Lot n° 3
Sélection Bibliorare

*LETTRES CONCERNANT LE MARIAGE DE JULES VERNE. Ensemble de quatre lettres autographes signées de Jules Verne et d'une lettre de monsieur Deviane, père d'Honorine, la future épouse de l'auteur, adressée à Pierre Verne, père de Jules.

Estimation : 5 000 - 7 000 €
Adjudication : 4 800 €
Description
Ces précieux témoignages, d'un contenu très intime, concernent un tournant important de la vie de l'écrivain, le double assentiment des parents et les préparatifs de son mariage avec Honorine Deviane, dont l'initiative semble lui appartenir complètement.

Précieux ensemble de quatre lettres autographes signées
Avertissement.

On trouve ailleurs pour le nom de la belle-famille de Jules Verne, plusieurs orthographes, toutes d'une humeur très fantaisiste, mais qui ont sans doute quelque raison : du Fraysne de Viane, de Viane, de Vianne, Devianne. Jules Verne l'écrit invariablement Devianne.

Son beau-père signe ses lettres : Deviane.

▬Lettre 1 :
Compte rendu de JV a son pere (octobre 1856)
L.A.S. (4 pp. de format 10 x 15,8 cm), portant la seule date de « Samedi » [octobre 1856], de Jules Verne adressée à son père à propos de l'accueil qui lui a été fait par les Deviane à Amiens. Lettre importante et inédite telle, bien qu'elle fut abondamment citée par Marguerite Allotte de la Fuÿe.

Mon cher père,
J'ai attendu mon retour à Paris pour t'écrire plus commodément car je n'avais de temps pour le faire que le matin dans une chambre d'hôtel où la température faisait éclore des esquimaux et des ours blancs.
J'ai été reçu de la façon la plus affectueuse et présenté à toute la famille - j'ai fait toutes mes visites comme un homme naturel, sans rechigner - dis-le à maman.

Il y a eu plusieurs diners dans la maison paternelle. Ce sera vraiment une famille qui vous plaira bien; le père pour un officier de cuirassier (sic) en retraite a des sentiments bien humains et sa cuirasse a dû le gêner plus d'une fois pour embrasser ses enfants; ceux-ci d'ailleurs devaient redouter ses étreintes.
Ferdinand Devianne a dit que le jour du mariage il rendrait la dot de sa soeur qui est de 105 000 francs. Ainsi pas de craintes à cet égard. Honorine n'a que 45 000 F de dot quand sa fille en a reçu cinquante, parce qu'elle a eu un trousseau que l'on n'a pas donné à la dernière. Aussi, chose agréable pour entrer en ménage, nous n'aurons ni linge, ni meubles à acheter : ce qu'elle a et ce que j'ai est plus que suffisant [...]

Ici, des considérations sur le trousseau, les bijoux d'Honorine et les meubles du futur ménage avec cette conclusion qu'Honorine n'est pas ambitieuse. Philosophe, Jules Verne ne se montre pas davantage exigeant.

[...] Maintenant, mon cher père, Honorine et moi, nous nous aimons plus que jamais [...]
Je crois maintenant mon cher père, que tu pourrais écrire à Amiens pour établir les relations officielles entre les deux familles. J'ai bien vu qu'on attendait donc une lettre de toi, et je te serais très reconnaissant de vouloir bien t'exécuter [...] «...de vouloir bien t'exécuter... » et non : « bien vouloir »... C'est presque un ordre. Jules Verne use d'un ton très libre avec son père, d'une familiarité spirituelle.

[...] Si tu veux le faire directement, c'est à monsieur Devianne 8, boulevard Fontaine à Amiens qu'il faut adresser ta lettre à moins que tu n'aimes mieux m'envoyer ton épitre. Je te recommande de prendre ta belle écriture, celle avec laquelle tu as demandé la main de maman.

La famille Devianne est très honorable et de très bonne naissance des deux côtés; les parents maternels étaient des présidents de cour, etc.
Réponds-moi donc à ce sujet, mon cher père, surtout en m'envoyant ta lettre.

Dès que j'aurai fait mon apprentissage chez M. Guiblain, ma position sera belle (difficilement lisible) tout de suite; c'est convenu avec le frère (Ferdinand, son futur beau-frère).
J'avais une belle occasion de ficher le camp à Bruxelles cette nuit; j'avais 600 000 francs de titres dans ma valise et 95 000 FF de billets de banque que le frère m'avait donné (sic) pour remettre chez Guiblain. J'avais peur d'être volé.
Si l'on songe à la valeur du franc en 1856, ce sont des sommes énormes, en effet.
Enfin, je vous embrasse tous et sans illusions, ni imagination folle, je crois que j'ai trouvé le bonheur.
Que maman m'écrive avec ces demoiselles (ses soeurs).
Ton fils respectueux
Jules Verne

▬Lettre 2 :
Assentiment du futur beau-pere (1er novembre 1856)
L.A.S. (2 pp. et demi de format 13,3 x 21 cm), en date du 1er novembre [1856], de M. Deviane père adressée à Pierre Verne, par laquelle il donne son accord pour le mariage entre sa fille Honorine et Jules Verne. Seule lettre connue de M. Deviane.
Elle fait suite à la précédente, incitant Pierre Verne à faire une demande officielle.
Ce document important a été reproduit pour la première fois à Nantes dans la publication Dix lettres inédites de Jules Verne (lettre n°9) et présentée à l'exposition Jules Verne à Yverdon en mai 1982.
Monsieur,
Lorsque monsieur votre fils m'a fait connaître les sentiments qui l'animaient, j'ai cru devoir lui faire les réflexions que m'avaient suggérées sa détermination. Maintenant que votre assentiment lui est donné, je ne puis qu'accueillir avec plaisir la demande que vous nous faites en son nom.

Les moments que j'ai passé avec monsieur Jules m'ont suffi pour l'apprécier. Les sentiments de délicatesse et d'affection qu'ils nous a exprimés parlent assez en sa faveur. Aussi est-ce avec confiance que nous mettons entre ses mains le Bonheur de notre fille, et l'avenir de ses jeunes enfants. Nous comprenons que le moment où il sera donné à Monsieur Jules de réaliser l'union qu'il a arrêtée soit impatiemment attendu.

Monsieur Jules peut compter sur le concours de ma famille pour arriver à la position qu'il ambitionne; nous faisons ici des voeux pour que ses efforts soient couronnés de succès. Nous connaissons monsieur votre fils, et vous monsieur, ne connaissez ma fille que par la renommée dont monsieur Jules s'est fait le complaisant organe. Aussi, monsieur, serons-nous heureux de vous voir tous au milieu de nous; vous y trouverez simplicité et Bon accueil. Ma femme et moi vous prions d'offrir nos civilités à madame Verne (difficilement lisible) et de recevoir pour vous, monsieur, l'expression de nos sentiments distingués.
Deviane
Amiens, le 1er novembre

▬Lettre 3 :
L'organisation du mariage

L.A.S. (4 pp. de format 13,3 x 21 cm), en date du 17 décembre 1856.
Ce document important a été reproduit pour la première fois à Nantes dans la publication
Dix lettres inédites de Jules Verne (lettre n°10).
Jules Verne adresse une lettre touffue, hâtive et assez heurtée à son père.
Amiens, 17 Xbre (décembre) 56
Mon cher père,
Je t'écrit (sic) d'Amiens; on persiste à faire le mariage à Paris, et voilà le programme des fêtes, sauf erreur.
•1° On désirerait que vous vinssiez à Amiens avant d'aller à Provins - C'est-à-dire qu'arrivant lundi soir à Paris, vous pourriez y rester mardi, mercredi, jeudi (Noël) et vendredi y faire vos achats (difficilement lisible) - partir samedi qui est un jour gras dans nos parages, arriver à 5 heures du soir, et être reçu (sic) à bras ouvert (sic) - ceci me permettrait, au cas où j'aurais un appartement, d'opérer le déménagement d'Honorine sur Paris après votre départ - (une partie de ses meubles est nécessaire pour vous recevoir à Amiens) - Dans ce nouveau projet, je reviendrai donc Dimanche soir à Paris pour vous recevoir lundi - nous nous occuperions ensemble de divers appartements que j'ai en vue. - Venant samedi soir, vous passeriez quelques jours à Amiens; puis vous retourneriez à Paris, et moi je resterais quelques jours pour faire le déménagement.
•2° Puis vous retourneriez à Paris où vous ne feriez que passer pour aller à Provins -
Là, vous demeureriez le temps voulu, puis reviendriez à Paris.
•3° Et alors toute la famille Devianne viendrait nous rejoindre à Paris - je suppose que ce serait vers le 10 janvier - puis Mr. Devianne, Mme Honorine, papa et moi, nous irions passer un jour à (illisible), chez A. Lelarge où se signerait le contrat par l'entremise d'un notaire de Château Thierry ce qui nous évitera 500 francs d'honoraires - nous reviendrons dans le même jour à Paris.
•4° Enfin le mariage se célèbrerait vers le 12 à la mairie et le jour suivant à l'église -

Que penses-tu de ça, mon cher père. Madame Devianne désire vous voir le plus tôt possible, et je ne serai pas fâché que la connaissance soit faite avant que vous alliez à Provins.
Le conseil de famille va se réunir ces jours-ci.

J'ai vu ma tante Charuel, Mme Gabrielle et Mme Arnou; j'ai été parfaitement reçu; j'ai dit que le mariage se faisait à Amiens.

Nous nous occupons d'un hôtel pour vous; et il est probable que celui de Mme Devianne, rue Richelieu, 46, fera parfaitement votre affaire. Mais j'ai toujours peur que deux chambres avec un lit pour chaque vous coûteront 4 francs par jour, et le service en plus. Du reste j'arrangerai tout cela à Paris.
Il est inutile de dire que je reviendrai avec vous à Amiens
Il fait très froid, il faut absolument vous bien couvrir et prendre les premières de Nantes à Paris.
J'attends une réponse, mon cher père, courrier par courrier; ce qui fait que je pourrai la recevoir vendredi. Ne remettez pas votre voyage, et partez sûrement lundi à 11 heures ½.
Je vous embrasse, et ma chère femme vous met deux lignes.
Ton fils bien affectueux
Jules Verne
Monsieur,
Je regrette que Monsieur Jules ait laissé aussi peu de place. C'est peu aimable de sa part; connaissant comme lui tout le plaisir qu'il m'aurait fait. Recevez je vous prie l'assurance de mes sentiments respectueux et faites les aggréer (sic) à Madame Verne. Rappelez-moi je vous prie au souvenir de vos trois charmantes demoiselles.
Votre toute dévouée fille future.
H. Deviane-
Jules Verne ajoute en marge de la première page, ponctué de neuf points d'exclamation :
Je rouvre ma lettre pour vous dire que ma belle-mère me donne une montre magnifique, et ma fiancée une chaîne de toute beauté
-!!!!!!!!!

▬Lettre 4 :
Derniers details

L.A.S. (3 pp. de format 13,1 x 20,5 cm), portant la seule date de « Vendredi » [fin décembre 1856 ou début janvier 1857], de Jules Verne adressée à son père à propos de son mariage imminent avec Honorine, aux cadeaux et à certains projets boursiers. Cette lettre peut être considérée comme inédite bien qu'elle fut partiellement citée par Marguerite Allotte de la Fuÿe.

Mon cher père
Je suis arrivé hier à cinq heures à Paris, et j'ai trouvé ta seconde lettre qui confirmait celle que j'avais reçue à Amiens; tu dois avoir ma réponse entre les mains; je n'imagine pas qu'il fasse beaucoup plus froid en janvier qu'en décembre.
Les cadeaux seront fort limités; Honorine a déjà quelques diamants assez beaux que l'on fera monter autrement; elle n'a pas besoin de robe de mariage; elle en a en pièces, c'est-à-dire qui n'ont jamais été faites; quant au (illisible) rien n'est décidé; il est même probable qu'on s'en passera, puisqu'elle en a un long français; je me bornerai donc probablement à un bracelet, sur lequel je ferai monter ses diamants! Tu vois, mon cher père, que nous ne faisons pas de folies. La chaine de montre que j'ai est bien jolie; elle a crochet et broche, avec des entredeux en jaspe sanguin.
J'ai été admirablement reçu dans la famille Devianne et chez l'oncle qui a pour Honorine une affection toute particulière; un rhume gagné en chemin de fer m'a donné la fièvre pendant un jour; j'ai été soigné comme un enfant impérial.
Honorine vient d'écrire à ces demoiselles (ses soeurs); j'espère qu'elles vont s'exécuter de bonne grâce; qu'elles seront élégantes et spirituelles; elles n'auront qu'à être naturelles, et tout sera pour le mieux.
Je cours après un appartement. Dieu me vienne en aide.
L'établissement de l'associé de Ferdinand à Paris me sera superbement avantageux; je travaillerai avec lui; j'apprendrai avec lui; et néanmoins je serai son remisier, ayant des remises pour les affaires que je ferais à son compte.
Je touche au bonheur; pourvu que rien ne vienne l'anéantir.
En tout cas, je vous embrasse bien.
Ton très respectueux
Jules Verne

Jules Verne ajoute une remarque témoignant d'une préoccupation plus terre-à-terre :
Maman a laissé partir le panier d'Hignart sans mes chemises et mes caleçons! J'en ai pourtant bien besoin!

Letters regarding Jules Verne's marriage
Set of three autograph letters signed by Jules Verne and a letter from Monsieur Déviane, father of Honorine - the writer's future wife - addressed to Pierre Verne, Jules' father. These precious testimonies, of a very intimate nature, concern an important turning point in the author's life, the parents' double consent and his wedding preparations with Honorine Deviane, of which the initiative seems to have belonged to him completely.
Precious set of four signed autograph letters.
▬Letter 1 :
An account by JV to his father (October 1856)
ALS (4 pp., 10 x 15.8 cm), only dated “Samedi” (Saturday) [October 1856], from Jules Verne to his father following his reception by the Deviane family in Amiens. An important and unpublished letter, even though it was widely quoted by Marguerite Allotte de la Fuÿe. (No. 224)
▬Letter 2 :
The assent of the future father-in-law (1 November 1856)
ALS. (2 pp., 13.3 x 21 cm), dated 1 November 1856, from M. Deviane addressed to Pierre Verne, in which he gives his consent for the marriage between his daughter Honorine and Jules Verne. This is the only known letter written by M. Deviane. It follows on from the previous one, prompting Pierre Verne to make an official request. This important document was reproduced for the first time in the publication Dix lettres inédites de Jules Verne (letter n°. 9), in Nantes and displayed at the Jules Verne exhibition in Yverdon in May 1982. (No. 222)
▬Letter 3 :
The wedding preparations
ALS. (4 pp., 13.3 x 21 cm), dated December 17, 1856.
This important document was published for the first time in the Dix lettres inédites de Jules Verne (letter n°. 10), in Nantes.
Jules Verne's letter to his father seems hastily written, is dense and somewhat offensive towards his father.
▬Letter 4 :
Last details
ALS. (3 pp., 13.1 x 20.5 cm), only dated “Vendredi” (Friday) [Circa end of December 1856 or early January 1857] from Jules Verne to his father regarding his imminent marriage to Honorine, their presents and his stock marketing projects. This letter can be considered unpublished, although it was quoted in part by Marguerite Allotte de la Fuÿe.
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