Pierre Bergé prépare la vente aux enchères des 1.600 livres rares de sa bibliothèque

Pierre Bergé prépare la vente aux enchères des 1.600 livres rares de sa bibliothèque.

Le 11 décembre prochain, l’homme d’affaires Pierre Bergé mettra aux enchères, via sa propre maison de vente Pierre Bergé & Associés, et en collaboration avec Sotheby’s, sa bibliothèque personnelle. Cette dernière est si riche qu’une sélection de 60 ouvrages phares font déjà l’objet d’une exposition itinérante à travers le monde. Après Monaco en juillet, ce sera New York en septembre, puis Hong Kong en octobre et Londres en novembre.

Cette collection unique, construite sur plusieurs décennies, rassemble 1.600 livres, partitions musicales et manuscrits précieux du XV e au XX e siècle : depuis l’édition princeps des « Confessions de Saint Augustin », imprimée à Strasbourg vers 1470, jusqu’au « Scrap Book 3 » de William Burroughs, paru en 1979. Les estimations s’échelonnent de 1.000 euros à 2,5 millions d’euros pour le manuscrit « Nadja » d’André Breton, qui pourrait même s’envoler jusqu’à 3,5 millions. Six autres ventes suivront en 2016 et 2017 pour disperser ce trésor.

Une sorte d’autobiographie

La bibliothèque est à l’image de son propriétaire. « Une telle collection, c’est en quelque sorte une autobiographie ; elle reflète mes choix, mes goûts, s’affranchit de tout passage obligé, reflète toutes les cultures du monde », explique Pierre Bergé. Le premier livre qui l’a marqué a été « David Copperfield » de Charles Dickens, lu à l’âge de neuf ans ; il possède aujourd’hui l’édition personnelle de l’auteur, avec même une dédicace de ce dernier.

L’homme d’affaires, qui fut au début de sa carrière courtier en livres, a attrapé le virus de la bibliophilie grâce aux libraires de la rue de Seine. « Au numéro 22, l’un d’eux m’a fait découvrir ce qu’était une édition originale, la première fois qu’un ouvrage est mis dans le commerce », se remémore Pierre Bergé. Contrairement à la collection d’oeuvres et d’objets d’art constituée avec Yves Saint Laurent et vendue en 2009 au Grand Palais par Christie’s (373,5 millions d’euros), le styliste ne s’est jamais intéressé à cette bibliothèque, constituée par son compagnon et par lui seul.

Pierre Bergé se dit heureux que d’autres passionnés puissent à leur tour profiter de ces perles rares accumulées pendant toute une vie. « J’ai 85 ans et je n’ai pas d’héritier. Dans mon testament, j’avais prévu d’en léguer le produit à la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint-Laurent. » C’est le commissaire-priseur Antoine Godeau, de la maison de vente Pierre Bergé, qui tiendra le marteau. Pour l’accompagner, l’homme d’affaires a choisi cette fois Sotheby’s, qui dispose d’un excellent département livres dirigé par Anne Heilbronn, fille d’un grand bibliophile.

Vente à Drouot

Ironie du sort, la vente s’effectuera à l’Hôtel Drouot, là même où Pierre Bergé avait tenté en 2001 – année de la libéralisation du marché – de fédérer en vain les commissaires-priseurs afin de constituer une société capable de rivaliser avec les maisons anglo-saxonnes. « Je leur avais expliqué le poids de Christie’s et Sotheby’s dans le monde. Drouot était alors un nom très connu, on aurait pu tout de suite ouvrir des antennes à New York et Hong Kong », rappelle-t-il. Mais à présent, Pierre Bergé a définitivement tourné la page.

Quelques lots phares de la vente :
Augustinus (1476) : estimé de 150.000 à 200.000 euros
oeuvres, Labé (1555) : 300.000 à 400.000 euros
Don Quichotte, Cervantès (1605) : de 150.000 à 180.000 euros
Works, Shakespeare (1664) : 200.000 à 300.000 euros
Maximes, Chamfort (1795), exemplaire de Stendhal : 200.000 à 300.000 euros
Florbelle, Sade (1807), manuscrit : 300.000 à 400.000 euros
Considérations, Staël (1818) : 300.000 à 400.000 euros
Le Lys, Balzac (1836) : 120.000 à 150.000 euros
Madame Bovary, Flaubert (1857), envoi à Victor Hugo : 400.000 à 600.000 euros
Poètes maudits, Verlaine (1888) : 300.000 à 400.000 euros
Prose du Transsibérien (1913), Cendrars : 200.000 à 300.000 euros.
Nadja, Breton (1928), manuscrit : 2,5 à 3,5 millions d’euros
Ref : 21/08/2015 Par Martine ROBERT – Les Echos
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