AGUTTES - LIVRES & MANUSCRITS

258 258 MIRABEAU Gabriel-Honoré de Riquetti, comte de (1749-1791) L.A.S. « Mirabeau fils », [début 1776], à un ami ; 2 pages et quart in-4 (fente réparée, manque le bas du 2e feuillet sans perte de texte). Stratégie pour fléchir la sévérité de son père. Il prie son ami d’écrire à son père sans plus tarder, « car enfin il peut prendre un parti vis-à-vis du ministre, et avec toute sa feinte indifférence me faire arrêter. Le tems n’y fait rien ; il doit bien penser que je ne suis pas éloigné de la frontière ; et Pontarlier n’est qu’à une lieue ; ainsi vous êtes censé avoir tout le tems nécessaire pour m’avoir vu »… Mirabeau écrit ensuite le contenu de la lettre au marquis de Mirabeau que son ami devra copier et signer : « J’espère que vous ne regarderez pas comme une importunité les nouvelles supplications que j’ai l’honneur de vous adresser » ; sa démarche est dictée par l’amitié : « Certainement il n’est pour monsieur votre fils qu’un danger, c’est d’avoir aliéné votre cœur sans retour. Le secret dont il est chargé n’est absolument rien. Je me garderais bien, Monsieur le marquis, d’oser vous donner mes opinions en fait de procès […] mais les formes judicaires sont mon métier ». Les créanciers ne sont pas le plus inquiétant car « vous êtes son curateur et quelques embrouillées que puissent être ses affaires, votre prudence et votre habileté en viendront à bout. Les ordres du roi ne seront jamais accordés contre M. le comte de Mirabeau qu’à votre sollicitation. […] Un prisonnier est sous une garde. Sa détention n’est pas volontaire et s’il recouvre la liberté en s’échappant, il ne désobéit point, il use des moyens que lui suggère son adresse, ce n’étoit pas à lui à se garder ». Il n’y a que le courroux du marquis qui puisse être un véritable malheur pour son fils. Quant au rapport que ce dernier aurait envoyé au comte de SAINT-GERMAIN, c’est « évidemment le fruit d’un premier mouvement et d’une vive inquiétude ». Cette lettre n’est en aucun cas un reproche : « M. le Comte propose de se laver des imputations dont on pourroit le noircir. Il auroit beaucoup mieux fait sans doute de ne les point prévoir […] mais enfin, ce tort, qui est celui d’un jeune homme, auquel on avoit exagéré votre mécontentement et les projets de votre sévérité n’a pas mérité sa perte, et ne la lui attirera pas ». Que le marquis ne reste pas insensible à un fils qui ne cherche qu’à lui plaire et à soulager le chagrin qui oppresse sûrement son cœur : « Vous apercevrez que ne pas sauver votre fils en ce moment, c’est le perdre, que ne point le relever c’est le précipiter »… Mirabeau termine en priant son ami d’envoyer cette lettre le jour même… 1 200 - 1 500 € 259 MIRABEAU Gabriel-Honoré de Riquetti, comte de (1749-1791) L.A.S. « Gabriel », 23 février 1780, [à sa maîtresse Sophie MONNIER] ; 1 page oblong in-16, cachet de cire aux armes au verso (sur les replis) ; portrait gravé joint. Billet écrit du donjon de Vincennes : « Je t’envoie une lettre de DUPONT [de Nemours] que tu as pensé faire mourir de peur en lui adressant à l’hôtel de Mirabeau. Écris lui sous le couvert de M. Turgot ministre d’état en son Hôtel à Paris et sur la seconde enveloppe l’adresse de Dupont. Nous sommes raccommodés; ainsi fais lui ta jolie mine, que je baise bien fort jusqu’à la morsure inclusivement »… 400 - 500 € 260 MONTHOLON Charles-Tristan, comte de (1783-1853) 6 L.A. février 1809, [à Albine de VASSAL, baronne Daniel ROGER] ; 22 pages in-8. Correspondance passionnée du tout début de sa relation avec sa maîtresse et future femme, Albine de Vassal. [Albine était alors l’épouse d’un banquier genevois, le baron Roger. Roger demanda, et obtint, la séparation de corps en avril 1809 et le divorce en mai 1812 ; le mariage d’Albine avec Montholon le 2 juillet 1812, contraire aux vœux de l’Empereur, provoqua la disgrâce de l’officier, qui fut cependant plus tard un des fidèles compagnons d’exil de Napoléon.] Nous ne pouvons en faire ici que quelques brèves citations. « Je ne vis plus, ma tête s’egare, et j’ai peine à dissimuler le trouble qui m’agite. Pourquoi vous ai-je connu ? et qu’ai-je fait à Dieu pour m’accabler à ce point. – Quelle est ma démence c’est à vous que j’ecris Albine, à vous qui vivez pour un autre. Quelle cruelle idée ! Et combien je serais heureux de donner ma vie pour ne pas la concevoir – pourquoi ne pas me l’avoir caché, j’ai dissimulé, vous avez plongé le poignard dans mon ame, je vous adore Albine, et sans vous l’univers est nul à mes yeux. Ayez pitié de moi, ne cédez que si votre cœur vous l’ordonne »... – « Quelques soient les circonstances qui puissent arriver, quelque soit le service qu’il faille vous rendre, comptez sur moi à la vie et à la mort. Ce n’est pas comme amant que je fais ce serment, c’est comme votre ami votre meilleur ami. Si vous croyez que l’honneur de votre mari ne porte que sur moi, je serai quelque temps sans vous voir [...]. Je ne suis point jaloux du sentiment que vous avez pour lui, s’il n’est égal qu’au sien, un tel amour serait trop loin du mien »... – « Soyez franche mon amie, le coup sera affreux pour moi, peut-être ne le supporterai-je pas ? Mais je préfère le suplice le plus abominable à l’idée de ne pas vous voir partager ma tendresse »... – « Je suis triste […] Jamais je ne vous ai tant aimé ! Chaque heure qui s’écoule loin de vous me parait un siècle de regrets. Albine, oh non, je ne puis vivre sans vous »… – « Je deviens tout à fait fou, j’en suis deja à ne plus pouvoir lier deux idées. L’immense quantité de projets que m’offre mon imagination, augmente chaque jour mon délire »... – « Ô mon Dieu que je suis malheureux ! Mon imagination se livre aux plus affreuses chimères et je ne le vois que trop chaque jour, il n’y a plus dans ce monde de bonheur pour moi »... 600 - 800 € Autographes & Manuscrits - Livres • 5 décembre 2025 77

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