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Lot n° 801
Sélection Bibliorare

APOLLINAIRE GUILLAUME (1880- 1918) - POÈME ET L.A.S. À LOU. 3 Juin 1915. 4 pages in-8, enveloppe conservée.

Estimation : 20 000 - 30 000 €
Adjudication : 30 000 €
Description
Poème et lettre autographe signée Gui adressée à Lou.
Sur l'enveloppe conservée (franchise militaire) figure l'adresse de Lou, de la main d'Apollinaire :
La Comtesse de Coligny-Chatillon 202 boulevard Saint Germain Paris 7ème.
Une fleur séchée est également dans l'enveloppe.

... «Ma petite chérie.
Mais quel est donc l'horrible mot que tu n'as pas écrit, tu te fais... quoi... Je veux absolument savoir?... Je te défends absolument d'avoir de mauvaises idées... Préviens-moi de ton départ pour que je puisse adresser mes lettres comme il faut...
Mais m'écriras-tu seulement? L'important est que tu sois bien...
Ne te préoccupe pas de moi... Ca n'a pas d'importance... Un obus moral ou matériel de plus ou de moins, maintenant je m'en fous...».

Apollinaire mentionne Toutou l'autre amant de Lou.

... «D'ailleurs, je sais bien que Toutou n'est probablement pas mon ami comme je suis le sien... Il ne me connaît pas et s'en fout pas mal... Au revoir Ptitlou... J'espère toujours d'ailleurs te retrouver après la guerre. Mais mon ptitlou ne croît pas qu'il y ait de reproches là-dedans, je t'aime bien, tu le sais et comme tu m'embrasses à la façon qui me fait quelque chose, je prends cela et après tout mon ptitlou, je ne sais pas pourquoi je dis ça, je sais bien que tu m'aimes beaucoup, que Toutou est aussi mon ami, mais qu'il ne me connaît pas, qu'il ne peut avoir l'exaltation d'un poète ne l'étant point. Amuse toi, fais comme tu veux, tu es mon amie pour la vie, c'est tout et c'est assez mon ptitlou adoré que j'embrasse de toutes mes forces, ptilou, mon pticoeur, très chéri»...

A la suite de cette lettre de deux pages écrites du front, figure le poème «Lou, mon étoile» (2 pages in-8), poème de 78 vers où se mêlent amour, érotisme, et réalité sombre de la guerre. Il fut publié pour la première fois dans «Ombre de mon amour» en 1947 aux pages 122 à 124.

«L'étoile nommée Lou est aussi belle, aussi voluptueuse qu'une jolie fille vicieuse... Ton royaume s'étend en plaines animées comme les oiseaux. En plaines mouvantes comme un régiment de fantassins nomades. Etoile Lou, beaux seins de neige rose. Petits nichons exquis de la douce nuit. Clitoris délectable de la brise embaumée d'avant l'aube... Mais cette nuit est si belle!... Je ne vois que l'étoile que j'aime. Elle est la splendeur du firmament. Et je ne vois qu'elle.
Elle est un petit trou charmant aux fesses des nuages. Elle est l'étoile des étoiles. Elle est l'étoile d'amour. Oh nuit, Oh nuit dure toujours ainsi. Mais voici les gerbes des obus en déroute qui me voilent mon étoile. Je baisse les yeux vers les ténèbres de ma forêt... Étoile Lou fait moi monter vers toi. Prends-moi dans ta splendeur. Que je sois ébloui et presque épouvanté. Que l'espace bleu se creuse à l'infini.
Que l'horizon disparaisse. Que tous les astres grandissent. Et pour finir fait moi pénétrer dans ton paradis. Que j'éprouve une sensation de bien-être inouï. Que J'absorbe par toute ma chair, toute mon âme, ta lumière exquise. Oh mon paradis! Gui».
Apollinaire lui écrira tous les jours. La guerre fait rage, il pense à Lou.
Il va continuer à lui écrire jusqu'au 16 janvier 1916. Progressivement les lettres s'espaceront.

La relation entre Lou et Apollinaire sera moins passionnée depuis la rencontre de Marseille le 28 mars 1915.

Madeleine va remplacer Lou. Ils se rencontreront une dernière fois, fortuitement en 1917 à Paris Place de l'Opéra.
L'une des plus belles lettres d'Apollinaire à Lou.
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