquefois qu’il fût
appelé à la Direction
;
je l’attendais alors dans son bureau de sous-chef, où j’avais licence
de passer en revue, pour m’occuper, une collection de Communards
jugés par les conseils de guerre, la Collection Appert, encore ensevelie,
longtemps après, dans les concessions à perpétuité qu’étaient, pour
les condamnés, d’étroits casiers remplis de photographies d’identité.
[…] Un jour, les fichiers disparurent… J’en marquai mon regret à
Huysmans qui se contenta de sourire, me jugeant incorrigible”
(Descaves,
Les Dernières Années de J.-K. Huysmans
, 1941, pp. 58-59).
Ensemble unique, d’une grande rareté.
8 000 / 10 000