ADER - Enluminures, livres anciens et modernes

Mercredi 26 novembre 2025 ENLUMINURES, LIVRES ANCIENS ET MODERNES

EXPERTS Ariane ADELINE Lots 1 à 27 Éric BUSSER Lots 28 à 217

MERCREDI 26 NOVEMBRE 2025 – 14H SALLE DES VENTES FAVART 3, rue Favart 75002 Paris EXPOSITION PUBLIQUE Mardi 25 novembre: 11h - 18h Mercredi 26 novembre: 10h - 12h RESPONSABLE DE LA VENTE elodie.delaballe@ader-paris.fr ENLUMINURES, LIVRES ANCIENS ET MODERNES DONT COLLECTION JEAN LOUP PHILIPPE CATALOGUE VISIBLE SUR www.ader-paris.fr ENCHÉRISSEZ EN DIRECT SUR www.drouotlive.com

Lot 22 (détail)

David NORDMANN Xavier DOMINIQUE Commissaires-priseurs Responsables de la vente Experts Élodie DELABALLE Responsable du département elodie.delaballe@ader-paris.fr Tél. : 01 78 91 10 16 Sophie d'EPENOUX Rapports de condition Ordres d'achat sophie.depenoux@ader-paris.fr Tél. : 01 78 91 10 12 Éric BUSSER - Librairie BUSSER Membre de la Compagnie Nationale des Experts en Art contactbusser@orange.fr Tél.: 06 08 76 96 80 Ariane ADELINE Membre du SFEP livresanciensadeline@yahoo.fr Tél. : 06 42 10 90 17

Lot 23

5 Enluminures et manuscrits 1 [CHARTE]. [GASTRONOMIE]. [PHILIPPE LE BEAU] État de maison pour le mardi 24 mars 1505 [nouveau style 1506]. En français, acte sur parchemin. Angleterre, Truro (Cornouaille), 24 mars 1505 [nouveau style 1506]. Encre brune sur parchemin (encre pâle par endroits), document plié, quelques trous au parchemin. Dimensions : 715 x 195 mm 2 000 / 2 200 € Rare témoin d’un état de maison avec les comptes du jour, présentant un intérêt pour le fonctionnement de la cour de Philippe le Beau, l’année de sa mort, et pendant son séjour forcé en Angleterre et Cornouaille auprès du roi d’Angleterre Henry VII. Incipit : « Mardi xxiiiie jour de mars l’an mil cinq cens et cinq avant Pasques, le roy Don Philippe de Castille, de Leon et de Grenade, prince d’Aragon et des Deux Cecilles, archiduc d’Autrice, duc de Bourgongne, de Brabant…Disner, abondman (?), soupper et giste a Truro et pour tout deffroyer par les officiers du roy d’Angleterre…des chambellans et maistres d’ostel a Peryne en Cornouaille. Escu xxi a la valeur de xliv (?) en monnoie (?) de flandres ». Roi de Castille et de Leon, duc de Bourgogne et de Brabant, Philippe le Beau (1478-1506) est le fils de Maximilien d’Autriche et de Marie de Bourgogne. De son mariage avec Jeanne la Folle naquit CharlesQuint. Ce document fut émis lors du séjour forcé de Philippe le Beau en Cornouaille à la suite de la tempête qui projeta la flotte de Philippe le Beau sur les côtes anglaises le 10 janvier 1505 [nouveau style 1506]. Dans une lettre datée de Windsor le 1er février 1506, Philippe le Beau relate les dégâts provoqués par cette tempête sur sa flotte, dont son vaisseau avait été séparé : « Toutes nos navires sont sauvés, réservé deux, l'une estoit chargée de bled ; et néantmoins toutes les gens qui estoient èsdites deux navires sont aussy sauvés. Nous n’avons perdu de noz gens que deux chantres de nostre chapelle et aucuns menus officiers de nostre compaignie, en bien petit nombre, lesquelz, en widant des grandes navires pour aller à terre, et par eulx trop haster, se sont noyez ; et n’avons, grâce a Dieu, eu aultre perte de gens ne de biens ». Philippe le Beau et sa cour sont donc contraints de séjourner en Cornouaille, notamment à Truro et Penryn (Wales). Le roi de Castille et duc de Bourgogne va mourir peu de temps après en septembre 1506 : il avait passé près de trois mois (janvier-mars 1506) en Cornouaille et en Angleterre, « hôte » du roi Henri VII. Ce document présente les comptes et noms des membres de la cour de Bourgogne en déplacement en Cornouaille et les sommes engagées pour les repas organisés pendant ce temps de séjour contraint. Parmi les services on note les sommes engagées pour la Grant Chapelle, Chambellans, Maistres d’ostel, Escuiers pannetiers, Escuiers transchans, Menuz offices panneterie, Eschançonnerie, Cuisiier Saulcerie, Fruicterie, Paiges, Fourriers, Trompectes, Capitaines archiers et alia. Enluminures et manuscrits

6 Enluminures et manuscrits 2 [CHARTE]. [GASTRONOMIE]. [BOURGOGNE]. [CHARLES QUINT] État de maison, dépenses pour le vendredi 11 septembre 1523. En français, acte sur parchemin. Bon état général, document plié, quelques déchirures au parchemin en fin de document. France (à l’époque États bourguignons), Bourg-en-Bresse (« Bourgues »), 11 septembre 1523. Dimensions : 430 x 112 mm 1 500 / 2 000 € Rare témoin d’un état de maison avec les comptes du jour, présentant un intérêt pour le fonctionnement de la cour de Charles Quint et notre connaissance sur les dépenses et produits de bouche et cuisine. Incipit : « Vendredi xie jour de septembre l’an quinze cens xxiii l’emereur tout le jour en sa ville de Bourghes […] livres de quarante et xv monnoye de flandres ». Il est question de la ville de « Pont-deVaux » en fin de document, également en Bresse. Il est fait mention d’Antoine de la Barre, Guillaume de Rolle, Jehanot Metteneye maistres d’ostel. Voir : J.-M. Cauchies, Finances et financiers des princes et des villes à l’époque bourguignonne, Turnhout, 2004. Suivent les catégories de dépenses liées à la cour de Bourgogne, avec les sommes dues et les noms des pourvoyeurs: Panneterie / Eschançonnerie / Cuisine / Fruicterie / Escuierie / Fourriere / Gaiges. Sous l’intitulé « Cuisine » on trouve par exemple : « Pour iiii paster de truytes / Pour iiiu libres de petiz poissons… » En 1520, Charles Quint (1500-1558) est élu empereur. Il est héritier de quatre dynasties : petit-fils de la duchesse Marie de Bourgogne, de Maximilien d’Autriche, d’Isabelle la Catholique, reine de Castille, et de Ferdinand le Catholique, roi d’Aragon et de Naples, il est duc de Bourgogne sous le nom de Charles II, roi des Espagnes sous le nom de Charles Ier (en espagnol Carlos I), mais est surtout passé à la postérité comme l’empereur romain germanique Charles V. Ce dernier sera un perpétuel errant et avec lui toute sa cour se déplace.

7 Enluminures et manuscrits 3 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un Psautier, dit « Rosenbaum Psalter ». En latin, manuscrit décoré sur parchemin. [Angleterre, vers 1275 ou Flandres ou Rhénanie-Meuse, vers 1275]. Dimensions : 178 x 132 mm 1 200 / 1 500 € Feuillet provenant d’un Psautier liturgique ou Heures-Psautier, 20 lignes par page, écriture gothique à l’encre brun foncé, bouts-de-ligne avec bestiaire et drôleries variés, quelques motifs ornementaux aussi en bouts-de ligne, drôleries tracées à l’encre rouge et bleue, initiales en bleu ou à l’or bruni, avec décor filigrané rouge ou bleu, foliotation au crayon « 116 » dans le coin droit supérieur. Très bon état général, rogné un peu court dans la marge supérieure. Texte : recto, Psaume 72 :5-15 ; verso, Psaume 72 :15-24. Le Psautier liturgique dit « Rosenbaum Psalter » fut démembré en France dans les années 1960 (avant 1966). Nous savons que ce manuscrit contenait à l’origine aussi des Heures et un Office des morts : il s’agirait donc d’un ouvrage composite dit Heures-Psautier. Il est nommé d’après les feuillets de ce manuscrit conservés un temps dans la collection de Esther Rosenbaum (Chicago) et vendus chez Sotheby’s, Londres, 25 avril 1983, lot 69. À la suite des travaux de Peter Kidd, nous sommes bien renseignés sur ce manuscrit qui fut fort luxueux, très certainement réalisé pour une moniale bénédictine ou une abbesse : certains feuillets connexes font allusion à une communauté monastique et une abbesse (voir Kidd, 2019, p. 109). L’origine de ce feuillet a suscité beaucoup de débats : Angleterre, Rhénanie, Flandres et même France de l’est. Une origine anglaise est suggérée par le type de décor des bouts-de-ligne et l’enluminure (voir Fliegel 1999, no. 12-23, Collection Jeanne Miles Blackburn, Cleveland Museum of Art). Les drôleries en bouts-de-ligne peuvent être rapprochées des Heures dites Salvin (Londres, BL, Add. MS 21926 et Add. MS 48985) ou encore le Windmill Psalter (NY, Pierpont Morgan Museum, MS M.102). Pour sa part, Peter Kidd penche plutôt pour une origine Flandres ou Rhénanie (Kidd 2019, n° 20, pp. 106-109), en particulier un groupe de psautiers liés à Lambert le Bègue à Liège (voir par exemple Université de Liège, MS 431). Un grand nombre de feuillets connexes ont été identifiés et sont passés par de grandes collections et ventes publiques et l’on trouve une première liste (partielle) dans la notice parue chez Sotheby’s, Londres, 7 juillet 2015, lot 13 et dans la liste établie par Peter Kidd (voir : Peter Kidd, « A Lavishly Illuminated 13th-Century Psalter-Hours Made for a Nun (I and II) », Blog : Manuscripts Provenance, 2019 ; voir aussi Peter Kidd, The McCarthy Collection, Vol. II, Spanish, English, Flemish and Central European Miniatures, London, 2019, pp. 106-109.

8 Enluminures et manuscrits 4 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un manuscrit (Heures ou Heures-Psautier ?). En latin, manuscrit enluminé sur parchemin. France du nord ? seconde moitié ou dernier quart du XIIIe siècle. Dimensions : 142 x 97 mm 700 / 900 € Feuillet provenant d’un Psautier liturgique ou Heures-Psautier, 20 lignes par page, écriture gothique à l’encre brune foncée, boutsde-ligne avec motifs ornementaux à l’encre rouge et bleue ou à l’or bruni (parfois des motifs de fleur-de-lis), petites initiales peintes en bleu ou à l’or bruni avec décor filigrané à l’encre rouge ou bleue, trois plus grandes initiales à l’or bruni sur fonds rose et bleu avec rehauts blancs (2 lignes de hauteur, marquant les grandes divisions du texte). Fort bel état général. Texte : recto, Psaume 118:31-32; Psaume 118: 33 « Legem pone michi… » ; verso, Psaume 118 :41-48, « Et veniat super me… » ; suivi de Psaume 118:49-50, « Memor esto verbum… ». Ce feuillet provient d’un psautier ou heures-psautier du XIIIe siècle, qui devait certainement être d’un luxe certain vu la finesse de l’écriture et la qualité du décor. Stylistiquement, il se rattache aux Psautiers généralement attribués à des ateliers du nord de la France. Nous pensons par exemple à des psautiers tels celui associé à l’évêché de Thérouanne (Psalter-Hours of Brother Guimier, Baltimore, Walters Art Museum, MS W. 47, dernier quart du XIIIe siècle) ou plusieurs autres psautiers associés au nord de la France ou aux Flandres. Un psautier vendu récemment présente une mise en page et des bouts-de-ligne semblables (Paris, Drouot, Kapandji-Morhange, 13 février 2019, lot 83 : Flandres ou nord de la France, vers 1250-1280). 5 [ENLUMINURE] [LITURGIE]. [MUSIQUE] Feuillet manuscrit extrait d’un graduel (?) (défait de reliure). En latin, musique notée carrée, portées à 4 lignes tracées à l’encre rouge. Rubriques en rouge (encre pâle) [on distingue « co[mmunio] » et « of[fertorium] »], initiales peintes en vert et en rouge ; bi-feuillet en partie tronqué. France, fin du XIIIe ou début du XIVe siècle. Dimensions : 285 x 250 mm 150 / 200 €

9 Enluminures et manuscrits 6 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un manuscrit (Heures ou Heures-Psautier ?). En latin, manuscrit enluminé sur parchemin. Belgique, Flandres, Gand ? vers 1310-1325. Dimensions : 102 x 68 mm 700 / 900 € Feuillet, parchemin, écriture gothique, encre brune, 10 lignes de texte, initiale ornée peinte en bleu avec feuilles de couleur, grande barre ascendante et descendante en rose et bleu avec prolongations dans les marges supérieures et inférieures, feuilles de vignes de couleur et à l’or bruni, grotesque à la tête orange (recto), personnage barbu tenant une tête et une canne (sorte de Memento mori, on ne peut s’empêcher de comparer avec Hamlet et le crâne de Yorick !) avec prolongement dans la marge extérieure. Bon état, réparation au parchemin dans le coin inférieur droit. Quelques frottements par endroits. Texte : Recto : […] benedicere. Alma virgo… Oratio. Sancta Maria virgo virginum mater et filia regis…/ Verso : (suite du verso) electis dei regnare…Responsorium. Sancta et immaculata virginitas… Il nous parait possible de rattacher ce feuillet à un manuscrit (incomplet) conservé à Baltimore, Walters Art Museum, MS W. 87, qui présente quasi les mêmes dimensions (102 x 67 mm), une mise en page identique et un décor très semblable (reliure par Gruel et Engelmann). Si ce feuillet ne provient pas du codex lacunaire et relié dans le désordre de la Walters Art Museum, c'est, en tout cas, étonnement proche dans le traitement du décor, avec des grotesques et des créatures hybrides : « The manuscript is richly illuminated with drolleries ; painted on the borders of each folio, they would have amused the reader with their playful animals, hybrids, and human figures ». Voir : Randall, Lilian M. C. Medieval and Renaissance Manuscripts in the Walters Art Gallery. Vol. 3, Belgium, 1250-1530. Baltimore et Londres, 1997, pp. 72-74, cat. no. 224 ; Digital Facsimile of Walters, MS W.87 : The Digital Walters - W.87, Incomplete Book of Hours

10 Enluminures et manuscrits 7 [ENLUMINURE] [DROIT CANON]. [DÉCRÉTALES]. [GRÉGOIRE IX] Feuillet extrait des Décrétales de Grégoire IX, Liber I. En latin, manuscrit enluminé sur parchemin. Avec trois dessins tracés à la plume dans les marges. Sud de la France, Avignon ?, Toulouse ou Montpellier ?, vers 1325-1350. Dimensions : 243 x 156 mm 1 500 / 1 800 € Feuillet extrait d’un manuscrit glosé, texte central sur deux colonnes, éléments de glose disposés autour du texte central, écriture gothique ronde de type « littera bononiensis », rubriques en rouge, nombreuses annotations contemporaines ou proches contemporaines dans les marges, petites initiales peintes de couleur rouge ou bleu, initiales peintes de couleur rouge ou bleu avec décor filigrané violet ou rouge (3 lignes de hauteur), grande initiale M ornée en bleu avec rehauts blancs, sur fond rouge avec décor floral orange et bleu et or liquide, grande initiale D historiée, avec tête de personnage masculin coiffé d’un couvre-chef, initiale tracée à l’encre rose avec rehauts blancs, sur fond bleu, prolongement de l’initiale dans la marge en bleu, rouge foncé et or liquide. Feuillet tronqué, rogné sur les côtés, affectant le texte de la glose. Texte : recto, Liber Sextus Decretalium, Liber I, titulus XVIII, De servis non ordinandis et eorum manumissione [manque le début ; sont présents capitulum 1-5 et début du capitulum 6] ; verso, Liber Sextus Decretalium, Liber I, titulus XVIII, De servis non ordinandis et eorum manumissione [suite et fin, capitulum 6-8] ; titulus XIX, De obligatis ad ratiocinia ordinandis, vel non (notons que la rubrique du présent feuillet indique « obligandis » et non « ordinandis ») ; titulus XX, De corpore vitiatis ordinandis vel non (la rubrique du présent feuillet indique uniquement « De corpore viciato », capitulum 1 et 2. – Texte glosé : Bernardo da Parma, Glossa ordinaria. Ce feuillet est extrait du Liber Sextus Decretalium compilé sous Grégoire IX, dit « Décrétales de Grégoire IX ». Bien qu’il ne s’agisse pas du même manuscrit, le présent manuscrit est à rapprocher de feuillets tel celui de Cambridge, Fitzwilliam Museum, Marlay Cutting Fr. 2, Decretales, liber III, « probably Southern France (Languedoc ?), c. 1330-1340). Voir S. L’Engle, Illuminating the Law, London and Turnhout, 2001, n° 14, pp. 204-206. Les dessins à l’encre tracés dans les marges ne semblent pas renvoyer au texte des Décrétales. On note un roi couronné tenant un sceptre et un homme pendu (suicidé). Un troisième dessin sur la droite est plus pâle et difficile à identifier. Dans un autre manuscrit des Décrétales, connu sous le nom de « Smithfield Decretals » (Londres, BL, Royal 10 E IV : Sud de la France, 14e siècle), on trouve dans la marge inférieure un personnage pendu. Toutefois, nous n’avons pas pu effectuer de lien avec les textes sur ce feuillet, à moins que ce soit lié à la glose (tronquée dans ce feuillet).

11 Enluminures et manuscrits 8 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un bréviaire noté (ou diurnal ?). En latin, manuscrit orné sur parchemin, musique notée carrée. Sud de la France ?, vers 1400. Dimensions : 182 x 122 mm 600 / 800 € Feuillet extrait d’un bréviaire, écriture gothique à l’encre brune, texte sur deux colonnes, rubriques en rouge, musique notation carrée sur des portées de 4 lignes tracées à l’encre rouge, initiales peintes en rouge ou bleu avec décor filigrané bleu et/ou rouge. Ce feuillet est peut-être extrait du Commun des saints, comme le suggère la rubrique « ad horas de uno martire ». Texte : recto : 2e et 3e lecture ; verso, rubriques, In laudibus antiphona, Alleluia, alleluia ; capitulum, Beatus vir ; Hymnus, Marti dei ; Ad benedictus antiphona, Lux perpetua ; Ad magnificat antiphona, Filie Iherusalem ; Collecta, Deus qui beatum martirum… 9 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un livre d’heures. En latin, manuscrit enluminé sur parchemin. France, Paris (ou Vallée de la Loire, Tours ?), vers 1475-1485. Dimensions : 116 x 83 mm 600 / 800 € Feuillet extrait d’un livre d’heures, deux initiales ornées, l’une peinte en gris pâle avec rehauts blancs sur fond or liquide et rouge-marron, l’autre mauve pâle sur fond or liquide et rouge-marron avec une mouche peinte, bordure enluminée dans la marge extérieure, avec feuilles d’acanthe bleu et or, besants d’or, motifs floraux colorés. Texte : recto : prière à la Vierge, « Mater dei precor te… », suivi de prière à la Vierge, « Deprecor te sancta maria… » ; verso : suite de la prière à la Vierge, « […] pietate plenissima… ». Ce feuillet rappelle les pages de texte de certains manuscrits de la mouvance fouquettienne par son décor et ses initiales. Mais c’est plus par la qualité de la calligraphie du manuscrit que l’on peut, peut-être, aussi le rattacher à un ensemble de manuscrits copiés par un copiste-scribe parisien identifié du nom de Jean Dubreuil, documenté à Paris à partir de 1450. Ce copiste, identifié par Nicole Reynaud grâce au colophon dans les Heures de Jacques de Langeac (Lyon, BM, MS 5154), fut étudié par T. Kren qui a regroupé autour de la personnalité de Jean Dubreuil sept autres livres d’heures de sa main (voir Avril et Reynaud, 1993, n°14 ; Kren, 2002 ; Avril, 2003, n° 39). Les recherches ont depuis fait connaître d’autres manuscrits copiés par Jean Dubreuil, par exemple N. Herman identifie un autre manuscrit conservé à Stuttgart, Württembergische Landesbibliothek, ms. HB I 174. La calligraphie du présent feuillet rappelle la « bâtarde » fine et régulière de Jean Dubreuil qui travailla à Paris mais en collaboration avec des enlumineurs tantôt parisiens (dont François Barbier père, « Maître François »), tantôt tourangeaux (voir Avril et Reynaud, 1993, n° 75 ; Tours 1500, no. 60 et 61). Nous la rapprochons par exemple des pages comportant du texte copié en « petit module » ou « écriture au module minuscule » des « Heures Le Bigot », attribués à Jean Dubreuil scribe, dans les feuillets dédiés aux fragments évangéliques peints par un artiste dans la mouvance de Jean Bourdichon (anciennement Galerie Les Enluminures ; voir Tours 1500, n° 61). Voir : Kren, T. « Seven Illuminated Books of Hours Written by the Parisian Scribe Jean Dubreuil, c. 1475-1485 », in Reading Texts and Images: Essays on Medieval and Renaissance Art and Patronage in Honour of Margaret M. Manion, ed. Bernard J. Muir, Exeter, 2002, pp. 157– 200 ; Avril, F. et N. Reynaud, Les manuscrits à peintures en France, Paris, 1993 ; Avril, F., Jean Fouquet. Peintre et enlumineur du XVe siècle, Paris, 2003 ; Chancel-Bardelot, B. et al. (dir.), Tours 1 500 : Capitale des arts, Tours et Paris, 2012.

12 Enluminures et manuscrits 10 [ENLUMINURE]. Trois feuillets extraits de livres d’heures. France, XIVe et XVe siècle. 600 / 800 € 1. Feuillet extrait d’un livre d’heures, oraison, « Omnes sancti tu… » (recto) et prime (des Heures de la Vierge ?) (verso). France, Paris ?, vers 1380-1400 ? En latin. Ecriture gothique à l’encre brune, rubriques en rouge et en français, petites initiales à l’or bruni sur fonds bleu et/ou rose, bouts-de-ligne de même, au verso initiale (2 lignes de hauteur) peinte en rose avec rehauts blancs et décor de vigne de couleur, au recto grande initiale D (5 lignes de hauteur) bleue avec rehauts blancs, décor de feuilles de vignes colorées, sur fonds rose. Dimensions : 150 x 105 mm Manque de parchemin dans le coin inférieur droit. 2. Feuillet extrait d’un livre d’heures, au recto, fin de laudes (?) des Heures du Saint-Esprit et au verso, début de prime des Heures du Saint-Esprit (?), hymnus, « Veni creator spiritus ». France du nord ou Belgique, vers 1450. En latin, écriture gothique à l’encre brun foncé, rubriques en rouge, petites initiales peintes en rouge ou bleu, initiales de deux lignes de hauteur en bleu ou or avec décor filigrané rouge ou bleu foncé, grande initiale « puzzle » en bleu et or avec décor filigrané rouge et bleu. Dimensions : 146 x 104 mm. Bon état général. 3. Feuillet extrait d’un livre d’heures, de petit format, prières après les litanies des saints. France, vers 1450-1475. En latin, écriture bâtarde à l’encre brune, initiales à l’or bruni sur fonds rose et bleu, bouts-de-ligne de même. Dimensions : 92 x 66 mm 11 [ENLUMINURE]. Deux initiales ornées et enluminées (extraites d’un livre de chœur ?). Italie, Florence ?, vers 1450-1475. Dimensions à vue : Initiale D : 75 x 75 mm ; Initiale S : 75 x 75 mm Encadrements séparés. 200 / 300 € Initiales peintes en rose ou bleu avec rehauts blancs, sur fonds à l’or bruni (craquelures de l’or par endroits) et bleu ou rose, décor de feuilles d’acanthes de couleur bleu, rouge et vert avec motifs floraux. Elles trahissent l’influence d’artistes florentins, tels Zanobbi Strozzi ou Filippo di Matteo Torelli chez qui on trouve ce type d’ornements dans le tracé des initiales.

13 Enluminures et manuscrits 12 [ENLUMINURE]. Saint Jean-Baptiste Enluminure extraite d’un livre d’heures, illustrant les Suffrages (suffrage à saint Jean-Baptiste). France, Paris (Groupe du Maître de Bedford) (Maître de Dunois, Jean Haincelin ?), vers 1440-1450. Enluminure qui présente un trou dans la surface picturale camouflé par une fine bande de papier doré. Quelques pliures ou petits manques de surface picturale. Sinon, bon état général. Dimensions : 100 x 65 mm 4 000 / 6000 € Cintrée dans sa partie haute, cette enluminure présente saint JeanBaptiste figuré en pied dans un paysage rocailleux et escarpé, quelques arbres aux feuillages plus clairs et herbe au sol. On remarque la présence en arrière-plan de deux « bêtes sauvages » faisant écho à la condition de frugal ascète dans un milieu de désert sauvage : un ours et un lion jaillissent derrière la formation rocheuse sur la droite. Le saint homme tient un livre sur lequel se tient l’agneau de Dieu. Nous ne savons pas de quel livre d’heures est extrait cette enluminure. L’enlumineur appartient certainement au Groupe de Bedford, ces artistes sous l’influence ou ayant travaillé au sein de l’atelier florissant du Maître de Bedford (Haincelin de Haguenau), actif à Paris dans la première moitié du XVe siècle (c. 1405-1435), ainsi nommé pour les commandes importantes réalisées pour Jean de Bedford, duc de Lancastre. Une de ces personnalités est le Maître de Dunois, réputé actif de circa 1435 à 1466 qui doit son nom aux Heures de Jean de Dunois (Londres, BL, Yates Thomson 3), fils illégitime de Louis Ier d’Orléans (appellation donnée par N. Reynaud). Parfois nommé « Principal associé du Maître de Bedford », il a été proposé de voir dans le Maître de Dunois un peintre du nom de Jean Haincelin (documenté de 1438 à 1449) ayant travaillé pour de nombreux commanditaires proches de Charles VII dont Prigent de Coëtivy, Guillaume Jouvenel des Ursins et d’autres. La présence de l’ours dans notre enluminure n’est peut-être pas un hasard (emblème parlant de la famille de Jouvenel des Ursins, omniprésent dans les Heures du chancelier Guillaume Jouvenel des Ursins (Paris, BnF, NAL 3226). On note l’allongement des membres de Jean-Baptiste, le traitement des chairs sous forme de demi-grisaille qui rappellent la manière du Maître de Dunois, tout comme les paysages et formations rocheuses et la végétation caractéristique. Dans les Heures de Jean de Dunois (Londres, BL, Yates Thomson 3), on notera la proximité stylistique avec une enluminure figurant la sainte ermite Marie l’Egyptienne et Zozime (fol. 287) attribuée au Maître de Dunois. Voir : Deldicque, M., M. Hermant, S. Lagabrielle et S. Lepape (dir.), Les arts en France sous Charles VII (1422-1461), Paris, 2024, cat. 45, 50, 54, 57 ; Reynolds, C. « The Workshop of the Master of the Duke of Bedford : Definitions and Identities », ed. by G. Croenen and P. Ainsworth, Patrons, Authors and Workshops : Books and Book Production in Paris around 1400, Louvain, 2006, pp. 437-472 ; Villela-Petit, Inès. Le bréviaire de Châteauroux, Paris et Châteauroux, 2003, pp. 47-48 ; « Les Heures de Dunois », in Art de l’Enluminure, juin-juillet-août 2008 ; Avril, F. et N. Reynaud, Les manuscrits à peintures en France 1440-1520, Paris, 1993, pp. 23, 36, 37. Plus récemment voir les notices relatives au Maître de Beford (Haincelin de Haguenau) et le Maître de Dunois (Jean Haincelin) dans le catalogue Très Riches Heures du duc de Berry (Chantilly, 2025), notamment p. 277. On signalera aussi la broderie figurant un portrait en pied (Lyon, Musée des Tissus, Inv. 24054) du "précurseur" Jean-Baptiste fortement influencé par l'art des Frères Limbourg (voir Exposition Très Riches Heures (2025), cat. 76) et dont le modèle est clairement repris dans notre enluminure, sous forme inversée.

14 Enluminures et manuscrits 13 [ENLUMINURE] Grande initiale R ornée et enluminée (extraite d’un livre de chœur ?). Italie, Toscane ou Emilie-Romagne, vers 1490-1500 Dimensions : 152 x 138 mm Initiale encadrée. 400 / 600 € Initiale peinte en bleu avec rehauts blancs, sur fonds à l’or bruni (craquelures de l’or par endroits) et rouge rehaussé de motifs de fins rinceaux et feuilles d’acanthe de couleur rose, bleu et vert et motifs floraux jaunes, certains décors se prolongeant dans la marge avec des besants d’or bruni. On pense à des comparaisons avec les grands livres de chœur peints en Italie, par exemple ceux conservés à la Bibliothèque Panizzi (Commune de Reggio Emilia) ou encore les initiales ornées de grands livres de chœur produits à Florence, par exemple ceux attribués à Giovanni Boccardi detto Boccardino il Vecchio (voir dans A. Labriola, I manoscritti miniati del Museo San Marco a Firenze, Florence, 2020, pp. 84-91). 14 [ENLUMINURE]. [HEURES]. Feuillet extrait d’un livre d’heures. En français et en latin, extrait d’un manuscrit enluminé sur parchemin. Nord de la France ou Paris, vers 1450-1475. Texte copié sur une colonne, écriture gothique, initiales à l’or bruni (1 et 2 lignes de hauteur) sur fonds rose et bleu avec rehauts de blanc. Dimensions : 120 x 80 mm 100 / 120 € Extrait des Quinze Joies de Notre Dame, prières en français, souvent incluses dans les livres d’heures. Joint : Feuillet extrait d’un livre d’heures, sur parchemin, encre brune et rubrique à l’encre rouge, avec fin d’une prière incluse dans le texte dit Sept requêtes à Jésus Christ [Domine Ihesu Christe qui septem…], suivi d’une longue rubrique en français annonçant un texte de Boniface VI sur les indulgences. On notera la forme « tierch » qui rappelle les dialectes du nord de la France. Dimensions : 212 x 152 mm

15 Enluminures et manuscrits 15 [ENLUMINURE]. Fragment extrait du Graduel dit de Louis XII et Anne de Bretagne. En latin, manuscrit enluminé sur parchemin. France, Paris (?), vers 1499-1500 Dimensions : 415 x 230 mm 5 000 / 7 000 € Ce fragment, avec l’introït Invocabit me et e(go) pour le premier dimanche de Carême, est extrait du Graduel de Louis XII de France et de sa seconde épouse, Anne de Bretagne, réalisé à Paris vers 1500. Ce manuscrit était sans doute destiné à servir dans la Sainte-Chapelle royale de Paris, comme le suggère la représentation de Louis et Anne agenouillés en prière devant sa relique la plus célèbre, la Couronne d’épines, dans une initiale historiée aujourd’hui conservée au Musée Dobrée à Nantes et provenant du même manuscrit. (voir Catalogue Galerie Les Enluminures, 1994, n° 28). Selon Le Roux de Lincy, le manuscrit a été démembré vers 1840, date à laquelle des fragments ont commencé à apparaître sur le marché de l’art en France. Parmi les autres initiales historiées du manuscrit, on trouve la Cène et la Pentecôte (vente Firmin-Didot, Paris, 10 juin 1884, lot 78 ; Sotheby’s, 1er juin 1905, lot 723, puis à nouveau le 7 décembre 1924, lot 900 ; la miniature de la Pentecôte fut attribuée par J. Günther à Jean Pichore dans la Brochure 9, 2006, n° 55), la Création d’Ève, Noli me Tangere, Sainte Marie-Madeleine et la Trinité (Sotheby’s, 8 juillet 1974, lots 26-29). Des découpes horizontales comprenant des lignes de texte et des portées musicales similaires à notre fragment, ont survécu, comme pour le deuxième dimanche de l’Avent (vente Delorme-Collin du Bocage, Hôtel Drouot, Paris, 15 décembre 2004, lot 8), le dimanche de la Quinquagésime (Sotheby’s, 29 novembre 1990, lot 39, et à nouveau le 2 juillet 2013, lot 7), le mercredi des Cendres (Galerie Les Enluminures, 2004, n° 24 ; Sotheby’s, 6 décembre 2005, lot 21), et le premier vendredi de Carême (mis en vente par la Librairie ancienne Bruno Sepulchre en 2010). Les feuillets complets comprennent celui de la fête de Sainte Marie-Madeleine avec une initiale historiée illustrant son Ascension (Sotheby’s, 5 juillet 2016, lot 45) et celui du troisième dimanche après Pâques (Wellesley College, Massachusetts, MS 6). Plusieurs bandes d’ornements de bordure et des découpes d’initiales ont également été identifiés comme celui de la Lilly Library, Bloomington (Indiana), Ricketts 107 (voir De Hamel, 2010, dont la notice offre une liste de fragments connus) ; ou encore celui de Philadelphie, Free Library, Lewis T 659 (voir Blog de Nicolas Herman, 2020). Les textes identifiés indiquent que cet impressionnant livre de chœur comprenait à la fois le Temporal et le Sanctoral. La plus grande page complète qui subsiste montre que le volume était de taille et mesurait 685 x 515 mm. Il a été enluminé par une équipe d’enlumineurs parisiens de renom, dont le Maître de Philippe de Gueldres (Louis et Anne devant la couronne d’épines), Jean Coene (Ascension de Marie-Madeleine) et Jean Pichore (Pentecôte). De nombreux extraits comprennent les armoiries royales de France, les initiales couronnées L et A (comme dans le present extrait), l’hermine de Bretagne, et le feuillet figurant l’Ascension de Marie-Madeleine (Sotheby’s, 5 juillet 2016, lot 45) comprend les armoiries d’Orléans, armoiries de Louis avant qu’il ne soit couronné roi le 7 avril 1498. Le feuillet conservé à Wellesley comporte les armoiries de France écartelées avec celles de Milan, ce qui suggère que le manuscrit a été enluminé pendant la période où Louis était à la fois roi de France et duc de Milan, du 6 septembre 1499 au 5 février 1500. Voir : Le Roux de Lincy, A. La Vie de la Reine Anne de Bretagne, 1860-61, II, p. 86. – De Hamel, C. Gilding the Lilly : A Hundred Medieval Illuminated Manuscripts in the Lilly Library, Bloomington, 2010, no. 83, pp. 182-183. – Blog Nicolas Herman, Bibliotheca Philadelphiensis : Louis + Anne Forever.

16 Enluminures et manuscrits 16 [ENLUMINURE]. Sainte Catherine et sainte debout tenant un livre ouvert (sainte Geneviève ?). Enluminure extraite d’un manuscrit liturgique (ou composition autonome, image pieuse ?). France, Paris, vers 1530-1540. Attribuable à un artiste parisien du « groupe Étienne Colaud » (Martial Vaillant ? actif à Paris de 1523 à 1560 ou un artiste parisien proche du peintre de Paris, BnF, NAF 25165 ?). Dimensions à vue : 230 x 150 mm 5 000 / 7 000 € Feuillet encadré. Traces de l’écriture du manuscrit ou du feuillet en face (décharge, lettrage blanc sur la cape de la sainte (Geneviève ?) et sur le sol, on distingue (à l’envers): « Mem… » ou « Comme… » (pour Memoria ? Commemoratio ?). Miniature inscrite dans un encadrement à l’or liquide, avec décor Renaissance d’arabesques et d’acanthes. Bon état général, quelques petites pertes de surface picturale, sans gravité. Ce grand feuillet présente deux saintes figurées de plein pied, l’une aisément identifiable par ses attributs, sainte Catherine avec son épée et la roue de son supplice, l’autre tenant simplement un livre (sainte Geneviève) et difficilement identifiable sans le texte associé. L'artiste est très certainement à chercher parmi le "Groupe Colaud". On conserve un livre d’heures enluminé pour le dauphin François de France, futur François II (armes aux ff. 14 et 76v) datés 1555 (Paris, BnF, NAL 104). Ce livre d’heures a été mis en relation avec une archive attestant du paiement d’une somme à Martial Vaillant (Gallant ?) « pour l’enlumynure d’une paire d’heures pour le service de mondit seigneur » (AN, KK 106, f. 2 ; voir Léon de Laborde, La Renaissance des arts à la cour de France. Études sur le seizième siècle, t. 1, Paris, 1850, pp. 305-306 ; Cousseau, 2016, p. 88). Il présente des traits stylistiques comparables avec la présente enluminure. Signalons que Cousseau insiste sur le caractère quelque peu archaïque des miniatures des Heures dites de François II, datables de 1555-1557 (Paris, BnF, NAL 104) qui reprend des motifs bellemariens des années 1538-1530. Enlumineur et « historieur », Martial Vaillant est documenté de 1523 à 1562. Il serait le gendre d’Étienne Colaud, ayant épousé une des quatre filles d’Étienne Colaud (Cousseau, 2016, p. 286). Il était membre de la Confrérie de Saint-Jean l’Évangéliste, fondée en l’autel de l’église de Saint-André-des-Arts à Paris, qui régissait les métiers du livre et de l’enluminure. Ceci expliquerait une certaine proximité stylistique avec les œuvres du « groupe Étienne Colaud », avec un ensemble d’artistes travaillant dans une esthétique commune de celle d’Étienne Colaud, artiste parisien actif de 1512 à 1541). Autre artiste dont on perçoit l’influence dans les présentes miniatures (lots 16 et 17), celui qui peint un manuscrit Plutarque, Vie d’Hannibal, traduction de Simon Bourgoing, exemplaire réalisé pour Gui de Baudreuil, abbé de Saint-Martin-aux-Bois de circa 1491-1492 à 1530 (Paris, BnF, NAF 25165 ; voir Cousseau, 2016, pp. 162-163 qui compare l’artiste parisien à celui qui peint des Heures pour le couple Aleaume-Tenon, Arsenal, MS 1175). On notera que l’on attribue les enluminures de ce manuscrit à un artiste du « cercle de Colaud » et Gui de Baudreuil était aussi le commanditaire d’un Missel démembré dit « Missel de Gui de Baudreuil » également peint dans l’orbite d’Étienne Colaud. Gui de Baudreuil est aussi le commanditaire de la traduction française de L’Éducation d’un prince chrétien d’Erasme destinée par l’intermédiaire de Guillaume de Montmorency au dauphin de France, François, fils de Louise de Savoie (Paris, Coutau-Begarie, 14 octobre 2022, lot 38, préempté par Chantilly, Musée Condé) et dont l’enluminure trahit aussi un milieu proche des deux présentes enluminures (lots 16 et 17). Voir : Cousseau, M.-B. Étienne Colaud et l’enluminure parisienne sous le règne de François Ier, Tours et Rennes, 2016, pp. 8788 : « Les autres actes concernant Martial Vaillant montrent qu’il tenait, lui aussi, une place importante sur la scène artistique parisienne. En juin 1523, il était l’un des gouverneurs de la confrérie de Saint-Jean l’Évangéliste…En 1542, lorsqu’il hérita d’une partie de la succession d’Étienne Colaud, il fut qualifié de bourgeois de Paris ». Sur le « groupe Colaud », voir aussi les travaux de M. Orth, Renaissance Manuscripts. The Sixteenth Century, London-Turnhout, Harvey Miller Publishers, 2015.

17 Enluminures et manuscrits

18 Enluminures et manuscrits 17 [ENLUMINURE]. Saint Nicolas et sainte Marguerite Enluminure extraite d’un manuscrit liturgique (ou composition autonome, image pieuse ?). France, Paris, vers 1530-1550 ? Attribuable à un artiste parisien du « groupe Étienne Colaud » (Martial Vaillant ? actif à Paris de 1523 à 1560 ou un artiste parisien proche du peintre de Paris, BnF, NAF 25165 ?). Dimensions à vue : 230 x 160 mm 5 000 / 7 000 € Feuillet encadré. Miniature inscrite dans un encadrement architecturé à l’or liquide, avec colonnes, entablement et soubassements à l’or et peinture bleu, avec arabesques et acanthes ornementaux. Bon état général, quelques petites pertes de surface picturale, sans gravité. Ce grand feuillet présente deux saints figurés en pied, d’une part saint Nicolas et le miracle des trois enfants ressuscités, victimes d’un boucher et de l’autre sainte Marguerite issant du dragon. Les deux saints sont représentés dans une loggia à colonnades ouvrant sur un paysage verdoyant et bleuté, avec en arrière-plan un moulin. Le cadre avec cette loggia n’est pas sans rappeler un manuscrit peint pour François Ier (Arsenal, MS 5103), Institution du prince de Guillaume Budé, vers 1518 (voir Hermant (dir.). Trésors royaux. La bibliothèque de François Ier, Rennes, 2015, p. 31 ; notons les grandes dimensions du manuscrit : 252 x 174 mm). Comme l’enluminure précédente (lot 16), nous ne savons pas de quel livre ces feuillets sont extraits. Il n’est pas exclu qu’il s’agisse de compositions indépendantes, petits tableautins peints sur vélin, supports de dévotion autonomes. L'artiste est très certainement à chercher parmi le "Groupe Colaud". On conserve un livre d’heures enluminé pour le dauphin François de France, futur François II (armes aux ff. 14 et 76v) datés 1555 (Paris, BnF, NAL 104). Ce livre d’heures a été mis en relation avec une archive attestant du paiement d’une somme à Martial Vaillant (Gallant ?) « pour l’enlumynure d’une paire d’heures pour le service de mondit seigneur » (AN, KK 106, f. 2 ; voir Léon de Laborde, La Renaissance des arts à la cour de France. Études sur le seizième siècle, t. 1, Paris, 1850, pp. 305-306 ; Cousseau, 2016, p. 88). Il présente des traits stylistiques comparables avec la présente enluminure. Signalons que Cousseau insiste sur le caractère quelque peu archaïque des miniatures des Heures dites de François II datables de 1555-1557 (Paris, BnF, NAL 104) qui reprend des motifs bellemariens des années 1538-1530. Enlumineur et « historieur », Martial Vaillant est documenté de 1523 à 1562. Il serait le gendre d’Étienne Colaud, ayant épousé une des quatre filles d’Étienne Colaud (Cousseau, 2016, p. 286). Il était membre de la Confrérie de Saint-Jean l’Évangéliste, fondée en l’autel de l’église de Saint-André-des-Arts à Paris, qui régissait les métiers du livre et de l’enluminure. Ceci expliquerait une certaine proximité stylistique avec les œuvres du « groupe Étienne Colaud », avec un ensemble d’artistes travaillant dans une esthétique commune de celle d’Étienne Colaud, artiste parisien actif de 1512 à 1541). Autre artiste dont on perçoit l’influence dans les présentes miniatures (lots 16 et 17), celui qui peint un manuscrit Plutarque, Vie d’Hannibal, traduction de Simon Bourgoing, exemplaire réalisé pour Gui de Baudreuil, abbé de Saint-Martin-aux-Bois de circa 1491-1492 à 1530 (Paris, BnF, NAF 25165 ; voir Cousseau, 2016, pp. 162-163 qui compare l’artiste parisien à celui qui peint des Heures pour le couple Aleaume-Tenon, Arsenal, MS 1175). On notera que l’on attribue les enluminures de ce manuscrit à un artiste du « cercle de Collault » et Gui de Baudreuil était aussi le commanditaire d’un Missel démembré dit « Missel de Gui de Baudreuil » également peint dans l’orbite d’Étienne Colaud. Gui de Baudreuil est aussi le commanditaire de la traduction française de L’Éducation d’un prince chrétien d’Erasme destinée par l’intermédiaire de Guillaume de Montmorency au dauphin de France, François, fils de Louise de Savoie (Paris, Coutau-Begarie, 14 octobre 2022, lot 38, préempté par Chantilly, Musée Condé) et dont l’enluminure trahit aussi un milieu proche des deux présentes enluminures (lots 16 et 17). Voir : Cousseau, M.-B. Étienne Colaud et l’enluminure parisienne sous le règne de François Ier, Tours et Rennes, 2016, pp. 8788 : « Les autres actes concernant Martial Vaillant montrent qu’il tenait, lui aussi, une place importante sur la scène artistique parisienne. En juin 1523, il était l’un des gouverneurs de la confrérie de Saint-Jean l’Évangéliste… En 1542, lorsqu’il hérita d’une partie de la succession d’Étienne Colaud, il fut qualifié de bourgeois de Paris ». Sur le « groupe Colaud », voir aussi les travaux de M. Orth, Renaissance Manuscripts. The Sixteenth Century, London-Turnhout, Harvey Miller Publishers, 2015.

19 Enluminures et manuscrits

20 Enluminures et manuscrits 18 [ENLUMINURE]. [VENISE]. [MARIEGOLA]. Feuillet extrait d’une Mariegola (registre des règlements statutaires pour les membres d’une corporation ou d’une confrérie). Paris Bordone (?), présenté par saint Jérôme (?), agenouillé en prière devant le Christ tenant un livre et pointant vers Dieu le Père Quatre putti en camaïeu d’or dans les coins extérieurs, inscription en lettres majuscules romaines : « SANCTA TRINITAS UNUS DEUS MISERERE MEI » dans un médaillon quadrilobé dans le cadre inférieur. Feuillet enluminée sur parchemin, tempera et feuille d’or. Attribuable au « Maître de T.° Ve. » (ou « T.° Ve. Master »), actif à Venise entre 1520 et 1570. Italie, Venise, vers 1560. Dimensions : 232 x 160 mm 4 000 / 6 000 € Feuillet non encadré, bon état général, quelques manques à la surface picturale. Quelques petites lacunes de parchemin aux coins supérieur et inférieur droits. Verso blanc, à l’exception de l’inscription dans la partie supérieure (voir Provenance ci-dessous). Bel exemple de frontispice enluminé d’une Mariegola (contraction de « Madre » et « Regola »). Les premières associations entre travailleurs libres tels que maîtres d’art, artisans, commerçants, se sont formées à Venise vers le XIe siècle dans le but de protéger les intérêts moraux et sociaux des travailleurs, un peu comme les syndicats d’aujourd’hui. Les règles relatives aux droits et devoirs des affiliés aux associations libres étaient consignées dans un statut connu sous le nom de « mariegola », du latin « matricula » ou « règle mère ». Le statut réglementait de nombreux aspects du fonctionnement des entreprises vénitiennes, parmi lesquels figuraient les relations entre les travailleurs, en particulier entre les propriétaires et les apprentis, mais aussi la surveillance de la loyauté de la concurrence, le contrôle de la qualité et un système d’entraide. Il établissait également des règles formelles sur les aspects religieux, moraux, comportementaux, politiques, économiques et administratifs. Elles étaient souvent enluminées et représentaient le portrait de l’artisan ou du commerçant nouvellement intronisé. Les Mariegole étaient conservées dans les archives des Écoles (telles que la Scuola Grande di San Rocco ou la Scuola Grande di San Marco). Les écoles, qui fournissaient une assistance économique, professionnelle et spirituelle, étaient des confréries laïques qui choisissaient un saint patron. De nombreuses écoles regroupaient des groupes d’artisans en fonction de leur profession et chaque école avait son propre registre professionnel. L’artiste qui a peint cette feuille est associé à une quarantaine de Dogali et Giuramenti (serments d’entrée en fonction), attribués au « Maestro T.° Ve. » et à son atelier vénitien, actif entre les années 1520 et 1570. Son nom provient d’une note datée figurant dans un feuillet de Dogale, aujourd’hui conservée au Fitzwilliam Museum de Cambridge, Marlay Cutting It. 43 : « T.° Ve. dep. 1578 », ajout postérieur, feuillet détaché d’une commission pour Pietro di Bernardino Tagliapietra en tant que Podestà de Vicence ; voir Binski et Panayotova, The Cambridge Illuminations, Londres, 2005, n° 140). Un ensemble d’œuvres rassemblées pour la première fois par Giulia Maria Zuccolo Padrono (1971, pp. 53-71) est associé avec cet artiste dit « Maestro T.° Ve ». La référence et les liens avec Tiziano Vecellio (Le Titien) suggérée par un marchand d’art trop « optimiste », ont depuis été récusés, mais l’appellation est restée. Bien qu’aucun lien direct avec le Titien ne puisse être établi, le style du « Maître T.° Ve. » témoigne du triomphe du maniérisme dans l’enluminure vénitienne contemporaine. Il est également amusant de noter que la Mariegola serait destinée à Paris Bordon (comme le suggère l’inscription au verso de la feuille peinte), qui a été en partie formé dans l’atelier du Titien. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, les mécènes des Dogale, Mariegole et Commissions en général ont commencé à demander davantage d’enluminures à pleine page, qui étaient en fait de petits tableaux indépendants, espaces idéaux pour représenter les patriciens. Ces enluminures et portraits à pleine page étaient souvent découpés du manuscrit et recherchés par les collectionneurs au même titre que les dessins. La présente feuille est un bel exemple de cette pratique. Provenance: 1. Enluminé à Venise, d’après le style et l’association avec des feuilles et des enluminures attribuées à un peintre vénitien, baptisé « T.° Ve. Master » (voir ci-dessus). Concernant les enlumineurs des Mariegole, Dogale et Commissions vénitiens, voir Szépe (2018, pp. 69-70) et pour le « Maestro T.° Ve. », voir Szépe (2018, pp. 136). 2. Inscription à l’encre brune au verso de la feuille : « Mariegola de Paris Bordone. 1560 ». Elle est copiée d’une écriture du XVIIe siècle (ou fin du XVIe siècle ?). Nous ne savons pas de quelle corporation il s’agit, peut-être en lien avec sa profession de peintre ? 3. Paris Bordon (Tréviso, 1500-Venise, 1571) était un peintre italien de la Renaissance vénitienne formé par Le Titien. On ne sait pas exactement quel est le lien entre Paris Bordon et Benedetto Bordon (vers 1450-1530), enlumineur et cartographe à Padoue et Venise. Cependant, nous savons que Benedetto Bordon a également peint des compositions similaires et a largement participé à l’enluminure de Dogali et Giuramenti, par exemple une feuille détachée d’une commande à Vincenzo Donato (1512) (Saint-Marin, Huntington Library, EL 9 H 13,1) ; voir également Cambridge, University Library, MS Dd.10.23 ; Binski et Panayotova, The Cambridge Illuminations, Londres, 2005, n° 139, commende de Vincenzo Zantani nommée par le doge Andrea Gritti en 1524 ; ou Philadelphie, Free Library, MS Lewis E. 143, commende de Marcantonio di Alvise Contarini (1504). Voir : Marcon, S. « Maestro T° Ve. », in Dizionario biografico dei miniatori italiani, 2004, p. 712. – Szépe, H.K. Venice Illuminated. Power and Painting in Renaissance Manuscripts, Yale Univeristy Press, 2018. – Zuccolo Padrono, G. M. « Il Maestro ‘To. Ve.’ e la sua bottega : Miniature Veneziane del XVI° secolo », in Arte Veneta, 25 (1971), pp. 53-71.

Verso du feuillet : « Mariegola de Paris Bordone. 1560 » 21 Enluminures et manuscrits

22 Enluminures et manuscrits 19 [ENLUMINURE] Moïse représenté de plein pied, avec sur sa tunique les « pierres du Jourdain ». Feuillet extrait d’un ouvrage non identifié. France, vers 1600 ? Dimensions : 200 x 150 mm 1 500 / 1 800 € Inscription au recto (écriture datable du XVIIe siècle) : « Moyse sur la tunicque duquel les pierres du Jourdain enlevées par le peuple d’Israel sont marquées ». Inscription au verso, on lit : « Moise les pierres du Jourdain qui furent enlevées par le peuple d’Israel marquées sur sa tunicque ». On représente Moïse communément tenant les tablettes de la loi. Outre l’inscription, le prophète est identifié ici par ses cornes : la Vulgate de saint Jérôme le décrit comme cornatus, « cornu ». Dans le présent feuillet, une iconographie peu courante fait figurer sur la tunique de Moïse des pierres fendues (a priori représentées comme des tablettes rompues). Nous en comptons 20. Faut-il y voir un multiple de 10 (pour les 10 commandements, chaque tablette représentant un commandement, rappel du décalogue ?). Malgré la légende relative à l’épisode des « douze pierres du Jourdain » on ne compte pas 12 pierres sur la tunique de Moïse ni même un multiple de 12 (24). Cette iconographie reprend un passage de Josué, 4, 1-24. Lorsque toute la nation eut fini de passer le Jourdain, l’Eternel dit à Josué : « Prenez douze hommes parmi le peuple, un de chaque tribu. Donnez-leur cet ordre : Retirez d'ici, du milieu du Jourdain, là où les prêtres se sont arrêtés de pied ferme, douze pierres que vous emporterez avec vous et que vous déposerez à l'endroit où vous passerez cette nuit ». Josué tira douze pierres du Jourdain pour ensuite les dresser à Guilgal, en cercle autour de l’autel de Dieu et de l’Arche de l’Alliance et pour célébrer la « Première Pâque » en Terre promise. Les douze pierres du Jourdain renvoient aux douze stèles que dressa Moïse sur le Mont Sinaï lorsqu'il institua l'alliance entre la Parole de Dieu et les enfants d'Israël, symbole des 12 tribus. Il est probable que cette figure peinte rappelle une gravure ou image pieuse ou de colportage comme il en existait beaucoup au XVIe et XVIIe siècle.

23 Enluminures et manuscrits 20 [ENLUMINURE]. Feuillet extrait d’un antiphonaire. Grande initiale B décorée (motifs géométriques). En latin, manuscrit décoré sur papier. Encre brune et rouge, aquarelle. France, XVIIe siècle. Dimensions : 440 x 285 mm 150 / 200 € Grand feuillet extrait d’un antiphonaire avec antienne pour laudes, messe en l’honneur de saint Antonin (au verso, p. 342). Au recto (p. 341), troisième répons pour messe ou suffrage en l’honneur de saint Antonin. 21 [ENLUMINURE]. Heures imprimées. Gravure extraite d’un livre d’heures gravée et rehaussée en coloris d’époque Résurrection de Lazare (sans doute pour illustrer l’Office des morts). Impression sur parchemin, texte au dos en latin, imprimé. France, vers 1510-1520. Dimensions : 130 x 83 mm 300 / 400 € Série in-8 dessinée par l’enlumineur-graveur et imprimeur Jean Pichore pour les frères Hardouyn, vers 1510. Voir Tenschert et Nettekoven, Horae B. M. V., 158 Stundenbuchdrucke der Sammlung Bibermühle, 14901550.

RkJQdWJsaXNoZXIy NjUxNw==