LETTRES ET MANUSCRITS AUTOGRAPHES Jeudi 13 février 2025
EXPERT Thierry BODIN Syndicat Français des Experts Professionnels en Œuvres d’Art Les Autographes 45, rue de l’Abbé Grégoire - 75006 Paris lesautographes@wanadoo.fr Tél. : 01 45 48 25 31 Division Du catalogue COLLECTION D'UN AVOCAT Nos 1 à 54 À DIVERS BeAux-Arts Nos 55 à 89 MusiQue et sPectAcle Nos 90 à 175 Édith PIAF - Une collection Nos 138 à 151 littérAture Nos 176 à 264 sciences Nos 265 à 297 histoire Nos 298 à 387 Abréviations : L.A.S. ou P.A.S. : lettre ou pièce autographe signée L.S. ou P.S. : lettre ou pièce signée (texte d’une autre main ou dactylographié) L.A. ou P.A. : lettre ou pièce autographe non signée
Catalogue visible sur www.ader-paris.fr Enchérissez en direct sur www.drouotlive.com et interencheres.com LETTRES ET MANUSCRITS AUTOGRAPHES vente aux enChères publiQues Salle des ventes Favart 3, rue Favart 75002 Paris Jeudi 13 février 2025 à 14 h exposition privée CheZ l'expert Uniquement sur rendez-vous exposition publiQue Salle des ventes Favart 3, rue Favart 75002 Paris Mercredi 12 février de 11 h à 18 h Jeudi 13 février de 11 h à 12 h Téléphone pendant l’exposition: 01 53 40 77 10 En 1re de couverture est reproduit le lot 27. En 4e de couverture est reproduit le lot 69.
Lot 80
David NORDMANN Xavier DOMINIQUE Commissaires-priseurs Thierry BODIN lesautographes@wanadoo.fr Tél. : 01 45 48 25 31 Expert Responsables de la vente Marc GUYOT Responsable du département Mobilier et objets d’art marc.guyot@ader-paris.fr Tél. 01 78 91 10 11 Ekaterina GORSHKOVA Ordres d'achat egorshkova@ader-paris.fr Tél. 01 87 44 47 74
1 4 Collection d'un avocat
2 5 1. Henri ALAIN-FOURNIER (1886-1914). L.A.S., La Chapelle d’Angillon 23 août 1913, [à Yvonne Brochet de Quièvrecourt] ; 2 pages in-8. 2 000 / 2 500 € Très belle et rare lettre au modèle d’Yvonne de Galais. Alain-Fournier lui adresse un exemplaire de Marie-Claire, « que j’ai demandé pour vous à ma vieille amie Marguerite Audoux. Il me semble qu’il vous plaira. Je crois que vous en aimerez la seconde partie, si simple et pourtant si mystérieuse, qui se passe chez des paysans de la Sologne. C’est un livre que j’ai beaucoup admiré. Et je viens de relire, sur votre exemplaire, avec encore une grande émotion, l’épisode si beau de Sœur Désirée-des-Anges. Depuis que j’ai quitté Rochefort [où il avait retrouvé « Yvonne de Galais »], j’ai fait plusieurs voyages et suis maintenant fixé pour quelques semaines dans le village où je passe toujours une partie de mes vacances. Il m’est parfois difficile de supporter le calme si grand, la quiétude parfaite de cette campagne du Berry. Tant de paix est faite pour les gens heureux ». Il demande des nouvelles de la famille de son amie: « Comment vont ce sage petit garçon que j’ai embrassé; cette charmante et turbulente petite fille qui est venue s’asseoir sur mes genoux ? […] J’aimerais que ne fût pas interrompue pour toujours la conversation que nous avons eu à Rochefort. Il y a mille choses de ma vie, de mon travail, que je souhaiterais vous raconter. […] je suis sûr que vos réponses me seraient de précieux conseils. J’ai toujours trouvé à vos paroles une prudence, une gravité, que n’ont pas celles des autres jeunes femmes ». Assurant M. Brochet de ses « sentiments parfaitement déférents et sympathiques », Alain-Fournier exprime sa « très-respectueuse et fidèle amitié ». Ancienne collection Daniel Sickles (Littérature du XXe siècle, 14-15 juin 1983, n° 4) 2. Théodore de BANVILLE (1823-1891). Poème autographe signé, Tueur de Monstres ; 2 pages in-fol. 400 / 500 € Beau poème de 32 vers recueilli dans Les Exilés (Poésies complètes, t. II, Charpentier, 1878), avec la date du 16 novembre 1873 ; il évoque Thésée tuant l’Hydre : « Le beau monstre, à demi caché dans l’ombre noire, Laissait voir seulement sa poitrine d’ivoire »… 3. Pierre BENOIT (1886-1962). L.A.S., Ciboure 20 mars 1959, à un ami; 1 page et demie in-4 à son adresse Allegria Ciboure. 100 / 150 € « Ce n’est pas un honneur pour vous, c’est une quiétude pour moi de savoir que ce sera à vous qu’incombera désormais le soin de s’occuper de mes affaires. Je sais qu’elles ne pourront être en meilleures mains ». Ils dîneront ensemble lors de sa venue à Paris : « Il y a pas mal de petites choses dont il faut que vous soyez au courant. Tout aussi pur que de l’eau de roche, d’ailleurs »… Il évoque la prochaine élection à la Société des Gens de Lettres, où le nouveau président pourrait être Francis Didelot, « mon collaborateur de la radio et du livret de l’Atlantide »…
4 6 4. Georges BERNANOS (1888-1948). L.A.S., Villa Ochoenea, Ciboure [été 1926], à un journaliste ; 2 pages in-4 à l’encre bleue. 800 / 1 000 € Belle lettre sur les violentes critiques qui ont accueilli Sous le soleil de Satan (notamment sous la plume de René Johannet dans Les Lettres). «Je ne vous reproche pas du tout d’avoir compté avec quelque joie les “rudes coups que me porte Monsieur Johannet” si vous avez assez de charité pour prêter une espèce de consistance à ce fantôme [...] Nulle voix, d’ailleurs, ne s’est élevée, ne s’élèvera jamais parmi ceux des chrétiens dont c’est le droit de juger défavorablement mon livre, pour faire du moins crédit aux intentions de l’auteur, et blâmer l’homme des Lettres qui définit gracieusement mon catholicisme “une variété commerciale d’excitation littéraire”. Le valet qui parle ainsi a derrière lui deux carrières, et il n’est pas au bout de ses trahisons, si sa figure ne ment pas »... Bernanos doute qu’on insère cette mise au point : « Vous trouverez cette dernière violence tombée de ma plume, profondément regrettable [...] néanmoins, vous n’aurez pas eu un mot de blâme pour le malheureux qui m’accuse sans preuve » et qui se livre à « de la pure et simple diffamation »... 5. Georges BERNANOS (1888-1948). 2 L.A.S., Clermont [24.X.1928] et [20.XII.1929] ; 2 pages in-4 avec enveloppe, et 2 pages oblong in-12. 400 / 500 € À J. Moremans de Liège, le remerciant pour son « généreux article ! Évidemment, je ne mérite pas de telles amitiés, mais vous sentez bien qu’elles sont, sinon ma raison de vivre, du moins ma raison d’écrire. Sans elles, je n’aurais le courage de rien. Notre profession serait si sotte ! »... « Je suis si touché de trouver votre affectueuse et fidèle pensée à chaque petit tournant de ma vie ! Est-ce bête de ne pas avoir encore été vous serrer la main ! Mais il en est toujours ainsi. Le seul bien dont nous avons la possession (provisoire hélas !) – le temps – nous est volé par des gens auxquels nous ne voudrions même pas penser, mais qui s’arrogent le droit de penser pour nous. Quelle amère et monotone comédie ! »...
7 6. Georges BERNANOS (1888-1948). Manuscrit autographe signé, Écrit le 2 novembre [1928] ; 9 pages in-fol. 800 / 1 000 € Superbe texte contre les «monstres mous», Ernest Renan et Anatole France, écrit le Jour des Morts. [Cet article violent, écrit en 1928 pour la Revue Universelle, fut refusé ; il a été recueilli dans Le Crépuscule des vieux]. «Le bonhomme France et le bonhomme Renan sont morts: vous ne m’en voyez pas autrement fâché. Ceci dit, quel cœur vraiment humain ne souhaiterait pour eux le silence, et la dignité attendue de cette position horizontale, première attitude sincère de ces deux tragiques coquettes. À Dieu ne plaise que je sois resté jadis insensible au pathétique macabre de la danse qu’ils ont dansé ! Déjà plus qu’à demi cadavres, on les vit fricoter de leurs vieilles jambes lasses, esquisser des pas et des pirouettes, et faire encore à la joie, à la douleur, à l’amour une nique exténuée. Si leur rire cassé sonnait faux, que leurs larmes étaient obscènes ! »... La pudeur voudrait qu’on les laissât à leurs noces éternelles, avec la mort, s’ils n’étaient suivis par des amis beaux-esprits, petits virtuoses vaniteux, comparables à des rongeurs. Bernanos cite à ce titre Jacques Boulenger, Henri Massis, Frédéric Lefèvre des Nouvelles littéraires, ironisant sur les remarques de ces « Messieurs de l’humanisme élégant et du dandysme cultivé […] Il faut le dire à ces survivants : ils n’en sont plus, hélas ! à lutter contre la mode, ou l’envie ; ils luttent contre le temps ; ils ne desserreront pas ses mâchoires. Qu’ils ressuscitent le bonhomme France, ou le bonhomme Renan, cela encore serait aussi vain que de les peindre, car il faudrait ressusciter avec eux tout un public aboli, tout un monde »... Il ridiculise en eux le fond adolescent, un donjuanisme intellectuel... « Nous sommes quelques-uns dans le monde à ne plus savoir jouer avec notre âme, ainsi qu’avec un chat familier : elle a grandi, elle implore une réelle étreinte. On n’est pas sans un peu de ridicule, essayiste jusqu’à la mort. D’être essayiste, c’est l’affaire de Chérubin »...
8 7. Georges BERNANOS (1888-1948). MAnuscrit autographe d’une partie de La Joie ; 56 pages et quart in-4 (bas du 1er feuillet légèrement effrangé). 2 000 / 2 500 € Cet important fragment de La Joieparut dans La Revue universelle du 15 décembre 1928 ; le livre fut publié chez Plon en mai 1929. Le manuscrit, à l’encre bleue sur papier quadrillé, présente quelques ratures et corrections ; il a servi pour l’impression dans la Revue universelle ; une mention de copyright a été joutée par Henri Massis au bas du 1er feuillet Ce fragment se rattache à la deuxième partie du roman, avec la fin du troisième chapitre et la totalité du quatrième chapitre (Œuvres romanesques complètes, Bibl. de la Pléiade, t. I, pp. 744-777). Scène capitale du roman où, dans la nuit, Chantal de Clergerie participe à l’agonie du Christ, et à la vision du gibet de Judas dont elle recueille la plainte. Au cours d’un long entretien, « l’imposture » de l’abbé Cénabre est confrontée à la « sainteté » de Chantal : la grâce divine va toucher l’âme de Cénabre. Ancienne collection Daniel SickleS (Littérature du XXe siècle, 13-15 juin 1983, n° 37).
9 8. Georges BERNANOS (1888-1948). Manuscrit autographe signé, Organisons la Peur ; 6 pages grand in-4. 800 / 1 000 € De cet article, paru dans Le Figaro du 16 avril 1932 (et recueilli dans Le Crépuscule des Vieux), Bernanos réutilisa en 1939 les pages centrales pour former la conclusion des Grands Cimetières sous la Lune. Bernanos confesse avoir longtemps caressé le projet de « faire inaugurer par Briand la statue du général Mangin. Grande pensée politique. Et comme toutes les grandes pensées politiques, religieuse. [...] La France rachetée du péché de victoire – quel spectacle ! Du péché de victoire dont nous devons toujours satisfaction aux belles âmes, aux âmes inconsolées. Rétraction, pénitence et satisfaction que les véritables pères du Pacifisme moderne, les grands universitaires du XVe siècle, les hommes de l’Université de Paris, les épouvantables prêtres qui bien avant les pisse-froid de la Société des Nations rêvèrent d’asservir le monde à une sorte de bureaucratie spirituelle, ont jadis obtenu de Jeanne d’Arc. Puis ils l’ont brûlée. Et déjà ils croyaient brûler avec elle, détruire à jamais, la fleur merveilleuse dont la semence semble avoir été jetée par les Anges, ce génie de l’honneur que notre race a tellement surnaturalisé qu’elle a failli en faire un moment comme une quatrième vertu théologale »... « Il n’y a qu’un moyen décisif, radical, d’exterminer la mémoire des sacrifices hideux, d’arracher jusqu’aux racines de l’esprit guerrier, c’est – après l’amnistie générale accordée aux héros – la solennelle réhabilitation du Lâche. [...] La seule force capable de tuer la guerre, c’est la Peur. [...] Tout homme de gouvernement, à Paris comme à Moscou, à Londres comme à Berlin ou à Rome, ne saurait avoir désormais qu’une pensée, qu’une politique, qu’un but: il s’agit d’organiser la Peur »... Ancienne collection Daniel Sickles (Littérature du XXe siècle, 13-15 juin 1983, n° 40). 9. Georges BERNANOS (1888-1948). L.A.S., Hyères [13 juin 1933], à une « amie chérie » [Madeleine Le Chevrel ?] ; 4 pages in-8. 300 / 400 € Bernanos (qui se remet à écrire Monsieur Ouine après avoir perdu une partie du manuscrit) ne veut pas aller à Paris : « j’ai eu tant de mal à rentrer dans mon livre après la perte des cahiers que je ne voudrais pas en sortir de nouveau avant quelques semaines. Enfin, j’avais le projet d’aller chercher Yves à la Pierre-qui-Vire le mois prochain. [...] Je vous prie de ne pas pousser trop loin le respect de mes vices. Faites moi la charité – faites cet acte de charité héroïque – de me dire la vérité sur tout. [...] Enfin soyez ma conscience. J’ai bien besoin de changer de conscience, allez ! La mienne ne veut pas s’occuper de moi. Elle est écœurée, cette conscience ! D’ailleurs elle ne m’a jamais servi à grand chose, parce qu’elle a pris mauvaise opinion de moi depuis trente ans, trente cinq ans peut-être. Elle est très sage, très lucide, mais elle aurait dû m’aimer un peu. Vous, vous seriez une conscience qui ne désespère pas de moi, une conscience qui m’aime, quel bonheur. [...] Mon roman [Monsieur Ouine...] j’y travaille très régulièrement, voilà tout. Tantôt deux pages par jour, tantôt trois, et au bout du compte, lorsque j’additionne, cela ne fait jamais qu’une page par jour, trente par mois. Sacré calcul ! »... Ancienne collection Daniel Sickles (Littérature du XXe siècle, 13-15 juin 1983, n° 41). 10. Georges BERNANOS (1888-1948). L.A.S., 26 décembre 1944, [à M. Desy] ; 4 pages in-8. 300 / 400 € Il a eu, grâce à son ami, « la plus belle et la plus claire nuit de Noël » depuis son enfance. Il évoque la messe « débordante de douceur, de paix, qui était vraiment une messe parmi les hommes, [...] une messe bien à nous autres, pauvres pécheurs, le bon Dieu venant se reposer, reprendre haleine, chez nous, chez l’un des nôtres, comme jadis... Enfin je dis cela très mal, pour ne pas risquer de le dire trop bien, on ne se méfie jamais assez de la littérature »... Il se remémore les chansons du vieux pays, portées si haut dans un élan de joie, et qui lui faisaient penser que « tout cela devait consoler le petit Jésus d’avoir dû entendre, au cours de la même Nuit, dans ses églises, tant de bigots et de bigotes refroidis par une incurable constipation de l’âme, et que le Saint Esprit lui-même a tant de mal à réchauffer ! »... Il emportera ce souvenir dans la vieille et cruelle Europe...
11 11 10 11. Georges BERNANOS (1888-1948). Manuscrit autographe signé, La maladie de la démocratie ; 6 pages in-4 à l’encre bleue sur feuillets de papier quadrillé détachés d’un cahier. 800 / 1 000 € Bel et vigoureux article paru le 6 décembre 1945 dans La Bataille, et recueilli dans Français, si vous saviez..., au sujet de la formation d’un nouveau gouvernement par De Gaulle. Répondant à une analogie médicale de son confrère Royer-Collard, dans Combat, Bernanos déclare qu’une surveillance attentive de la démocratie ne suffira pas pour la sauver. « Il est malheureusement certain que l’intervention foudroyante se produira tôt ou tard, mais elle sera celle de César, de Napoléon, de Lénine, d’Hitler ou de Mussolini [...] Car la maladie dont souffre la démocratie n’est pas du tout [...] une maladie inconnue. Nous sommes parfaitement renseignés sur ses symptômes et son évolution »... Elle se manifeste par une baisse inquiétante de la température et une chute de la pression artérielle... « La démocratie française ne se croit visiblement pas appelée à une vocation héroïque, elle n’est pas disposée davantage au rôle sacrifié de l’inventeur, elle redoute les expériences [...] Elle est d’ailleurs moins tentée que jamais d’en courir les risques, de courir n’importe quel risque, depuis que le Maréchal a réussi ce coup de la rassurer sur sa médiocrité, d’apaiser ses derniers scrupules, de donner à sa médiocrité une signification morale, et même religieuse »... Dans cette situation, la partie entre De Gaulle et le parti communiste n’est pas égale. Mais les doctrinaires veulent faire de la démocratie l’honneur de la Résistance... « En avouant maintenant que la Résistance a été l’œuvre d’un certain nombre d’hommes décidés à mourir, perdus dans la foule de gens bien résolus à survivre, ils craignent de passer pour fascistes »... Il est en effet désagréable d’admettre que le cerveau de la démocratie ne réussit pas à imposer sa volonté aux membres, et que ce cerveau pense pour lui seul, aux dépens de sa propre substance, « condamné à réingurgiter ses propres sécrétions, muré dans sa boîte crânienne comme un prisonnier dans son cachot »... 12. Georges BERNANOS (1888-1948). L.A.S., 30 mai 1946, à un confrère ; 2 pages et demie in-8. 250 / 300 € « Tachez encore de trouver une place convenable pour cet article auquel je tiens beaucoup, et que j’ai fait exprès le plus court possible. [...] Attention de mettre au pluriel, à la fin, le mot idiots. Sans ça, j’aurais l’air de l’appliquer à Mauriac tout seul... Soyez assez gentil pour vérifier si c’est bien grand officier que Mauriac vient d’être nommé, et si c’est bien “une plaque” »...
15 11 13. Georges BERNANOS (1888-1948). 3 L.A.S., Bar-le-Duc 1924-1925 et s.d., à une dame ; 4 pages in-8 ou in-4. 300 / 400 € Bernanos, qui séjourne alors à Bar-le-Duc (47 rue des Ducs) envoie de l’argent (loyer ou remboursement d’une dette ?) à sa correspondante. Le 22 mai 1925 (en-tête des assurances La Nationale), de Châlons, il promet d’envoyer des fonds dès son retour à Bar-le-Duc. Une autre fois, il envoie la somme de 750 F et explique : « Ce n’est que la moitié de celle que je devrais vous remettre, et je vous serais très obligé de bien vouloir prier Madame Délepine de s’en contenter pour cette fois. Elle peut croire que j’enverrai le solde aussitôt qu’il me sera possible »… On joint une lettre écrite en son nom (Fressin 27 août 1920) ; 2 télégrammes, appelant au secours le Dr Délepine [Fressin 4/4/1923), et condoléances à Mme Délepine [Auchy-le-Hesdin 2/8/1926]. 14. Louis BOUILHET (1821-1869). L.A.S., Mantes 14 janvier 1862, à Étienne Carjat ; 1 page et demie in-8. 150 / 200 € « Je suis comme la plus belle fille du monde, quand elle n’a même plus ce que vous savez. Je n’ai guère fait de vers, cette année. [...] je suis présentement enfoncé, jusqu’au cou, dans la poésie dramatique. J’ai sur le chantier une longue machine ». Il va cependant donner un poème pour le journal de Carjat... « Parmi mes pièces inédites, j’en ai que je ne veux pas publier actuellement – d’autres et beaucoup, que je ne trouve pas bonnes »... 15. Antoinette du Ligier de La Garde, Madame DES HOULIÈRES (1638-1694). L.A.S. « Deshoulieres » à son amie «Ozine»; 3 pages et demie in-8 (mouillure dans une marge). 3 000 / 4 000 € Rare lettre de cette poétesse parlant de MOLIÈRE ; témoignage inédit, inconnu de G. Mongrédien et de M. Jurgens. « Nostre derniere journée passée a la campagne ma chere Ozine estoit triste, tous les jours qui lont suivie lont esté mille fois plus encore ». Le prince [Condé ?] est parti aux eaux de Bourbonne « dans un estat de santé bien alarmant [...] je ne puis vous exprimer ce que jay souffert de sa situation ». Elle espère que son amie viendra la voir, « si ce triste temps et moy bien plus triste encore ne vous effrayent pas [...] quand l’ame souffre elle a besoin de ceux quelle aime. Monsieur de Nivernois, Mesdames de Clerembault et de lafayette Mr de la Rochefoucauld accompagné de Moliere sont passés icy la semaine dernière, mais quel bien peut causer la visite de gens devant qui je dois me contraindre ce nest qu’avec vous que je mabandonne venez donc ma bonne ozine me consoler. Adieu je reparts et voudrois ne jamais revoir paris »... Ancienne collection André Saudemont (II, 30 octobre 1981, n° 318).
12 perdu plus que tout le reste ». Ainsi, on a chassé Desmoulins d’une maison où on voulait lui faire épouser la nièce qui était boiteuse... « cetoit le temps ou lesperance elevoit devant moi ses nuages dorés [...] et ou commencant a voir Mr Target, et nos autres aigles, et venant ensuite a me tater, je ne pouvois m’empecher de me croire d’une aussi bonne pate»... Pour tenter d’épouser celle qu’il aime, Desmoulins prend une chambre dans la maison : « je ne pouvais m’imaginer qu’en faisant la cour à la fille j’eusse plu a la mere, et qu’elle voulut me prendre a l’essai [...] les ecailles me sont tombées des yeux». La rupture est consommée. Desmoulins raconte ensuite le « grand procès » qu’il a gagné, et comment il a défendu à Laon un curé condamné aux galères et accusé d’avoir mis le feu à son village... « Je fais des scenes dans le palais [...] je joue le grand role dont je metois emparé ». Il dînait chez Target quand on apprit que le baillage de Guise [où le père de Camille était lieutenant général] avait enregistré « avec acclamations » les édits du 8 mai : « Tous les avocats qui etoient a table, me tomberent sur le corps, et traiterent mon pere avec la demiere indignité, je ne pus me contenir et je plaidai la cause des nouveaux tribunaux, alors je crus qu’ils alloient dechirer leurs habits »... Desmoulins a alors rédigé avec un ami un écrit pour soutenir les édits ; l’écrit n’a pas paru, mais est assez connu pour avoir définitivement brouillé Desmoulins avec les avocats. Mais il a rencontré un autre compagnon fortuné qui l’a accueilli : « nous avons un domestique, le pot au feu, et des filles. Je compose encor, on m’imprime meme en ce moment [...] nous comptons retirer chacun une trentaine de louis de la brochure presentement sous presse. Ainsi soit-il. Mais cest un mechant metier que de fonder son revenu sur l’esprit qu’on aura »... 16. Camille DESMOULINS (1760-1794). L.A.S., Paris 27 octobre 1787, à son ami Grasset ; 4 pages in-4 remplies de sa fine écriture (lég. rouss., petite déchir. réparée). Cachet de la coll. Thorek. 2 500 / 3 000 € Longue et rare lettre qui fournit un précieux témoignage sur les débuts publics de Camille Desmoulins comme avocat. Desmoulins se réjouit de la prospérité et de la fortune de son ami, le seul ami dont il se souvienne... « Tu scais que je ne suis pas bien chaud en amitié, ma sensibilité nest guere que dans le fond de mon cœur, et je deviens encor moins demonstratif, a mesure que les annees s’accumulent. [...] Je suis encor en ce moment avocat au parlement et je touche à la fin de mon stage. La franchise et l’honneteté de mon caractere mont perdu ; [...] je m’etois attaché a Target, j’ai deplu au patron, parceque je n’avais pas la force de louer comme tous les convives, dont les flagorneries me donnoient l’air d’un heron. Netant point fils, frere ou neveu dun procureur, il me restoit deux ressources, de me faire le valet d’une etude ou de faire cocu le procureur ; il y a tel cas ou jaurois usé de la seconde, mais les occasions m’ont manqué, lautre ne convenoit point au fils d’un Lieutenant General, et a un homme de lettres. Je voulois me faire remarquer dans ma profession, non point pour etre regardé, mais afin de pouvoir choisir une femme, Melle xx. Ce gout pour le Mariage, et l’envie d’avoir celle que tu scais m’ont
13 17. Paul ELUARD (1895-1952). Poème autographe signé, Il y aura une justice, 1948 ; 1 page in-4 (encadrée). 2 000 / 2 500 € Poème publié sous le titre Dit des trieuses dans la plaquette Hommages (Namur, Cahiers de la Poésie nouvelle, 1950). Il est ici intitulé Il y aura une justice, et est dédicacé « à mes camarades trieuses ». Il se compose de 3 quatrains et un monostique. Il présente des ratures et corrections au 11e vers, et au dernier vers : « Et nos mains justes [triomphent biffé et corrigé en gagneront biffé] vaincront ». Il est daté, après la signature, « 29 nov 48 ». « Y a-t-il une justice Il n’y a pas de justice Il pourrait y en avoir une Si nous la faisions nous-mêmes»…
14 18. Gustave FLAUBERT (1821-1880). L.A., [Croisset] Samedi soir, minuit [8 mai 1852], à Louise Colet ; 8 pages in-8, enveloppe avec marques postales. 6 000 / 8 000 € Belle lettre à Louise Colet sur Madame Bovary, sur Chateaubriand, et sur Dante. … « Cette rectitude de cœur dont tu parles n’est que la même justesse d’esprit que je porte je crois dans les questions d’art. Je n’adopte pas quant à moi toutes ces distinctions de cœur, d’esprit, de forme, de fond, d’âme ou de corps. Tout est lié dans l’homme. – Il fut un temps où tu me regardais comme un égoïsme jaloux qui se plaisait dans la rumination perpétuelle de sa propre personnalité. C’est là ce que croient ceux qui voient la surface. – Il en est de même de cet orgueil qui révolte tant les autres et que payent pourtant de si grandes misères. – Personne plus que moi n’a au contraire aspiré les autres. J’ai été humer des fumiers inconnus. J’ai eu compassion de bien des choses où ne s’attendrissaient pas les gens sensibles. – Si la Bovary vaut quelque chose, ce livre ne manquera pas de cœur. L’ironie pourtant me semble dominer la vie. – D’où vient que quand je pleurais j’ai été souvent me regarder dans la glace pour me voir. – Cette disposition à planer sur soi-même est peut-être la source de toute vertu. Elle vous enlève à la personnalité, loin de vous y retenir. Le comique arrivé à l’extrême, le comique qui ne fait pas rire, le lyrisme dans la blague est pour moi tout ce qui me fait le plus envie comme écrivain. – Les deux élémens humains sont là. Le Malade imaginaire descend plus loin dans les mondes intérieurs que tous les Agamemnon [...] C’est une chose drôle du reste comme je sens bien le comique en tant qu’homme, et comme ma plume s’y refuse. – J’y converge de plus en plus à mesure que je deviens moins gai, car c’est la dernière des tristesses. – J’ai des idées de théâtre depuis quelque temps, et l’esquisse incertaine d’un grand roman métaphysique, fantastique et gueulard qui m’est tombé sur la tête il y a une quinzaine de jours. Si je m’y mets dans cinq ou six ans, que passera-t-il depuis cette minute où je t’écris jusqu’à celle où l’encre se séchera sur la dernière rature ? – Du train dont je vais je n’aurai fini la Bovary dans un an. Peu m’importe six mois de plus ou de moins. – Mais la vie est courte ! ce qui m’écrase parfois, c’est quand je pense à tout ce que je voudrais faire avant de crever, qu’il y a déjà 15 ans que je travaille sans relâche d’une façon âpre & continue, et que je n’aurai jamais le temps de me donner à moi-même l’idée de ce que je voulais faire ». Il a lu l’Enfer de Dante qui a certes « de grandes allures », mais manque de plan et se répète trop : « Un souffle immense par moments. – Mais Dante je crois est comme beaucoup de belles choses consacrées St Pierre de Rome entr’autres [...], on n’ose pas dire que ça vous embête. Cette œuvre a été faite pour un temps et non pour tous les temps »... Il a lu aussi les Mémoires d’outre-tombe : « Cela dépasse sa réputation. – Personne n’a été impartial pour Chateaubriand. Tous les partis lui en ont voulu. – Il y aurait une belle critique à faire sur ses œuvres. – Quel homme
15 c’eût été sans sa poétique. Comme elle l’a rétréci. Que de mensonges, de petitesses. [...] Chateaubriand est comme Voltaire. Ils ont fait (artistiquement) tout ce qu’ils ont pu pour gâter les plus admirables facultés que le bon Dieu leur avait données. — Sans Racine Voltaire eût été un grand poète et sans Fénelon qu’eût fait l’homme qui a écrit Velléda & René. Napoléon était comme eux. Sans Louis XIV, sans ce fantôme de monarchie qui l’obsédait, nous n’aurions pas eu le galvanisme d’une société déjà cadavre. — Ce qui fait les figures de l’antiquité si belles c’est qu’elles étaient originales. Tout est là, tirer de soi. Maintenant par combien d’étude il faut passer pour se dégager des livres ! et qu’il en faut lire ! Il faut boire des océans & les repisser ». Flaubert alors se souvient d’une tragédie qu’il avait écrite vers 1847 avec Louis Bouilhet, La Découverte de la vaccine ; il avait alors beaucoup étudié le théâtre de Voltaire... « Il faut lire le mauvais et le sublime, pas de médiocre. – Je t’assure que comme style les gens que je déteste le plus m’ont peut-être plus servi que les autres ». Et il cite plusieurs extraits, en effet calamiteux, de cette tragédie en vers : « voilà de la poésie ou je ne m’y connais pas et dans les règles encore ! »... Il raconte alors l’« amour lyrique » d’un jeune homme pour « la mère Hugo »... « Entre deux cœurs qui battent l’un pour l’autre, il y a des abimes. – Le néant est entre eux, toute la vie, et le reste. – L’âme a beau faire elle ne brise pas sa solitude. – Elle marche avec lui. – On se sent fourmi dans un désert et perdu – perdu »... Il relate également sa brève visite chez Victor Hugo. Louis Bouilhet va bientôt habiter à Paris. « Lui parti, je serai seul. Là commencera ma vieillesse. Tout ce que je connais de la Capitale ne me donne pas envie d’y vivre. Paris m’ennuie on y bavarde trop pour moi. La tentative de séjour que j’y ferai, les quelques mois que j’y passerai pendant deux ou trois hivers m’en détourneront peut-être pour toujours. Je reviendrai dans mon trou et j’y mourrai, sans sortir. Moi qui me serai tant promené en idée. – Ah ! Je voudrais bien aller aux Indes et au Japon ! Quand la possibilité m’en viendra je n’aurai peut-être ni argent ni santé. Physiquement d’ailleurs je me recoquille de plus en plus. La vue de ma bûche qui brûle me fait autant plaisir qu’un paysage. – J’ai toujours vécu sans distractions il m’en faudrait de grandes. Je suis né avec des tas de vices qui n’ont jamais mis le nez à la fenêtre. J’aime le vin je ne bois pas, je suis joueur et je n’ai jamais touché une carte. La débauche me plaît et je vis comme un moine. Je suis mystique au fond et je ne crois à rien. Mais je t’aime, mon pauvre cœur et je t’embrasse... rarement. Si je te voyais tous les jours peut-être t’aimerais-je moins ? Mais non c’est pour longtemps encore. Tu vis dans l’arrière-boutique de mon cœur et tu sors le Dimanche. Adieu, mille baisers sur la poitrine »... Correspondance (Bibl. de la Pléiade), t. II, p. 84.
16 19. André GIDE (1869-1951). Manuscrit autographe, Dieu “Fils de l’Homme” ; 7 pages in-4. 1 000 / 1 500 € Manuscrit avec ratures, corrections et passages supprimés de ce texte paru dans les Interviews imaginaires (Lausanne, Éd. du Haut-Pays, 1943), et repris dans les Pages de Journal, 1939-1942 (NewYork, J. Schiffrin, [1944]). Dans ce dialogue entre Moi et Lui, Gide s’explique sur ses croyances religieuses... « j’ai dû vite comprendre que tout ce que je cherchais naguère dans le communisme (en vain, car où j’espérais trouver de l’amour, je n’ai trouvé que de la théorie) c’était ce que le Christ nous enseigne ; nous enseigne avec tout le reste en surplus. [...] Le Dieu que représente et incarne le Christ, le Dieu vertu, doit lutter à la fois contre le Zeus des forces naturelles et contre la malignité des hommes ». Il ne veut pas « confondre le Christ avec Dieu ». Et, méditant sur la dernière parole du Christ « Mon Dieu, pourquoi m’avoir abandonné?», Gide conclut: «Comment ne pas y voir, dans cette tragique parole, non point un lâchage, une trahison de Dieu, mais ceci : que le Christ, en croyant et en faisant croire qu’il avait partie liée avec Dieu, se trompait et nous trompait ; que Celui qu’il appelait “mon Père” ne 20. Sacha GUITRY (1885-1957). L.A.S. à un « cher confrère » ; 2 pages in-8 à en-tête Théâtre des Variétés (pli fendu). 100 / 120 € « D’après ce que me dit Germaine, il ne me reste plus qu’à vous remercier – nous le faisons bien sincèrement. J’espère que vous êtes complètement remis de votre petit accident d’auto – et que vous êtes heureux des succès de votre pièce»… Max Maurey ajoute 2 lignes a.s. : « Et moi aussi mon cher ami ». 21. Sacha GUITRY (1885-1957). François TALMA. Réflexions de Talma sur Lekain et l’art théâtral (Paris, Auguste Fontaine, 1856). In-16, broché (dos abîmé). 100 / 150 € Dédicace autographe signée de Sacha Guitry sur le faux-titre à l’acteur Samson Fainsilber (1904-1983) : « à Samson Fainsilber ce petit livre important de son camarade Talma – avec tous mes souhaits sincères de succès. Sacha Guitry ». On joint un exemplaire du journal Le Rire, numéro spécial V’là les English ! (23 novembre 1899), illustré par Ad. Willette. l’avait jamais reconnu pour Fils, que le Dieu qu’il représentait, que lui-même était seulement ainsi qu’il dit parfois “Fils de l’Homme”. C’est ce Dieu là seulement que je peux et veux adorer ».
17 22. Victor HUGO (1802-1885). Manuscrit autographe, 3 juillet 1834, [à Juliette Drouet] ; sur une petite pièce de carton ovale (hauteur 13 cm ; encadrée). 4 000 / 5 000 € Précieuse relique amoureuse, déclaration d’amour de Victor Hugo à Juliette Drouet. [C’est en février 1833 que Juliette Drouet, qui jouait le rôle de la Princesse Negroni dans Lucrèce Borgia, devint la maîtresse d’Hugo. Le 3 juillet 1834, à l’hôtel de l’Écu de France à Jouy-en-Josas, les deux amants connaissent une nuit inoubliable qui scellera leur indéfectible union. Le lendemain, Juliette enverra à son amant ce pacte d’amour : « Hier, 3 juillet 1834, à dix heures et demie du soir, dans l’auberge de l’Écu-de-France, moi, Juliette, j’ai été la plus heureuse et la plus fière des femmes de ce monde ; je déclare encore que, jusque-là, je n’avais pas senti dans toute sa plénitude le bonheur de t’aimer et d’être aimée de toi. Cette lettre, qui a toute la forme d’un procès-verbal, est en effet un acte qui constate l’état de mon cœur. Cet acte, fait aujourd’hui, doit servir pour tout le reste de ma vie dans le monde ; le jour, l’heure et la minute où il me sera représenté, je m’engage à remettre ledit cœur dans le même état où il est aujourd’hui, c’est-à-dire rempli d’un seul amour qui est le tien et d’une seule pensée qui est la tienne »...] Témoin aussi de cette nuit d’amour cette relique, destinée à accompagner un portrait de Victor Hugo, où le poète proclame son amour pour Juliette [Le portrait, par Jean Alaux, est conservé à la Maison de Victor Hugo]. « Ces yeux dont tu es la lumière, ces oreilles dont tu es la musique, ces narines dont tu es le parfum, cette bouche dont tu es le souffle, ce front dont tu es la pensée, ces cheveux dont tu es la couronne, tout cela fait une tête, et cette tête se ferait couper pour toi. 3 juillet 1834. 1 h. du mat. » Reproduction dans L’Illustration du 4 juillet 1914 (p. 15). Ancienne collection André Bertaut (14-15 décembre 1983, n° 135).
18 23. Victor HUGO (1802-1885). 2 photographies avec légendes autographes, [Bruxelles 1867] ; tirages sur papier albuminé 25,5 x 18 et 24,5 x 18 cm sur cartons 33 x 24,5 cm à vue (encadrées). 4 000 / 5 000 € Belles photographies réalisées par Bertall à Bruxelles en 1867. Sous sa photographie le représentant debout, la main droite appuyée sur le dossier d’un fauteuil, Hugo a écrit: «Demandant à Louis Bonaparte ce qu’il pense de Napoléon le Petit». Sous l’autre photographie, le montrant assis dans le fauteuil, tenant un livre dans sa main droite, il a inscrit : « Regardant entrer le coup d’état ».
19 24. Victor HUGO (1802-1885). L.A.S. « V.H. », Guernesey, Hauteville house 6 mai 1857, à Alphonse de Lamartine ; 1 page in-8 avec ratures et corrections. 1 500 / 2 000 € Sommation de s’expliquer après une allusion aux Châtiments dans le Cours familier de littérature. [Lamartine avait attaqué violemment les poètes satiriques, les assimilant à des bourreaux : « Ce n’est pas le métier des immortels. Ce sont là de ces gloires dont on se repent ; il faut se les refuser, sinon par respect pour ses ennemis, du moins par respect pour soi-même »...] « Pas d’équivoque entre nous. Tous les proscrits qui m’entourent ici pensent unanimement que c’est moi que vous avez voulu désigner dans votre entretien XVI, page 263. Je n’ai pas à m’expliquer sur des écrits qui sont la fonction même de ma vie et qui résument pour moi le devoir dans son acception la plus haute. Mais je dois vous poser une question. Quant à moi je maintiens en suspens, jusqu’à ce que vous ayiez répondu, mon sentiment personnel. Répondez-moi oui ou non. Les amitiés de trente-sept ans doivent durer ou finir par la franchise »… Il ajoute, en post-scriptum : « Je sais, par Béranger, que vous connaissez le livre intitulé Châtiments. » 25. [Victor HUGO]. Photographie en vue stéréoscopique, vers 1857 ; 2 tirages sur papier albuminé 7 x 7 cm, collés sur carton 8, 5 x 17 cm. 400 / 500 € Le carton est annoté au dos : « Victor Hugo dans son jardin à Guernesey ». Hugo est assis sur la margelle et accoudé sur la fontaine aux dauphins ; il n’a pas encore sa barbe.
26. Victor HUGO (1802-1885). Dessin original à la plume et au lavis, signé en bas « victor hugo » ; 12 x 13 cm. (encadré). 20 000 / 25 000 € Un des fameux Burgs fantastiques qu’Hugo aimait dessiner. Des ruines inquiétantes apparaissent dans la pénombre du fond, alors qu’au premier plan se détache une muraille blanche et une porte monumentale aux pierres sculptées. Ce dessin, qui daterait des années 1864-1865, est proche de plusieurs dessins du manuscrit des Travailleurs de la mer. Anciennes collections Paul MEURICE (ami intime et exécuteur testamentaire de V. Hugo); Mme OzenneMeurice ; succession Ozenne-Meurice ; Georges Aubry ; Georges Hugnet. – Vente Nouveau Drouot (Laurin, Guilloux, Buffetaud, Tailleur), 12 juin 1984, n° 66. Ce dessin a figuré sous le n° 135 (repr.) dans l’exposition Dessins de Victor Hugo (catalogue rédigé par Pierre Georgel) en 1971 à la Maison de Victor Hugo (Paris) et au Musée Victor Hugo (Villequier). Ce dessin figurera au catalogue des dessins de Victor Hugo que prépare M. Pierre Georgel.
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27. Victor HUGO (1802-1885). Dessin original, signé en bas à droite et situé, Puente de los contrebandistas, [1868] ; 24,5 x 16,8 cm sur papier fort (encadré). 50 000 / 60 000 € Magnifique dessin du pont des contrebandiers dans les Pyrénées. Plume et lavis d’encre brune et noire. Signé en bas à droite et situé : « Victor Hugo / Pyrénées – Puente de los contrabandistas ». Ce dessin a été offert par Victor Hugo en décembre 1868 à Jules Claretie ; le dessin avait été confié à Auguste Vacquerie pour être remis à Claretie, à qui Hugo écrivait le 31 décembre (voir la lettre au n° suivant) : « C’est el puente de los contrabandistas. J’ai vu cela dans les Pyrénées, étant enfant. Le Pont des Contrebandiers était terrible. Il servait aux contrebandiers comme pont, et à la justice comme gibet. On les pendait aux poutres»… Provenance: Jules CLARETIE; vente Drouot (Mathias-Le Roux), 8 décembre 1986, n° 141. Ce dessin figurera au catalogue des dessins de Victor Hugo que prépare M. Pierre Georgel.
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24 28. Victor HUGO (1802-1885). 4 L.A.S., Hauteville House (Guernesey) et Bruxelles janvier-décembre 1868, à Jules Claretie ; 6 pages in-4 ou in-8, adresses et enveloppes ; montées sur onglets sur des feuillets de papier vergé en un volume petit in-4 relié maroquin noir souple, titre doré sur le plat sup. 6 000 / 7 000 € Très belle correspondance. 14 janvier. Après l’interdiction des pièces de Victor Hugo à la Comédie Française... « Vous prenez acte hautement de la lâcheté commise, du dol et du vol, de cette petite turpitude jésuite étranglant Hierro entre deux portes. Qui est maître aujourd’hui dans la maison de Molière ? c’est Tartufe. Il s’appelle Édouard Thierry, et fait ses pâques entre deux portants, recevant de Dupanloup l’hostie, et de Rouher le mot d’ordre [...] Je suis un pestiféré, je suis en quarantaine. La police crible mes lettres, la, poste vole l’argent de mes timbre-poste »... 26 janvier. Il promet à Claretie un dessin, et l’invite à venir au printemps à Bruxelles : « je ferai sous vos yeux votre dessin, que vous me paierez d’un serrement de main [...] chose curieuse et qui m’a charmé, Garibaldi m’a répondu en vers, et en vers français »... Bruxelles 31 août. [Mort de Mme Hugo] : « L’insomnie m’a brulé les yeux. Lire votre belle page sur ma chère morte m’a soulagé »...
25 31 décembre. Il lui envoie par Auguste Vacquerie le dessin promis : « C’est el puente de los contrabandistas. J’ai vu cela dans les Pyrénées, étant enfant. Le Pont des Contrebandiers était terrible. Il servait aux contrebandiers comme pont, et à la justice comme gibet. On les pendait aux poutres. Cela ne les empêchait pas de continuer d’y passer. Ce pont s’appelait aussi : On marche dessus. On danse dessous. J’ai cité dans le Dernier jour d’un condamné la chanson triste Je lui ferai danser la danse Où il n’y a pas de plancher. Cette lugubre danse, je vous l’envoie. Pardonnez-le moi. C’est hideux, mais utile. Il faut mettre aux bourreaux le nez dans leur ouvrage. Donc montrons l’horreur du passé. Le présent n’est pas beaucoup plus beau. Mais quel Demain vous allez avoir, vous qui êtes jeunes ! Moi, je serai mort »...
29. Victor HUGO (1802-1885). Dessin original, signé en bas à droite, [vers 1866] ; plume et lavis d’encre brune ; à vue 6,5 x 18 cm (encadré). 15 000 / 20 000 € Paysage de tempête. Entre deux chaumières, un grand arbre est battu par la tempête. L’effet d’ombre et de lumière (sur les parties laissées en réserve) est saisissant. Le dessin est signé en lettres capitales à la gouache blanche : « victor hugo ». Il a conservé son encadrement d’origine, portant au dos l’étiquette de l’encadreur G. Masson, et, audessous, sur le papier bleu, la signature d’Auguste Vacquerie. Ce dessin figurera au catalogue des dessins de Victor Hugo que prépare M. Pierre Georgel.
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31 28 30. Victor HUGO (1802-1885). L.A.S., 7 mars ; 1 page in-12. 1 000 /1 200 € « Vous dites éloquemment des choses vraies. L’avenir reste à la France et le monde est à la République. Je vous remercie et je vous félicite de votre vaillant écrit ». On joint une note autographe sur papier brun, ayant probablement servi comme couverture d’un dossier: « Légende des Siècles – Suite et complément » (environ 23 x 16,5 cm). 31. [Victor HUGO]. Juliette DROUET (1806-1883). L.A.S. « Juliette », 30 août Lundi soir [1841 ?], à Victor Hugo ; 4 pages in-8 (sous verre). 1 500 / 2 000 € Amusante lettre amoureuse. Elle rembourse sa dette à son « cher petit créancier, je ne veux rien avoir à vous, pas un seveu, pas une obole, pas un liard, pas un atôme pas rien de rien. C’est mon idée ze peu bien le dire n’est-ce pas. Ze veu pas qu’on me mène par le bout du nez ça a l’air trop serein. Tiens ze ne le veux pas ze suis pas ton domestique ». Il fait chaud, et elle aimerait bien se « promener avec vous pour prendre l’air et pour respirer un peu. Mais vous n’aurez pas le bon esprit de venir me chercher il n’y a pas de danger vous aimeriez bien me voir crever que de me faire sortir 5 minutes. Taisezvous monstre vous n’êtes pas digne de ma colère et ze vous méprise »… Qu’il vienne vite : « Nous avons faim et soif de vous. Baisez moi. Baisez moi encore zaime ça moi […] Baise moi touzours touzours et encore plus c’est mon idée. Baise moi ze le veux ze l’exize »… Ancienne collection Robert Manuel (16 novembre 1986, n° 200).
32 29 32. [Victor HUGO]. Juliette DROUET (1806-1883). L.A.S. « Juliette », 6 octobre samedi [1849], à Victor Hugo ; 4 pages in-8. 800 / 1 000 € Elle commence par se plaindre qu’elle eût mieux employé son temps à aller à Saint-Mandé [voir sa fille] qu’à attendre Victor. Elle s’interrompt à son arrivée : « On sonne c’est toi quel bonheur ! » Puis elle reprend le soir : « Jamais je ne peux me séparer de toi sans que cela me fasse l’effet d’une atroce mystification. Jamais je ne m’habituerai à n’être pas avec toi toujours tant c’est un besoin pour moi de te voir sans cesse. J’ai vu que tu travaillais tantôt et j’ai respecté ton travail en ne soufflant pas un mot. Le bonheur pour moi c’est de te sentir auprès de moi [...] de t’avoir là et de savoir que ta chère et ravissante petite carcasse n’est pas à la première Olympe qui veut la prendre quand elle n’est plus gardé. Du reste tu devrais m’attacher spécialement à ce service et tu verrais plus de Cornu que de corps Nus je t’en réponds »... 33. [Victor HUGO]. Juliette DROUET (1806-1883). L.A.S. « Juliette », 19 octobre Vendredi matin [1849], à Victor Hugo ; 4 pages in-8 (légère mouillure sur un bord ; sous verre). 800 / 1 000 € « Bonjour, mon toto aimé, bonjour, mon noble cœur vénéré, bonjour, mon grand Victor admiré, bonjour, mon sublime et généreux homme, bonjour, de l’âme et du cœur, bonjour. Je te prédis un beau succès en dépit des vociférations du thiers parti et autres montalembert de cette fameuse assemblée. Je regrette de ne pouvoir pas assister à ce grabuge monstre pour juger des horions que tu leur distribueras en plein piffs malgré leurs cris d’oies sauvages. [...] Je t’applaudis d’avance et je fais un FOUR magnifique pour la brioche politique du tout petit Thiers et de ses grandes lunettes ». Ancienne collection Robert Manuel (16 novembre 1986, n° 199).
30 34. Léon BONNAT (1834-1923). Dessin original à la plume, signé en bas à droite et daté à gauche «22 mai 1885 » ; 18 x 25,5 cm. (encadré). 2 500 / 3 000 € Tête de Victor Hugo sur son lit de mort ; dessin fait en trois heures le jour même de la mort de Victor Hugo (il était mort à 13h 30). Ancienne collection José Maria de Heredia. On joint 2 L.A.S. de Léon BONNAT (à Alice Lockroy, qui avait été la femme de Charles Hugo) relatives à ce dessin. – [Mai 1885] : « Le mieux persiste. Espérons qu’il se maintiendra et que sa forte constitution prendra le dessus. [...] En cas de malheur, il faut tout prévoir, le grand âge de Victor Hugo étant donné, je voudrais peindre sa tête. Je donnerais ce dernier portrait à votre fils [Georges Hugo]. Le service que je vous demande est de me donner un laissez passer qui me permette de m’installer dans sa chambre. Mais, qui sait ? Peut-être mourrai-je avant lui ! En tout cas je vous souhaite de tout cœur, de le conserver encore longtemps ». – 7 août 1884... « Rien ne pouvait me rendre plus heureux que d’avoir un objet, et surtout une plume, ayant appartenu à Victor Hugo ».
36 35 31 35. Alphonse de LAMARTINE (17901869). Manuscrit autographe, Autun ; 1 page grand in-4. 700 / 800 € Plan détaillé de discours pour le Conseil général de Saône-et-Loire, resté probablement inédit. Le plan, en partie rédigé, est écrit sur deux colonnes, et divisé en 4 parties. Il s’agit d’une réclamation d’Autun qui demande un cinquième conseiller. «Affaire qui demande deux choses de nous – la bonne foi – la prudence dans l’explication. – Jusqu’ici rien ne nous a divisés. Justes les uns envers les autres. L’unité du département a été notre esprit »... Après avoir examiné tous les aspects du problème, Lamartine conclut : « Que faut-il faire ? – déclarer que la prétention d’Autun n’est nullement fondée ? – Non. Ce serait une injustice. L’injustice est faible – la vérité de tous là : Oui Autun a droit arithmétique – son droit administratif est douteux. Disons-le. Mais disons ensemble tous : qu’il faut tenir en suspens notre décision – jusqu’à l’époque où le renouvellement &&. Ainsi justice au principe justice à Autun justice au département ».) Ancienne collection René Doumic (14 juin 1985, n° 81). 36. Alphonse de LAMARTINE (1790-1869). Portrait avec dédicace autographe signée, mars 1863 ; à vue 47,5 x 36,5 cm (encadré, quelques salissures). 200 / 300 € Portrait gravé par Gustave Levy (1819-1894) d’après Maurice Leloir (1853-1940), eau-forte sur Chine appliqué (33 x 26 cm), imprimée par Brebant. Dédicace: «Monsieur Eugène Fabrot / hommage et souvenir / Mars 1863. Al. de Lamartine ».
37 38 32 37. Pierre-Joseph PROUDHON (1809-1865). L.A.S., Paris 20 juillet 1854, à un poète ; 1 page in-8. 1 000 / 1 500 € Belle lettre à un poète. .....« Quoique peu amateur de vers, et encore moins connaisseur, je les goûte pourtant assez pour m’y montrer difficile, je devrais sûrement dire pointilleux » ; il remarque ainsi « une césure disgracieuse » dans deux vers du sonnet. Il félicite cependant le poète « de vous être débarrassé, ainsi que vous le dites, du fatras de préjugés qui pesait sur votre conscience. J’aime à croire que les lois de la justice, de la morale, ne vous en apparaîtront que plus belles, plus sublimes, plus sacrées. C’est le premier fruit de la liberté de conscience, de nous rendre immédiatement meilleurs, plus honnêtes, plus dignes, et surtout plus sûrs de notre propre vertu ». Il ajoute : « Je travaille [...] et vis tant que je suis solitaire. Cependant, si vous tenez à me voir, ce qui ne vous avancera guère, et ne peut que me faire perdre dans votre esprit, vous me trouverez d’ordinaire chez moi après sept heures du soir »... Cette belle lettre a été reproduite par L’Autographe en 1864. 38. Pierre REVERDY (1889-1960). L.A.S. « P.R. », [Solesmes 2 janvier 1954], à un ami anglais Fyfe Duthy ; 2 pages grand in-8, au dos d’une carte illustrée représentant une miniature des Riches Heures du Duc de Berry, enveloppe. 600 / 800 € Il fait allusion aux cochons représentés sur la miniature : « Enfin les voilà en train de croquer des perles. Je ne sais pas si je suis d’un côté ou de l’autre de la barricade. Peut-être des deux. Il y a aussi un chien, un porcher – et un assez beau paysage [...] Les cochons de ce temps là avaient des poils. On les a beaucoup civilisés depuis
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