Lot n° 671
Sélection Bibliorare

APOLLINAIRE, Guillaume. Le Poète assassiné. Paris, Bibliothèque des Curieux, 1916. In-12 (181 x 120 mm) de (2)-316-(2) pp. : reliure recouverte de deux pièces de basane maroquinée olive (pour le plat supérieur) et bordeaux (pour le plat...

Estimation : 15 000 / 20 000 €
Adjudication : Invendu
Description
inférieur) se réunissant au milieu du dos lisse orné de deux filets verticaux et à froid, couverture illustrée en couleurs et dos conservés, non rogné, tête dorée (C. Brunius).

→Édition originale.

Portrait-frontispice d’Apollinaire par André Rouveyre, daté de mai 1916 : le poète est représenté avec le crâne bandé, conséquence de sa blessure du 17 mars 1916.

"A la fois séduisante et atroce, la guerre bouleverse le regard d’Apollinaire sur le monde et la littérature. Malgré ses contradictions, l’expérience du front devient pour l’auteur des Calligrammes un véritable champ d’expérimentations littéraires. Recueil de contes paru en 1916, Le Poète assassiné illustre le penchant d’Apollinaire pour la surprise et l’innovation artistiques. En arborant une architecture éclatée, il surprend par une écriture hétérogène qui mélange subversivement théâtre, prose et poésie" (Olivia-Ioana Costas).

►Exceptionnel envoi autographe signé au premier feuillet blanc :

A Tristan Tzara
très cordial hommage
Guillaume Apollinaire

Le jeune poète roumain, qui venait de créer Dada à Zurich en février 1916, avait pris contact dès le mois d’avril avec le marchand de tableaux Paul Guillaume : celui-ci le présenta à Guillaume Apollinaire, Max Jacob et Pierre Reverdy – les trois principaux représentants, avec Blaise Cendrars, de l’avant-garde poétique française.

L’heure était désormais à Dada, et Tristan Tzara partagea avec Apollinaire – dont il avait lu et traduit des poèmes d’Alcools – les pages des deux grandes revues littéraires issues de la révolution cubiste : Sic et Nord-Sud. Les contacts de Tzara avec la France et la jeune génération “couvée” par Apollinaire s’intensifièrent : Dermée, Picabia, Éluard, Breton, Aragon, Soupault... En 1918, il dédicaça à Apollinaire ses Vingt-cinq poèmes publiés à Zurich.

De son côté, Apollinaire appréciait Dada et son créateur, en qui il voyait un “continuateur” plus radical et dont il avait goûté La Première aventure céleste de Mr. Antipyrine (1916).

On connaît quatre lettres d’Apollinaire à Tzara. Dans la première (13 décembre 1916) il lui promet d’envoyer à Zurich cet exemplaire dédicacé du Poète assassiné, et s’exprime en ces termes : “J’aime votre talent et je l’aime d’autant plus que vous m’avez fait l’honneur de le diriger dans une voie où je vous précède mais ne vous dépasse point...” Mais lorsque Tzara vient s’installer à Paris, chez Picabia, en janvier 1920, puis rôder autour de ses camarades de Littérature, le “poète assassiné”,
l’un de ses principaux inspirateurs, n’est plus là...

►Une remarquable provenance littéraire, très émouvante.

Par cette courte dédicace, Apollinaire – et avec lui une génération tout entière – passe le flambeau de l’Esprit nouveau à la génération suivante.

L’Europe est en feu, l’ancien monde s’effondre, mais l’héritage de la modernité ne restera pas lettre morte : Dada veille au grain.

Fortes épidermures sur le mors supérieur et les coiffes ; le verso de la couverture est piqué.

→Reliure signée de Colette Brunius : née Colette Hulmann, elle était l’épouse de Jacques Brunius, membre du groupe surréaliste à partir de 1936. La célèbre couverture de Leonetto Cappiello est en parfait état.

Le volume est conservé dans une boîte moderne avec dos de maroquin bordeaux et pièce de titre noire (D.-H. Mercher).

►Provenance :
•Tristan TZARA (envoi). –
• Daniel FILIPACCHI, vente du 29 avril 2004, n° 17.

G. Apollinaire, Correspondance générale, Paris, 2015, III, p. 833, n° E390. – Olivia-Ioana Costas, "Le Poète Assassiné et l’écriture de guerre : collage et métissage générique", in : revue Relief 8 (2), 2014, pp. 51-61. – Sur les relations entre Apollinaire, Dada et les avant-gardes en général, voir M. Dachy, Dada et les dadaïsmes, Paris, 2011, pp. 45-70 passim.
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