…. Je vous serai tout à fait reconnaissante de vouloir bien me donner des nouvelles de mon fils Antonin Artaud. Il y a déjà longtemps qu’il ne m’a pas écrit et j’ai peur qu’il ne soit malade. D’autre part je serais si heureuse si vous voulez bien me donner votre diagnostic sur son état mental. A votre avis pourrais je avoir l’espoir de voir un jour sinon sa guérison complète tout au moins une certaine amélioration où il pourrait jouir d’une certaine liberté. Je suis tout à fait navrée de vous importuner avec mon fils mais ce dernier ne veut absolument plus s’appeler Artaud ; Il me prie et me supplie dans toutes ses lettres de lui écrire dorénavant sous le nom de Nalpas. Dois-je abonder dans son sens ? … Ferdière répond à Euphrasie Artaud sur une lettre qu’elle lui a envoyée : Madame j’ai le regret de vous apprendre que je ne partage malheureusement pas votre optimisme au sujet de la guérison de M. Artaud, le pronostic de sa maladie reste grave. On pourra tenter peut-être tenter un jour une sortie d’essai mais on ne peut pas espérer de faire disparaître complètement ses hallucinations et ses idées délirantes. …Très déprimée par la mort de mon fils Antonin Artaud je n’ai pu comme j’aurais désiré vous écrire plus tôt. Je sais quoi qu’en pensent certains qu’une très sensible amélioration s’était produite dans l’état de mon fils au moment de son séjour dans votre établissement et je tiens à vous exprimer ma gratitude pour les soins dont vous l’avez entouré alors. Malheureusement rendu trop vite à une vie qui n’était plus faite pour lui et étant retourné dans un milieu qui lui était néfaste il ne pouvait que revenir à ses erreurs passées. 1 000/1 500 € 31 ARTAUD Antonin. LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE au docteur FERDIÈRE. Rodez, Circa 1943. 8 pages in-8 à l’encre sur papier de couleur. Lettre extraordinaire de Rodez où Artaud était interné au docteur Ferdière :… J’ai compris cher Monsieur Ferdière la raison de votre mécontentement à mon égard mais je voudrais avant que l’irrémédiable ne soit accompli m’adresser une dernière fois à votre cœur afin de retrouver en vous l’ami qui m’a aidé et fait venir ici et non le médecin d’une administration qui est cause de mon supplice depuis sept ans... j’ai toujours voulu vous entrainer dans ma sphère poétique propre mais j’ai vu que vous ne vouliez pas y croire et c’est ce qui m’a fermé le cœur. Les états mystiques du poète ne sont pas du délire docteur Ferdière ils sont la base de sa poésie. Me traiter en délirant c’est nier la valeur poétique de la souffrance qui depuis l’âge de quinze ans bout en moi devant les merveilles du monde de l’esprit que l’être de la vie réelle ne peut jamais réaliser. Et c’est de cette souffrance admirable de l’être que j’écris mes poèmes et mes chants. Comment ce que vous aimez dans mon œuvre ne parvenez-vous à l’aimer dans le personnage que je suis. 3 000/4 000 € 19 31
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