AGUTTES . Vente Judiciaire, Aristophil

154 750 VIGNY Alfred de (1797-1863). L.A.S. « Alfred de Vigny », Paris 5 avril 1856, à l’abbé Évariste HUC ; 4 pages in-8 (petites taches). Belle lettre de Vigny blessé au missionnaire. [L’abbé Évariste Huc (1813-1860) était revenu de ses missions en Chine, en Tartarie et au Tibet, auxquels il avait consacré trois ouvrages.] Vigny, convalescent, prie l’abbé de venir le voir : « vous aurez une trop belle occasion de me donner quelque chose des conversations que j’ai perdues car depuis le 10 mars, j’ai été retenu chez moi d’abord au lit puis à présent sur une chaise longue par une blessure qui n’a pas été sans gravité et sans douleur. Un cheval emporté et une voiture d’où je descendais ont failli me tuer, mais se sont contentés pourtant de me tordre le pied. Je leur sais très bon gré de ces ménagemens qui me permettront de vous revoir et de vous dire comme à la Sultane : “contez-moi de ces beaux contes que vous contez si bien”. Je n’ai pas besoin d’ajouter : si vous ne dormez pas car je ne suppose pas que l’on dorme, la douleur m’en ayant fait perdre la coutume depuis un mois. En ce moment à 1 h. après minuit il me serait fort agréable de vous recevoir mais comme je sais que cela n’est guère dans vos habitudes, je vous prie de vous souvenir de moi dans vos voyages de jour depuis 3 h. après midi jusqu’à 7 h. du soir, tous les jours vous me trouverez, heureux de vous revoir, couché et surpris dans l’attitude de Philoctète mais faisant moins d’imprécations »... 300 - 400 € 751 VIGNY Alfred de (1797-1863). 7 L.A.S. « Alfred de Vigny », Paris 1852-1858, à Mme DROUYN DE LHUYS ; 32 pages in8. Très belle correspondance à la femme du diplomate et ministre. 2 mai 1852, après le décès de la tante de sa correspondante. Il la remercie « d’avoir bien voulu remplir la promesse de Mme la Bnne de Franca. Il me sera doublement précieux de tenir de vous et d’elle ce recueil d’une personne qui brilla dans un temps qui n’est déjà plus le notre et dont la beauté nous laissera pourtant un souvenir toujours jeune par ses portraits, comme son esprit facile par des ouvrages tout-à-la fois sages et passionnés ». Il conseille à leur jeune amie retirée du monde de « toujours relire Antigone ». Ce décès l’a séparé trop tôt de ces rares et précieux entretiens, et il souhaite renouer avec son correspondante de tels liens : « c’est un échange d’idées et de nobles sentimens trop peu cherchés, trop peu rencontrés »… 10 août 1854. Il regrette vivement son absence lors de sa dernière visite : elle en aura des « regrets éternels quand vous saurez que j’avais transmis votre requête à une table tournante de ma connaissance qui avait appelé Roméo et il venait avec moi vous dire des nouvelles de Juliette qui ne me paraît point trop malheureuse où elle est, d’après le récit qu’il m’en a fait à l’oreille ». Quand reviendra-t-il ? Il ne peut répondre, « ces pauvres jeunes Esprits ont leurs caprices indépendans des nôtres, ils sont si jolis qu’ils se suffisent et ne viennent guères l’un sans l’autre ». Il lui demande des nouvelles de cette « bien jolie vivante qui, toute enfermée qu’elle est dans un grand château, comme la Belle-au-bois-dormant, écrit de là, les plus spirituelles lettres du monde »… 1855. 16 janvier. Il lui fait parvenir des petits livres « qui ne sont pas tout à fait des livres de messe, mais qui y ressemblent peutêtre par quelques pages ». Il n’entre pas chez elle, « puisque je n’ai pas mes pistolets sur moi et que je ne pourrais pas tuer vos gens, aujourd’hui, comme il est nécessaire de le faire pour entrer et comme cela est convenu ». Il n’a pas joint Cinq-Mars à tous « les anges, les saintes et les martyrs », car il est en réimpression et il lui enverra avec un autre livre « de la même main et que vous ne connaissez peut-être pas ». Il s’intéresse beaucoup à la Chine, aux Chinois, et au « courageux missionnaire » dont il lit l’ouvrage … 25 février. Il lui envoie « tous les mandarins de Mr l’abbé Huc avec leurs éventails, leurs parasols, leurs dragons, leurs belles révérences, leurs femmes aux pieds de chèvre et leur singulière sagesse ». Il a croisé à l’Institut ce missionnaire, « occupé de nouveaux travaux et ravi d’avoir surpris une correspondance entre la Reine Marguerite femme de St Louis et un jeune Chinois chrétien, déjà chrétien en 1230 ! »… 15 juillet, au sujet de la démission de DROUYN DE LHUYS du gouvernement. Vigny mène « une vie d’ermite où l’on a toujours un capuchon sur les yeux. J’ignore donc encore les causes de cette retraite si imprévue et si regrettable pour ceux qui réfléchissent au vide que doit laisser partout un esprit aussi rare que celui qui vient de quitter les affaires extérieures de l’Empire ». Cela lui apparaît « comme la date d’une phase nouvelle dans les événemens Européens », et il a été vivement ému d’une si prompte décision… Il prie son amie de prier jeudi pour « notre bon missionnaire chinois » qu’il avait réussi à sortir des ténèbres, pour qui il va se battre (pour lui obtenir le prix Montyon) : « Le jour est pris pour une seconde bataille où je vais encore rompre plus d’une lance pour lui contre des mandarins Français plus sévères que ceux de l’Empire du Milieu. […] je me sentirai muni de tous les argumens qui doivent entrainer l’Académie Française à rendre une solemnelle justice à l’un de ces bons prêtres qui s’exposent au martyre pour apprendre à ces pauvres vieux enfans de l’Orient que leurs mères et leurs sœurs ont une âme ; chose qu’ils ne veulent pas croire encore »… 23 juillet 1857. Il avait signalé à son époux « la douloureuse et intolérable vie de l’un des soldats de l’armée de la Diplomatie moins riche que les soldats de l’armée à qui leur solde suffit pour vivre ». Il est désolé de l’insistance de la jeune femme du pauvre diplomate, mais reste ému par son désespoir... Il espère leur rendre bientôt visite à leur belle campagne d’Amblainvilliers dès que possible… 1er février 1858. Il regrette de ne pouvoir venir passer « une heure aussi aimable que celle que l’on passe chez vous » … 1 200 - 1 500 € 750 751

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