Lot n° 13
Sélection Bibliorare

Gustave COURBET (1819-1877). 4 L.A.S., 1860, à Charles CHAPPUIS, professeur à la Faculté de lettres de Besançon ; 14 pages in-8, une adresse, montées dans un RECUEIL d’imprimés, coupures de presse et lettres, tiré au dos BEAUX-ARTS 1860,...

Estimation : 5 000 / 7 000 €
Adjudication : 13 750 €
Description
relié demi-veau blond (reliure de l’époque).
► IMPORTANTES LETTRES INÉDITES SUR SES TABLEAUX ET L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE BESANÇON.

[Charles CHAPPUIS (1822-1897), normalien et philosophe, professeur à la Faculté des lettres de Besançon, était un grand ami de Louis Pasteur dont il fut le condisciple au collège de Besançon, où Courbet, lui aussi, fit ses études.] Le présent volume fut constitué par Chappuis, qui collabora à l’organisation de l’Exposition universelle de Besançon de 1860, et, à cette occasion, publia plusieurs articles dans le journal La Franche-Comté sous le pseudonyme de Charles Duvernoy.

[Printemps 1860]. « Je suis heureux d’avoir retrouvé en vous un camarade. Je compte sur vous pour m’être de bon secours. Du reste je fais pour vous être agréable à tous ce que je ne peux pas faire dans ce moment, comme dépense pécuniaire. Vous concevrez cela si je vous dis que je fais construire un atellier que je désire depuis 15 ans, et qui pourtant m’était de la plus grande utilité. Vous voyez qu’il y a plusieurs raisons graves si je suis en retard pour l’exposition de Besançon. Mais encouragé par la sympathie que vous m’avez manifestée vous tous je vais faire tous mes efforts pour me mettre en ordre avec vos règlements, quoique retardataire »… Il adresse donc des précisions sur l’espace qu’il espère occuper, en recommandant qu’on suive l’exemple des « expositions du gouvernement » à Paris, où, par ses efforts, on a fini par accrocher sur un même panneau les œuvres de chaque peintre, arrangement avantageux pour le public…

Suivent les dimensions des tableaux qu’il enverra dès qu’ils seront encadrés :
Cribleuses de blé « mœurs anciennes des cultivateur de Franche-Comté » ;
Voyage dans la neige dans les montagnes du Jura en 1860 ;
Chasseur allemand « chasse non d’ordre » ;
Chevreuil pendu « épisode de la curée, tableau de 1858 » ;
Paysage des bords de la Loue Printemps ;
Renard sur la neige devant sa tanière croquant sa proie ;
Cerf qui prend eau, « (chasse d’ordre) un cerf chassé au bout d’une heure va tremper sa langue dans une fontaine » ;
Portrait d’une dame allemande ; Portrait de Melle Z*** ; Jeune femme nue dormant. Il termine en promettant à Chappuis un paysage…

[Printemps 1860]. « J’ai tellement la tête bourrée de bêtises et de peinture que je ne sais plus ce que je fais. J’ai oublié de vous mettre les prix. Je cherche à vous envoyer tout un musée c’est-à-dire une colection de tableaux qui remplisse pour ainsi dire le cadre des différents genres que comporte l’art de la peinture. Je n’ai pas entierrement tout ce que je désirerais sous la main […] Pourtant il y aura un spécimen de chaque chose. Ainsi les cribleuses de blé tableau de mœurs ou genre, tableau de chasse à figures, d’automne, et d’été ; chevreuil nature morte, paysage de printemps qui est celui que je vais vous faire, ensuite portrait sérieux, qui peuvent être considérés comme portrait historique par leur manière d’être » :
celui de BERLIOZ, « que je désire qu’on ne mette sur le livret que par ses initiales, vu que je n’ai pas son autorisation », celui d’une jeune fille de Salins « et non d’Ornans », et celui de Max BUCHON, mais qu’il voudrait retoucher « si Buchon peut venir à Ornans […]
Ensuite ce voyage dans le Jura scène de neige à figures puis de la neige sous d’autres formes encore, (tableaux peu traités par leur difficulté). Maintenant il me reste un petit nud une jeune femme endormie je ne sais si cela vous effarouche ce serait domage car les peintres et les amateurs aiment cela, je vous l’enverrai en tout cas. Vous voyez mon cher que je ne me moque pas de vous, comme on a pu vous le faire croire. Il me semble que tout cela doit être une bonne aubaine pour votre exposition. Avec ma réputation vous pourrez faire une réclame monstre et faire venir des amateurs depuis l’Allemagne depuis la Belgique, etc. et qui viendront spécialement pour ces toiles, et pour le coup vous pourriez faire mentir ce fameux proverbe qui maintient depuis longtemps nul ne fait de miracle dans son pay. Jusqu’ici il m’a été applicable, aussi cette tentative de ma part est courageuse »… Il voudrait un endroit « très éclairé », parce que sa peinture supporte la grande lumière… Il a décidé de baisser ses prix par rapprt à ce qu’il vendrait ces toiles à Paris ou Bruxelles ; il dresse la liste chiffrée des douze tableaux, qui coûteront de 3000 francs (Les Cribleuses de blé) à 300 (Portrait d’une jeune fille de Salins)…

[Ornans 14 juin 1860]. « J’arrive demain avec arme et bagage, par la petite vitesse comme cela m’est recommandé.
Je vous porte (car j’irai aussi) 5 grands tableaux le Cribleuses, le Renard, le Chevreuil, le Chasseur allemand, le Voyage dans la neige. Ces cinq peuvent déjà faire une grande occupation de place, quant aux autres les cadres ne sont pas terminés »…
Le paysage qu’il lui destine, « Paysage de la Roche Oragay (Maysières) », il sera fait incessamment. Il raconte l’accident qui lui est arrivé à Amancey : « j’ai glissé dans un escalier de pierre et me suis foulé une main, heureusement c’est la gauche, mais pendant deux jours il m’a été impossible de peindre. Si c’eût été la droite mon exposition eût été enfoncée. J’écris à Buchon à Salins s’il peut venir poser, je serais content qu’il soit à l’exposition car cela lui ferait plaisir. Je porterai demain la petite femme nue pour vous la faire voir, et savoir si elle est possible pour votre exposition »…

Ornans 10 septembre 1860. « Je n’ai rien à vous refuser mon cher ami, parce que c’est vous qui me demandez ; malgré le prix de ce tableau, vous, vous m’en auriez offert 500 f. que je vous l’aurais cédé. La ville de Besançon de laquelle jusqu’ici je n’ai pas à me louer, aurait pris un autre intermédiaire qu’elle n’aurait pas réussit à ce prix. Comme vous me dites que c’est entre nous que se passe ce marché j’ai affirmé qu’il m’avait été acheté 2000 f. le prix que j’avais indiqué. Veuillez ne pas me démentir vis-à-vis du publique. Vous avouerez cher ami que si je ne retire que cela de cette exposition ce n’était vraiment pas la peine que cela m’a donné, et l’argent que cela m’a coûté »… Mais il lui sait gré de sa sollicitude, « et du charmant article si aimable, si savant, si intelligent que vous venez de me faire, qui a enthousiasmé tous mes amis et mes parents, ainsi que moi »… Il ajoute que l’exposition de Bruxelles a vendu à M. Vanbeselaere, « amateur », La Femme au miroir, « pour la somme de mille trois cent fr. prix que j’avais indiqué, il y avait pour ce tableaux deux autres compétiteurs, qui n’ayant pu avoir ce tableau m’en ont commandé deux semblables à ma volonté. Max Buchon en échange du portrait que je lui ai fait vient de faire le mien en littérature. Ce portrait est amusant bien fait peut-être trop aimable »…

LE RECUEIL CONTIENT AUSSI :
— 2 plaquettes : Exposition de Besançon en 1860. Rapport à la commission générale d’exposition sur les travaux du Comité exécutif […] lu dans la séance du jeudi 24 novembre, par Paul BIAL (16 p.).
Louis de VAULCHIER, Revue de l’Exposition de peinture à l’Exposition universelle de Besançon (Besançon, Jacquin, 46 p.).

— Coupures de presse (montées sur feuillets in-8) du « Feuilleton » de La Franche-Comté, [9 juillet-8 décembre 1860] : articles consacrés à divers aspects de l’Exposition de Besançon, signés Michel Perny, Charles Duvernoy (7, dont un sur Courbet, le 6 septembre 1860), Auguste Achenbach (3).

— Coupure de presse [de La Patrie du 23 août 1860] : « Exposition de Besançon. Beaux-arts », par Théodore Delamarre fils.

— D’autres coupures de presse de La Franche-Comté, de feuilletons ou articles concernant le jury et les récompenses : notamment des discours du préfet et du maire, et un échange polémique entre Armand Barthet, le secrétariat général de l’Exposition et Paul Franceschi.

— 2 L.A.S. de Jules VALFREY, rédacteur en chef de La Franche-Comté, Besançon 3 et 27 septembre 1860, à Chappuis au sujet de ses articles :
« J’ai remarqué spécialement l’étude sur Courbet, qui m’a paru excellent et écrit dans le meilleur français que je connaisse. C’est un document qui vous fait honneur et qui fera honneur à notre journal. Permettez-moi de vous en féliciter »…

— 2 L.A.S. à Chappuis de M. Lancrenon et Maurice Bretillot concernant un projet d’acquisition d’un tableau de Courbet pour le Musée de Besançon, et le refus du maire.
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