20 196 LA FRESNAYE Roger de (1885-1925). L.A.S. « R de la Fresnaye, Jeudi soir [vers 1911-1912], à « cher enfant » [son cousin Georges de MIRÉ ?] ; 3 pages et demie in-8. Très belle lettre illustrée de trois petits dessins, sur les débuts du cubisme. « Gentille, à la vérité, était, cher enfant, ta lettre, et comme moi aussi je suis gentil, je ne demande pas mieux que de t’écrire bien vite ; et je le fais à la brasserie du Coq [dessin d’un coq] sur la place du Trocadéro [dessin du palais du Trocadéro] avec devant moi, un petit verre [dessin d’un verre sur une table de bistrot]de chartreuse jaune »... Il raconte une soirée chez Charlotte GARDELLE (peintre, 18791953), qui « s’est prolongée jusqu’à 6 h. du matin ; j’ai goûté à l’opium (à autre chose aussi, et même je le préfère de beaucoup) et j’ai bu d’un thé extraordinaire que rapportent de Chine les officiers de marine, et qui sent les fleurs. Charlotte est une femme aimable, belle et parfumée. J’avais un vif plaisir à la serrer sur un cœur qui ne cessait pas cependant d’appartenir à la gentille amie que tu connais, et je commence à croire que la polygamie est naturelle à l’homme. Il y a un an, une telle idée m’eût révolté. Maintenant je ne sais trop si le mariage même me l’enlèverait ». Puis il évoque une « grande conjuration […] tout le monde démissionne du monument Rousseau [Douanier ROUSSEAU] et laisse DELAUNAY seul, sur l’ordre de LE FAUCONNIER, qui dévoile les machinations ignobles, les combinaisons illicites. Moi je m’en fous, mais je serai bien obligé de démissionner aussi, d’autant que Delaunay m’est bien antipathique. Hier et aujourd’hui j’ai travaillé un peu à mon tableau de l’artillerie, et cela commence à aller [La Fresnaye peignit deux versions successives de L’Artillerie, en 1911 et 1912, toutes deux dans le style cubiste]. Ce soir j’ai vu en passant chez KAHNWEILER, une nature morte de PICASSO que j’ai trouvée fort bien, vraiment très jolie, quoiqu’on ne voie pas du tout ce que ça représente. Mais c’est très bien fait, très bien peint, très fini. »… 800 - 1 000 € 197 LAMI Eugène (1800-1890). 70 L.A.S. « Eug. Lami » ou « Eugène », Paris, Londres, etc., 1823-1857, à Charles SAUVAGEOT ; environ 80 pages, la plupart in-8, nombreuses adresses, cachets de cire rouge. Correspondance amicale au fameux collectionneur. Charles SAUVAGEOT (1781-1860), fonctionnaire des Douanes, violoniste et collectionneur, que Lami appelle son « cher docteur », ou son « bon petit docteur », a servi de modèle au Cousin Pons de Balzac. Nombreuses invitations à dîner ou à des parties de campagne avec son frère Ernest Lami de Nozan, pour visiter son atelier, y voir ses tableaux et prendre le thé où il réunit des amis (notamment en compagnie du portrait de Mademoiselle Clairon). Une lettre d’une écriture appliquée et contrefaite vante à « Son Altesse Royale Monseigneur Sauvageot » les mérites de la lithographie, « une découverte qui mérite les plus grands encouragements de la part de Votre Altesse puisque l’on peut tirer d’un seul dessin 30,000 exemplaires sans que la planche soit altérée et qu’un peintre peut se passer d’un graveur »…Il veut lui présenter un ami : « il est fort amateur d’art, des trésors du moyen âge et n’est pas éloigné de la pornographie. Voilà bien des titres pour un bon accueil de votre part ». Il se fait l’écho de la vie parisienne, de ses spectacles : le ballet Giselle, l’opéra Don Juan de Mozart, avec la Sontag, Le Vétéran, La Reine de Chypre, les chevaux du cirque Franconi ; et de la vie mondaine : bals chez Duponchel ou la baronne Sellières pour lesquels il demande à Sauvageot de lui prêter « un joli poignard car ma grande diable d’épée gêne tout le monde et relève tous les cotillons ». Il lui emprunte aussi des livres, lui fait livrer un tapis turc, et cultive son goût pour les antiquités. En 1838, il visite les châteaux de la Loire, dont Chambord, « cet immense palais qui s’écroule petit à petit » et dont il rapporte des lithographies. De 1848 à 1851, il est en exil en Angleterre, où il a suivi la famille d’Orléans : « Nous vivotons ici avec Al. Dedreux, Gavarni, Montfort, &c. en vrais français que nous sommes nous avons grand peine à nous faire à l’ennui et à la monotonie de ce pays-ci » (16 avril 1848). Il invite Sauvageot à venir voir les trésors de l’abbaye de Westminster. En 1853, il ouvre son nouvel atelier et demande au collectionneur de lui prêter son portrait d’Henriquel. En janvier 1854, il est à Nice pour porter à Anatole DEMIDOFF un ouvrage sur lequel il travaille depuis 3 ans [il s’agit de son tableau Bal de l’Opéra], puis se rend à Florence pour des travaux dans sa villa ; il en profite pour visiter l’Italie du Nord, malgré la chaleur et le choléra, et est ébloui par « la richesse des monuments »… Etc. On joint une L.A.S., d’Arthur de Nozan, neveu de Lami, à Sauvageot, le remerciant pour l’envoi de son portrait (1852) et une lettre de femme.. 1 000 - 1 200 €
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