125 Autographes & Manuscrits • 10 juillet 2025 se plaint beaucoup de la saison. On craint que les orangers ne fleurissent. Il fait chaud comme en été. Pas un nuage au ciel, pas une ride sur la mer. J’espère que vous êtes dans la neige fondue. […] malgré tout ce que le ciel fait pour moi, je sens mon coeur palpiter comme il faisait dans ma jeunesse, avec cette particularité que souvent il me coupe le respirant, et me fait croire que je suis dans le cas (expression napoléonienne) d’aller voir les sombres bords. Aussi je compte laisser mes très honorables collègues discuter l’adresse sans moi. Je mets au cabinet le discours que j’avais préparé pour notre S. P. le Pape et je ne m’applique plus qu’à soigner mon cœur et mes poumons ». Il parle de Victor COUSIN « qui est un trésor en ce pays de province, pour la quantité d’idées qu’il remue dans un quart d’heure. Il essaye de se guérir d’une laryngite en donnant des séances d’éloquence de quatre heures sans débrider aux Cannais. L’autre jour à dîner chez nous, mangeant une pomme de terre il cassa son ratelier. Nous n’avons ici qu’un dentiste qui demeure dans une charrette à deux pas de chez moi, et qui est en même temps renommé pour ôter les cors, couper les chats et tondre les chiens. Cependant il a fait preuve de grande philosophie et il parle toujours aussi bien avec ce qui lui reste de mâchoire ». Suit une longue liste de corrections pour les épreuves de la Correspondance de Napoléon Ier. Il ajoute pour finir : « Les anémones commencent à se montrer mais on ne connaît pas encore les bleues des rouges »… On joint une petite L.A.S., mercredi soir [1854], à propos de volumes illustrés (1 p. in-8). 500 - 700 € 673 MÉRIMÉE Prosper (1803-1870). L.A.S. « Pr.M. », Cannes dimanche [29 mai 1870, à la comtesse de BEAULAINCOURT] ; 4 pages in-8. Mérimée va partir pour Paris. Mme de Montebello est « aussi mal que possible », le général de Goyon est « bien duement mort »... Sur la politique et le fractionnement des partis : « C’est un symptôme qu’on ne gouverne pas et qu’on n’a pas de confiance. Ce n’est pas la confiance qui paraît faire défaut à M. Émile OLLIVIER. Je doute qu’il se rende bien compte de ce qu’il fait. Il a besoin de faire quelque chose et n’y regarde pas de trop près ».. À propos des touristes anglais assassinés à Marathon : « Lorsque j’étais en Grèce il n’y avait pas de voleurs ou plutôt ils ne travaillaient pas de leur métier, car dans ce pays on est toujours voleur, mais on cumule avec d’autres professions. Le général Grivas mon ami par exemple était alternativement ministre de la guerre et capitaine de voleurs, assez bon diable dans ce double emploi »... Correspondance générale, t. XV, n° 4760. On joint 6 L.A.S. de Jules MASSENET, Égreville juin-juillet 1900, à sa fille Juliette et son gendre Léon Bessand, sur sa vie à la campagne, et sur Le Cid. 400 - 500 € 674 MÉRIMÉE Prosper (1803-1870). L.A.S. « Pr M », Cannes 13 septembre [1870, à la comtesse de BEAULAINCOURT] ; 2 pages et demie in-8. Une des toutes dernières lettres de Mérimée, après la capitulation de Sedan et quelques jours avant sa mort. [Mérimée meurt le 23 septembre (on ne connait que 3 lettres postérieures à cette date).] « Connaissez-vous dans l’histoire une catastrophe plus soudaine et plus épouvantable ! Quel désastre qu’eût pu rêver l’imagination la plus noire, a été dépassé par la réalité. Je croyais que l’Empr se ferait tuer. Les boulets à ce qu’il paraît n’ont pas voulu de lui et il a été remettre son épée au roi. Et cette révolution qui se bâcle en cinq minutes, non plus dans une assemblée cette fois, mais dans un corridor, et ce gouvt qui n’a pas d’origine, pas de cohésion, qui n’a que deux hommes éloquents, sans habitude des affaires, et un certain nombre de doublures, vieilleries ridicules à leur parti même. Qu’attendre de tout cela ? Observez encore, Madame, que nous n’en sommes qu’à un prologue. La tragédie va commencer pour nous après la paix. Vous représentez-vous la force d’un gouvernement qui aura signé un traité avec M. de Bismark, et cela lorsque toute la nation est en armes comme aujourd’hui. Il faudrait des hommes à ce pauvre pays ». Il est triste de n’avoir pu dire adieu à l’Impératrice, « à qui l’adversité avait ajouté une auréole. Elle en avait une la dernière fois que je l’ai vue. Elle n’avait plus la moindre illusion et disait que ce qu’elle désirait par dessus tout pour son fils, c’était une vie heureuse et sans ambition. J’ai toute ma vie cherché à être dégagé de préjugés, à être citoyen du monde avant d’être Français, mais tous ces manteaux philosophiques ne servent à rien. Je saigne aujourd’hui des blessures de ces imbéciles de Français, je pleure de leurs humiliations, et, quelque ingrats et absurdes qu’ils soient je les aime toujours »… Correspondance générale, t. XV, n° 4804. 600 - 800 € 674 673
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