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Ferdinand, duc d’ORLÉANS
(1810-1842) fils aîné de Louis-Philippe. L.A.S., Lyon 7 décembre [1831] à 10 heures du
matin, à son père Louis-Philippe ; 4 pages in-4.
800/1.000
Importante lettre à son père sur la situation à Lyon après la révolte des canuts, et l’entrée dans la ville, le
3 décembre, du duc d’Orléans et du maréchal Soult.
Ils travaillent sans relâche à aplanir les difficultés, notamment l’existence d’un tarif reconnu et sanctionné par la chambre
de commerce et les autorités municipales et départementales : le conseil des prudhommes étant appelé à statuer sur le prix
de la main-d’œuvre, le maréchal rappellera que tout tarif est attentatoire à la liberté du commerce, et ils poursuivront leurs
négociations avec les « notables commerçans », assistés par Gasparin, dont Ferdinand recommande la titularisation comme
préfet. Déjà, en attendant la police de Paris, M. Gasparin a su en organiser une « qui nous rend de grands services, déjà il est
en marché pour l’achat d’un journal & peut-être de deux ; déjà il suit avec ardeur le désarmement, qui n’éprouve de difficulté
que dans le quartier de la Grande Côte ; & il tient la main à ce que l’expulsion des étrangers, soit par mesure de police soit
en les enrôlant pour Alger ne souffre point de retour »… Cependant « la panique générale » incite aussi les familles aisées à
émigrer, et le procureur général a confié « ses terreurs » ; peut-être faudra-t-il changer ce dernier car il est « mou comme une
chiffe »… Il faudrait attendre le 20 pour réduire la garnison, sauf à faire partir deux bataillons presque entièrement composés
de Lyonnais ; le général Roguet restera jusqu’au 20 et le général Hulot commandera la division, ayant sous ses ordres les
généraux Varlet, Voirol, Dejean, Doguereau et Fleury, et comme chef d’état-major, le colonel Aupick, « un homme fort sûr »…
Ils prendront des mesures préventives aux postes de la Croix Rousse, aux casernes et à l’arsenal ; Ferdinand se félicite de
l’heureux effet produit par la distribution de croix et la gratification extraordinaire aux troupes. Cependant le nombre de
morts est plus élevé qu’on ne l’a cru : « il y en a beaucoup qui ont été jettés au Rhône, & dont on ne pourra jamais retrouver le
cadavre. D’autres au contraire qu’on avait cru morts, sont chez des habitans honnêtes, qui les font traiter de leurs blessures ».
Quant à la Garde nationale, sur les 24 officiers et canonniers qui servaient dans la batterie de la place des Bernardines, « 5 ont
été tués & 17 blessés, dont 2 sont morts […]. J’aurai encore de nouveaux détails à ce sujet, après avoir visité l’hôpital, où j’irai ce
matin ; mais où j’ai opiniâtrement refusé de me rendre jusqu’on eût séparé les blessés révoltés, des blessés militaires que seuls
je voulais voir & consoler. Et il est d’autant plus nécessaire d’encourager ces derniers, qu’ils voyent journellement sous leurs
yeux distribuer de larges secours aux ouvriers blessés ; qu’ils voyent la peur arracher à l’avarice des sommes considérables
qui sont toutes consacrées, aux révoltés qui se trouvent à l’hôpital ; & dont les souscripteurs n’ont pas songé à donner un sou
aux soldats qui ont versé leur sang pour défendre leurs propriétés attaquées par ceux qu’on secourt aujourd’hui »… Il quittera
Lyon le lendemain pour rentrer à Paris, en passant par Saint-Étienne…
On joint un billet a.s. « De Chartres » à Marcilly (il était alors élève au Lycée Henri IV).
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