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Constantinople : « Je suis encore tout étourdi des beautés de cette ville singuliere que la peste décime »… Il
s’est établi chez le Marquis de Rivière, réfugié dans le village de Tharapia sur le Bosphore… Il a vu le Sultan
se rendre à la Mosquée, a parcouru les bazars : « J’ai vu danser et mourir dans les rues. Le turc m’a coudoyé,
le juif s’est prosterné devant moi, le grec m’a souri finement, l’armenien a voulu m’attraper, les chiens m’ont
poursuivi et la tourterelle est venue avec sa confiance ordinaire se reposer sur mon épaule. Voilà
Stamboul la
bien gardée, la bien aimée du prophète
. J’y ai vu des palais enchantés, des barraques empestées et hideuses et
des arbres magnifiques ; les Mosquées, leurs parvis, leurs portiques, leurs fontaines, rappelent les mille et une
nuits »… Il énumère les prochaines étapes de son voyage, Jaffa, Baalbeck, Tripoli, Aboukir, Éphèse : « Pendant
cette course on suivra une affaire qu’il faut conduire avec
mistere, silence et prudence
et qui comblerait vos
vœux les miens et ceux des amis des arts »… Il sera de retour à Paris le plus rapidement possible : « Je vous
rendrai votre liberté »… Il s’apprête à écrire au comte de Pradel pour lui recommander Ducis… Etc.
16.
François GÉRARD
(1770-1837) peintre. L.A.S., 4 février 1823, à un comte ; 1 page in-8 (beau portrait
lithographié par Belliard joint).
200/300
Il s’empresse de le remercier pour la bonne nouvelle et va « songer sérieusement au second sujet ». S’il ne peut
le voir demain, il se rendra chez lui à l’heure qui lui convient. Il est ravi de cette charmante gravure : « Voilà un
véritable progrès. Il était naturel qu’elle orne un ouvrage de Monsieur le Comte »…
17.
Anne-Louis GIRODET-TRIOSON
(1767-1824) peintre. L.A.S. « Girodet de Roussy », 5 janvier 1790, à
François Gérard ; 4 pages in-4.
1 500/2 000
Longue lettre inédite à son ami de jeunesse le peintre Gérard.
« Si je compare, mon ami, ma petite solitude au Royaume de France, je te dirai que le
Calonne
en est parti et
pour toujours, Dieu merci oui pour toujours. Depuis que je t’ai écrit de nouvelles lumières ont changé des
soupçons en certitude et m’ont trop bien confirmé ce que je savais déjà. L’agréable position dans laquelle je me
suis trouvé ! Dire à un homme qui en rendant ses comptes, ne peut malgré tous ses efforts cacher la friponnerie,
lui dire, dis-je, qu’on est bien reconnaissant de ses services, de ses peines, de son zèle ; que la crainte que sa
santé déjà alterée, ne soit totalement compromise par une continuité de soins qu’un ami désintéréssé est seul
capable de prendre, est l’unique motif qui détermine à les lui éviter, l’assurer du regret sincère de le voir dans
une position qui ne permet pas de lui continuer les marques d’une confiance aussi bien placée, voila mon ami
ce qu’à ma place un D. eut seul pu dire intrépidément, et sans changer de visage, à un coquin qui se connaît
tel, et qui voit qu’on ne l’ignore pas ; mais je ne sais pas encore manier la fourberie comme lui, et je n’ay eu qu’à
peine la force de balbutier cet honnête et sincère remerciment. Je finis d’avaler le calice en l’assurant d’un ton
plus franc, que ma reconnaissance égalait le zèle quil avait mis à la conservation de mes intérêts ; en cela je
n’ay point menti et quoiqu’il ait fait semblant de prendre la chose du bon coté, il n’a pû douter du motif qui me
faisait parler à double face à Monsieur Double Main »… Il aimerait lui écrire des lettres moins tristes et avoir
quelques sources de gaieté qui lui fassent oublier « le tourment de vivre », mais il est accablé d’affaires : « Je ne
puis satisfaire le besoin que j’ay de revoir un ami sûr, et une maîtresse encore incertaine […] J’ai besoin d’être
partout où je ne suis pas, et je m’ennuyerais à crever où je suis si je n’y étais pas aussi fatigué »… Il demande à
Gérard des nouvelles de ses projets et de son amie : « Je ne te dirai rien de la mienne – c’est plustot à toi de m’en
parler et si ma présence n’a pas plus d’effet que mon éloquence je croirai qu’une promenade de cinq mois est
bien assés longue. Au mois d’août il fesait beau à se promener, mais au mois de janvier on doit patiner. Passe
moi cette mauvaise plaisanterie »… Il termine en saluant sa famille…
On joint une P.A.S., « A.L. Girodet », Rome 31 décembre 1790 (1 page obl. in-8). Reçu de
M. Ménageot, Directeur de l’Académie de France, la somme de 15 écus « pour le quartier de ma
pension y compris sept paules pour le chauffage »….