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Très belle lettre de quatre pages à Green, entièrement relative à Minuit , « … ce château de Pandore qui est aussi une sorte de Paradis retrouvé et qui contient tout… » et, au même, émouvante missive annonçant la mort de sa mère et relatant ses derniers moments (« … une tête qui s’appuie contre la vôtre, un front dont la sueur se mêle à vos larmes, une main qui presse… la vôtre, des yeux qui vous regardent encore pr vous dire adieu… ». Avec Robert de Saint-Jean, Lucien Daudet se conﬁe sans retenue, parle de ses amis, de ses lectures : « … j’ai relu Bouvard et Péruchet … et ça me fait l’effet de ces dessins si atroces et si attachants qu’on a publiés de certains fous. La beauté de la chose c’est qu’ il dit sans cesse ‘J’en crèverai’ et que ce tricot de maniaque l’a en effet tué… Avez-vous lu des lettres [de] Proust à Mme Straus , d’une bêtise ? Et naïveté aussi des héritiers. (Celle où il vante la supériorité de l’amour platonique)… Je ne peux plus, ne peux plus, ne peux plus, lire même le nom de Proust. Tous les mensonges à son sujet… des erreurs de ‘Règne’ comme si on confondait un coléoptère avec un poisson, c’est insupportable… », etc. Le Tour d’ échec , de Henry James, est selon Daudet « … un des rares livres qui fassent peur, et J, [ulien] G. [reen] est un des seuls écrivains qui ait le sentiment de la gêne – peur ou de la peur-gêne et sache le rendre… ». Et à nouveau à propos de Proust : « … j’ai l’ horreur de cette Antoine Bibesco. Ses jugements de Proust sont toujours mensongers, intéressés, désolants et vils. Il ne faut pas oublier que la bassesse fait partie de son génie… », etc.

QU ’ IL Y A PRESQUE TOUJOURS UN MONDE DANS LA MOINDRE DE VOS PHRASES … »

C’est avec un battement de cœur qu’elle a lu Adrienne Mesurat , car elle est une admiratrice fervente de Mont-Cinère (roman qu’elle proposa avec enthousiasme pour le Prix Femina , ainsi qu’elle l’écrit à Green dans sa lettre du 30 mars 1929, ici présente) : « … J’ai retrouvé votre magie grise et toutes les nuances et toute l’ horreur du refoulement que vous savez traiter comme personne au monde… ». Quelques années plus tard, elle réclame à Julien Green un exemplaire de Léviathan et lui propose sa traductrice américaine qui « … a le sens du style français et de sa transposition… Je le sais pertinemment, car je lis l’anglais comme le français… ». La lecture de Léviathan l’a bouleversée : « … votre style… votre psychologie… votre mystère au détail. Mais votre cruauté me fait mal. Vos livres concaves laissent l’ impression qu’on vient d’avoir un malheur dans sa propre vie… Je voudrais, ne fût-ce qu’une fois, voir s’ouvrir une lézarde de jour dans un de vos romans… Si cela vous intéresse, je vous enverrai mon dernier livre… mais je pense que vous ne devez pas aimer ma littérature. Je trouverais cela très naturel… ». Enﬁn, en 1932, après avoir lu Epaves , « … un de vos plus beaux livres… », elle qualiﬁe Green d’ « … écrivain unique. Parmi tous les admirateurs que vous avez, il n’en est pas qui vous apprécient plus que moi. Merci, merci… »