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[
DUMAS père Alexandre
(1802-1870)].
Couteau caucasien d’Alexandre Dumas, offert à son ami
Vuillemot ; longueur hors fourreau 40 cm, dans le fourreau 44
cm, lame 27 x 3 cm ; lame d’acier avec ornementation dorée près du
manche, bague en métal damasquiné, manche de corne, fourreau de
cuir noir sur bois avec embouts métalliques (quelques manques et
réparations au cuit du fourreau).
Précieux souvenir du voyage en Russie et témoignage d’amitié
au cuisinier Vuillemot.
Ce beau couteau porte gravé en noir sur le manche de corne les
initiales AD enlacées ; sur la lame, Dumas a fait graver en lettres
italiques l’inscription :
Alexandre Dumas à son ami Vuillemot
.
C’est à Tiflis (actuelle Tbilissi en Géorgie), lors de son voyage en
Russie et dans le Caucase en 1858-1859, que Dumas a acquis ce
couteau, aux alentours du 1
er
janvier 1859.
Dans
Le Caucase
(1859), il raconte : « à Tiflis, je marchandais un
poignard à la boutique d’un armurier. Un prince Eristof passe avec ses
quatre noukers. Je ne le connaissais pas, il ne m’avait jamais vu. On
lui dit qui je suis. Alors, s’approchant de moi, et, s’adressant à mon
jeune interprète russe : “Dites à M. Dumas de ne pas acheter à ces
gens-là ; ils le voleront et lui donneront de mauvaise marchandise.” Je
remerciai le prince Eristof de son conseil, et je continuai mon chemin
en jetant un regard sur le poignard qu’il portait à sa ceinture. En
rentrant chez moi, j’y trouvai la carte et le poignard du prince Eristof.
Le poignard valait quatre-vingts roubles ; la carte n’a pas de prix »
Le
Caucase
, chap. xxxiv).
Son compagnon de voyage, le peintre Jean-Pierre Moynet, a évoqué
leurs courses dans le bazar de Tiflis, et les boutiques des armuriers,
« qui étalent des quantités de lames, de schaskas ou de kangiars, des
pistolets et des fusils ornés d'argent avec des damasquinures brunies
d'un travail merveilleux ».
Dumas a offert ce couteau à son ami le cuisinier Denis Joseph
Vuillemot (1811-1876), qu’il avait connu à l’
Hôtel de la Cloche et
de la Bouteille
à Compiègne, et qui lui communiqua nombre de
recettes pour le
Grand Dictionnaire de cuisine
(1872). Dans ce livre,
il consacre un article louangeur à Vuillemot, et évoque le don de ce
fameux couteau :
« Vers 1863, à mon retour de Tiflis, je reçus la visite de Vuillemot, qui
m’informa qu’une ovation m’était faite par mes amis, mon fils en tête,
sous forme d’un banquet, où devaient se trouver Méry, Grisier, Roger
de Beauvoir, Léon Bertrand, Noël Parfait et autres amis du bon
temps. Le banquet eut lieu en effet au
Restaurant de France
, place de
la Madeleine, que venait de prendre Vuillemot. Le repas fut tel, que,
pour témoigner ma gratitude j’offris à mon hôte un couteau acheté
par moi à Tiflis, qui portait gravé sur la lame :
Alexandre Dumas
à son ami Vuillemot
. Une particularité exquise du menu était qu’il
contenait, sous forme culinaire, depuis le potage jusqu’au dessert, la
liste de mes principales créations. Voici, autant que je me rappelle, le
menu de ce dîner littéraire : […]
Hors-d’œuvre divers.
Potages
. à la Buckingham. Aux Mohicans.
Relevés
. Truite à la Henri III. Homard à la Porthos. Filet de bœuf à la
Monte-Cristo. Bouchées à la reine Margot.
Rôts
. Faisans, perdreaux, cailles, bécasses.
Entremets
. Aux Mousquetaires. Petits pois aux Frères Corses.
Écrevisses à la d’Artagnan. Bombe à la Dame de Montsoreau. Crème
à la Reine Christine. Salade à la Dumas. Vase d’Aramis. Gâteau à la
Gorenflot. Corbeille de fruit de Mlle de Belle-Isle.
Dessert assorti.
Vins
. Xérès, Amontillado, Pakaret, Château-Laffitte, Clos-Vougeot,
Jurançon, premier service. Champagne, Pommery et Greno, et Moët
frappé. Chypre, Constance, Setaval, au dessert ».
Ce dîner offert à Alexandre Dumas et Jean-Pierre Moynet, de 40
couverts, se déroula en fait le 2 avril 189 au Restaurant de France, 9
Place de la Madeleine.
5 000 / 6 000