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que les manigances de nos épiciers et de nos bouchers ». Mais son potager est « envahi par les taupes & les surmulots »,
et dévasté comme les champs de bataille…. « & voilà dix mois que cela dure, & nul ne peut dire quand cela finira. Que
ne puis-je combattre près de vous ? J’ai 69 ans, je suis un vieil homme très usé. L’espérance de démolir quelques-uns
des atroces chenapans qui souillent notre France m’est refusée. Que me reste-t-il alors ? Faire de beaux livres, me
dites-vous ? Qui les lirait ? Ma
Jeanne d’Arc & l’Allemagne
ne se vend pas. Nos héros s’entraînent en dévorant
Les
Trois Mousquetaires
ou
Le Comte de Monte-Cristo
. Quelques intellectuels s’arrachent Barrès ou Aristide Bruant.
Il y a même des artilleurs qui ont emporté du Bergson & je connais un avocat intrépide qui avait fourré dans son
sac deux ou trois volumes de Nietzsche. Qui pourrais-je intéresser ne sachant parler que de Dieu ? »… Il dénonce
vigoureusement les atrocités allemandes… « J’ai parlé tout à l’heure de la guerre & j’ai honte d’avoir écrit ce mot. La
vérité qu’il faudrait crier partout, c’est que nous ne sommes pas en guerre. Nous défendons comme nous le pouvons
notre sol, nos villes, nos demeures, nos femmes & nos enfants, contre la plus gigantesque entreprise de cambriolage &
d’assassinat qu’on ait jamais vue »… Etc.
261.
Léon BLOY
. 4 P.A., [1915-1917] ; 5 pages in‑8 et 2 pages in‑12.
300/400
[
Novembre 1915
], minute de lettre au propriétaire du 7 rue André Theuriet à Bourg-la-Reine (au dos du prière
d’insérer de
Sueur de sang
) : « J’ai l’honneur de vous informer que j’ai visité ce matin le pavillon précédemment occupé
par mon confrère & ami Charles
Péguy
& que je suis disposé à le louer »…
[
24 mars 1916
], minute de lettre à l’abbé
Rivière
(vicaire à Bourg-la-Reine), publiée dans
La Porte des Humbles
,
au sujet d’une jeune Danoise protestante qui « a décidé de prononcer son abjuration aspirant de toute son âme à
devenir catholique. Attirée chez nous par la bonté de ma femme, danoise elle-même & convertie avant de m’épouser,
instruite par elle & par ma fille aînée, son âme s’est ouverte généreusement à la grâce et maintenant elle est tout à fait
conquise. […] Les conversions ou abjurations ont été fréquentes dans notre maison. Il est connu que notre contact est
dangereux à cet égard. La personne dont je vous parle risque de tout perdre, parents & amis, en se donnant à l’Église.
Elle le sait et y consent avec joie »…
Projet de titre calligraphié au crayon des
Méditations d’un Solitaire
, et projets de dédicaces pour
La Chevalière
de la Mort
,
Mon Journal
et
Vie de Mélanie
 ; au dos, liste de livres (dont
La Guerre des mondes
de Wells). Brouillon
pour le début de la 2
e
des
Méditations
.
262.
Léon BLOY
.
Manuscrit
autographe, [1917]
; 1 page in‑8 avec ratures et corrections.
300/400
Brouillon de la
dédicace à Vincent d’Indy de
C
onstantinople et
B
yzance
(G. Crès, 1917). « À Vincent d’Indy.
C’est saint Christophe qui me donne l’audace de vous dédier mon livre. On m’assure que vous aimez d’une affection
particulière cet admirable géant martyr. Un si merveilleux attrait est une sorte de lien entre nous. Autrefois quand il me
fallait quitter mes livres pour aller au-devant des humiliations, je regardais avec confiance une image du porte-Christ
en me souvenant du viel adage : Christophorum videas, postea tutus eas & j’étais fortifié pour souffrir. Aujourd’hui
devenu vieux je consulte encore S. Christophe avant d’aller au-devant du Christ lui-même en passant la mer ténébreuse
où j’espère vous avoir pour compagnon »…
On joint
une L.A. (minute) à Vincent d’
Indy
, le priant de bien vouloir renouveler la bourse pour ses filles, et
espérant qu’il a reçu
L’Invendable
(1908, 1 p. in‑12), plus une enveloppe autogr. à d’Indy à la Schola Cantorum.
263.
Léon BLOY
.
Manuscrit
autographe,
Dans les Ténèbres
, [1917] ; 1 page in‑8 et 14 pages et quart petit in‑4
remplies d’une minuscule écriture.
5.000/7.000
Manuscrit de travail du dernier livre de Léon Bloy, publié après sa mort
.
C’est le 10 juillet 1917 que Léon Bloy commence à écrire ce qui sera son dernier ouvrage : « Pour combattre
l’horrible ennui, j’entreprends un nouveau travail, genre
Méditations
, sujet :
Le Mépris
, envisagé comme le suprême
refuge ». Il termine le 15 octobre le chapitre XXI, qui sera le dernier, car il tombe malade et meurt le 5 novembre.
Dans les Ténèbres
paraîtra à titre posthume, en 1918, au Mercure de France, avec une préface de Mme Léon Bloy, qui
en a préparé l’édition. Il s’agit d’un recueil de méditations de Bloy, reliées entre elles par la pensée de l’imminence de
sa propre mort (et sa consolation suprême), et par des réflexions tantôt douloureuses, tantôt scandalisées, sur divers
aspects de la Guerre : les faux prophètes, le massacre, le désespoir, les nouvelles techniques, le « désastre intellectuel »
(représenté tout particulièrement par
Le Feu
de Barbusse), les profiteurs, etc.
Ce
manuscrit de premier jet et de travail
est écrit à l’encre noire, d’une très petite écriture serrée, mais très
lisible, qui remplit toute la page, à l’exception d’une marge lignée au crayon bleu. Le manuscrit est soigneusement
paginé au crayon bleu [1]-16. Il présente de nombreuses ratures et corrections, avec des additions dans les marges
appelées par des signes au crayon bleu ou rouge. Il présente de
nombreuses variantes
avec le texte définitif.
Le manuscrit comprend 21 chapitres, dont deux furent écartés de l’édition par Mme Bloy.
I.
Le Mépris
 : « Oh ! le délicieux, l’inappréciable refuge ! »… (p. 1).
II.
Les Apparences
 : « C’est la plus banale des illusions de croire qu’on est réellement ce qu’on paraît être »… (p. 2).
III.
La Volupté
 : « La Vie & la Mort. Tout le monde pense ou croit penser qu’il n’y a que ces deux mots qui aient
un sens précis & indiscutable »… (p. 3).
…/…