31 Lettres, manuscrits, autographes, livres & photographies • 10 octobre 2023 LOT DESCRIPTIF ESTIMATION (€) 73 GOUNOD Charles (1818 - 1893). L.A.S. « Charles Gounod », Vienne 17 août 1842, à Jean-Dominique INGRES ; 3 pages et demiein-8 avec adresse. Très belle et longue lettre du jeune compositeur au peintre Ingres, unis dans l’amour de la musique de Beethoven. Gounod est allé en pèlerinage sur le tombeau « de l’Immortel BEETHOVEN […] vous savez avec quel culte je prononçais ce nom à Rome […] Je ne sais quelle impérieuse influence l’idée de Beethoven a toujours exercée sur moi, mais je ne puis m’y soustraire ; il me tient, et je l’aime comme on aime le Soleil : or, on n’a qu’une manière d’aimer son soleil, parce que l’on en a qu’un. Oui je crois toujours que Beethoven est l’Astre le plus beau le plus splendide que le firmament musical ait encore vu luire. […] Ici, à Vienne, où cet homme sublime a tant vécu, où chacun sait encore et peut vous montrer les promenades qu’il fréquentait, je recueille avec avidité le moindre mot que j’en puis entendre dire. Quoique l’état actuel de la musique à Vienne souffre aussi de la gangrène de l’Italie, cependant le nom de Beethoven s’y prononce encore avec une solennité qui vous va droit au cœur, et on se sent tout ému et une bonne grosse envie de pleurer comme un enfant, en voyant que le souvenir au moins conserve l’empreinte de cette majesté que la marche momentanée de l’Art a malheureusement désavouée. Pour moi le soutien le plus fort en musique c’est lui : c’est toujours à lui que je pense et je l’aime avec un amour infini. Je me fais raconter ici les moindres détails de sa vie […] si bizarre, si inquiète, si capricieuse […] Si comme forme d’art il s’est élevé à des hauteurs immenses cette infatigable et errante méditation qui fait la Base et on peut dire l’Abime infini de ses œuvres n’est elle pas là dans cette vie agitée, nomade, qu’il menait à Vienne et autour de Vienne ? »… On peut rire de lui, mais moi je suis heureux de cette tendresse fanatique pour le moindre trait qui touche à Beethoven […] je sais si bien votre chaleureuse et intelligente admiration pour ce géant de le musique que je vous associais en pensée » devant sa tombe, qu’il décrit, ainsi que la pauvre tombe de SCHUBERT… « Moi pauvre aspirant en fait de gloire, j’ai aussi cueilli un souvenir de Schubert : mais c’est pour moi : je ne vous envoie, cher Monsieur Ingres, qu’un brin d’herbe pris à Beethoven. […] j’ai donc pu malgré ma profonde et unique vénération pour l’Empereur de toute les musiques, m’incliner aussi avec respect devant le Roi de la Ballade et des chansons : c’est une petite province, mais il en était le n°I, et jusqu’à présent il conserve cette suprématie »… Est jointe une enveloppe contenant une feuille séchée, avec l’inscription : « Feuille cueillie sur le tombeau de Beethoven par Ch. Gounod le 16 Août 1842 ». 600 - 800
RkJQdWJsaXNoZXIy NjUxNw==