Page 16 - cat-vent_rossini28-04-2014-cat

Version HTML de base

14
actions sont donc pures sont simples sont saintes sont parfaites quoique reflechies et ayant toutes un rapport à nous. Il faut que
tous les fideles se conforment au desir de l’église qui leur inspire ces sentimens dans son sacrifice : ce qu’on ne fera jamais mais
plustost on fera tout le contraire si on regarde ces actes comme interessez car cest leur donner une manifeste exclusion. Il faut
donc entrer dans ces actes : il faut qu’il y ait dans nos oraisons une secrette intention de les faire tous ; intention qui se developpe
plus ou moins suivant les dispositions où Dieu nous met mais qui ne peut pas nestre pas dans le fond du chretien quoiquelle
y puisse estre plus ou moins cachée et quelquefois tellement qu’on ne l’y apperçoit pas distinctement. Ce sera là peutestre un
denouement de la difficulté : mais pour cela il faut changer non seulement de langage mais de principes en reconnaissant que
ces actes sont tresparfaits en eux mesmes soit qu’ils soient apperceus ou non excités ou non par nostre attention et par nostre
vigilance pourveu qu’on croye et qu’on scache qu’on ne les fait comme il faut qu’autant qu’on les fait par le St Esprit : ce qui
n’est pas d’une oraison particulière mais commun à tous les etats du christianisme quoique non tousjours exercé avec une egale
simplicité et pureté. Si on entre veritablement dans ces sentimens la doctrine en sera irrepréhensible ».
43.
Joe BOUSQUET
(1897-1950). Manuscrit autographe, [
La Vie est ronde
], 1946 ; cahier petit in-4 de 147 pages
de papier ligné (le reste vierge), relié veau rouge avec titre en lettres dorées, sous chemise demi-maroquin rouge et
étui.
10.000/12.000
Important cahier inédit de vers et prose, à la fois journal, méditations, réflexions, souvenirs, confidences
amoureuses, aphorismes, notes de travail et récits. Des notes d’une autre main [Yvonne Patau ?] sur les feuillets de garde, et
parfois dans le cours du manuscrit, indiquent que certains textes en ont été publiés ou intégrés dans d’autres textes, notamment
Le Meneur de lune
,
La Neige d’un autre âge
ou
Auprès de mon ombre
.
Le cahier s’ouvre sur des poèmes (p. 1-8), abondamment corrigés, datés en fin « avril 1946 » :
La Blanche par amour
(« Le
fanal du regard échoué dans ta face / n’a pas trouvé tes yeux en s’entourant de toi »…), « Immobile une femme a le poids de la
rue »…, « Un chant naît pour nous voir d’une étoile expirée »…
Suit un ambitieux « Plan, au 27 mai 1946 de mon travail d’invention » (p. 9), comprenant
L’Homme-chien
, « récit à écrire
en un mois », des
Contes à Jean Dubuffet
, des
Méditations
« où l’ouvrage précédent se couronne. Espoir : dans l’amour, dans la
mort », des
Contes
« longs et courts », le
Journal bleu
, et des
Poèmes
. Une « Distribution provisoire des méditations » (p. 10)
est restée vierge.
Divers textes se succèdent, comme des méditations. « C’est bien toi, va : un homme comme les autres, mais un peu moins
complet, j’en ai peur »…(p. 11-12). «
To be is not to be
. Les philosophes ne trouveront pas d’amorce à discussion dans les pages
que j’écris. » (p. 13) « Remuer des pierres, avec mes mains de guimauve, il n’y fallait pas penser, ni des bûches »… puis
Midi
noir
: « Rien de plus pour m’attacher ; et l’espoir que Camberoque [illustrateur du
Meneur de lune
] me rappellera souvent
qu’ici, le jour reçoit la lumière des objets »… (p. 14-16).
L’homme-chien
: « Moi je veux bien : l’h.c. point final »… ; I « Si tu recueilles le chant des arbres sur leur ombre, tu vois que
la rosée ressemble à un oiseau »… (p. 16-19)
To be is not to be
. 1 « Un grand espoir emplit les pages que j’écris »… (p. 19-24)
à Saint-Souris
. « Il n’était pas sorcier, il croyait le monde ensorcelé. Ne se trompait pas beaucoup et seulement quand il se
jugeait incapable de le désensorceler »… 2. « Un jour, il regarde pleurer une femme qui vient de perdre son enfant »… 3. « Le
plus secret des baisers l’émeut toute. Remontée toute frissonnante de l’oubli, elle me regarde comme si elle ne connaissait plus
ses yeux »… – « Aimer entièrement, c’est le même désespoir que d’aimer en vain. Elle ne peut me donner tout ce qu’elle est
à mes yeux. Jamais elle n’apaisera ma haine pour l’univers immense et lent qui nous a rapprochés sans s’engloutir. Où qu’elle
se trouve, elle vient vers moi, mais se perd en route puisque le bonheur d’être unis n’a pas prévenu son désir »… – « Bizarre,
ce nom de famille qu’on m’a donné comme par emprunt et qui est un peu de désordre et de vent dans le pluriel du mot
bouquet »… (p. 24-39).
Isis
. « L’odeur du romarin montait aux barreaux d’un portail rouge, flottait avec le vent de sel sur la monumentale clôture où
trois initiales de fer figuraient tout un grand nom : Jean-Flour Montestruc. […] J’avais trahi la poésie en abandonnant le nom
de Jean-Flour que j’avais d’abord choisi comme pseudonyme. La poésie m’a poursuivi. Elle transforme peu à peu ce nom de
Bousquet que je dois à mon père : un peu de désordre et de vent, disais-je d’abord, dans le pluriel du mot bouquet. Mais il n’est
pas de poésie purement verbale. Poésie, le langage cristallise dans les faits qui tiennent de lui leur indice de réfraction Poésie
minérale du spath et du quartz ! […] Morte, la poésie, ne le croyez pas, mais atteinte, absorbée et riant avec nous, l’entraîneuse
que si longtemps on vit de dos, devançant cette vie qu’il nous fallait consommer dans la lenteur, sans fatigue grâce à la rumeur
qu’en liberté elle menait sur notre front, nous souhaitant enfin, comme aujourd’hui, aussi vifs qu’elle. Ne sois pas un grand
poète, il n’y a plus de poésie autonome, sois très poète. […] Plus d’une fois, j’ai écrit que la vie était ronde : cette parole traduisait
imparfaitement une conviction que les faits de mon âge mûr enrichissent et composent comme un tableau. Aucune idée ne
rendrait compte avec fidélité d’une certitude que chaque instant de ma vie confirme ou complète »… (p. 40-54).
« Aimer, c’est créer. Je suis le meilleur de ce que je crée »… – « On m’appelle poète. Quelques gains littéraires m’autorisent
à me dire écrivain »… (p. 54-59)
à Saint-Souris
. « Jamais il ne passe à la même heure ; il n’est pas deux jours de suite le même personnage »… (p. 66-65).
« Pour apprendre à rire : tu allumes une cigarette en trempant ta plume dans l’encre »… – « Oui, ça fait mal, mais sorti du
lit où tu rémousègues, on ne sent rien. Va-t-en, par des routes à toi, sans te diriger nulle part »… (p. 66-71).
Poème :
À prix d’ombre
,
Saint-Cytise
: « Le noir est gris / À Saint-Souris »… (p. 72).
« Penser à elle, c’est l’attendre, croire en veillant son propre cœur qu’il fera jour demain, mais le désespoir est caché dans
l’instant qui la ramènera »… –
6 juillet
. « Un jour descend le fil du chaud Juillet »… et histoire de Muette et d’Amarante.
– « Élégante, mais comme les plus heureusement parées. Rien ne distingue ses gosses des enfants qui obéissent aux même
curés »… –
Juillet 46
. « En attendant la dame blanche. Un peintre très jeune a compris son art en illustrant un de mes livres. Puis
il a entrepris mon portrait, d’année en année l’a rendu plus admirable. Personne ne reconnaissait l’homme qu’il avait pris pour
… /…