Lot n° 459
Sélection Bibliorare

Ernest MOUCHEZ (1821-1892) amiral et astronome. Manuscrit autographe, Notes du voyage de Favorite, …

Estimation : 1 500 - 2 000 EUR
Adjudication : 1 920 €
Description
Ernest MOUCHEZ (1821-1892) amiral et astronome. Manuscrit autographe, Notes du voyage de Favorite, 1841-1844 ; cahier in-fol. de 14 pages plus titre (couverture salie et froissée, qqs déchirures).
Curieux manuscrit sur la Bretagne, Ténériffe et les Marquises.
Ancien élève de l’École navale, Ernest Mouchez effectua, de 1841 à 1844, un voyage à bord de la corvette la Favorite dans l’océan Indien, le golfe Persique et la mer de Chine. Puis il participa, de 1850 à 1854, à un voyage de circumnavigation à bord la corvette la Capricieuse en Amérique du Sud, en Polynésie, en Chine, en Corée, aux Philippines et aux Moluques.
Le manuscrit est constitué de notes personnelles. La première, intitulée Ile de Sein, concerne l’origine de l’usage des coquilles par les pèlerins : « Tous les jeunes gens qui se destinaient à être marins allaient, avant de commencer leur 1ère navigation, faire un pèlerinage à l’île de Sein, armés d’une bonne santé et de leur virginité »... Suit une anecdote relative à un bal masqué.
Une troisième note se rapporte à Ténériffe, où la Favorite mouilla du 13 au 18 juin 1841 (p. 4) : « Le nombre de filles publiques y est énorme. Il y en a presque autant que de jeunes filles. La prostitution envahit toute la ville, les femmes mariées elles-mêmes vont presque ouvertement dans certaines maisons ad hoc tâcher de gagner quelques pièces d’argent soit pour leur parure, soit pour leur nourriture. Les femmes des officiers militaires sont surtout celles qui font le plus ce commerce, aussi à chaque instant dans les rues [on] vous proposera une femme de lieutenant, une femme de capitaine, &&. Ce dévergondage est le produit de la misère multiplié par l’orgueil des Espagnols »…
Après le brouillon d’une lettre adressée à son père, Jacques Barthélémy Mouchez (1783 -1849), sur la difficulté d’écrire une relation de voyage (p. 4-8), une dernière note, la plus importante, donne une description des habitants de l’île de Nouka-Hiva, dans l’archipel des Marquises, avec la relation d’une « prise d’assaut » de la Capricieuse par les jeunes Marquisiennes en novembre 1850. « À mesure que nous nous approchons nous distinguons les toits de quelques cases qui percent l’épais feuillage et nous annoncent la présence de naturels. Parvenus au fond de la baie nous ne tardons pas à voir s’animer ces plages qui d’abord nous paraissaient désertes. Une flottille de pirogues de toutes grandeurs depuis le grand tronc d’arbres creusé et proprement accastillé avec 2 bordages cousus jusqu’au simple tronçon de bois à peine capable de soutenir le corps d’un enfant, se détache du rivage pour venir à nous. Ces frêles embarcations accourent de toute la vitesse de leurs pagayes au-devant des corvettes qu’elles entourent et pressent étroitement »... Malgré des efforts pour repousser la foule qui se presse, le bateau est envahi : « Comment donner une juste idée de cette muraille vivante qui tantôt se dresse devant nous, immobile et silencieuse, tantôt se livre à la pantomime la plus animée, nous assourdit de ses clameurs. Celui montrant du doigt à son voisin un objet nouveau lui manifeste son étonnement par des motaki prolongés, celui-là voulant un morceau de biscuit qu’il aperçoit dans les mains d’un matelot pousse des cris de kat kaï à nous fendre la tête. Un autre tenant une jeune fille dans ses bras appelle votre attention sur la belle vahiné dont il énumère tous les charmes. Mais nous pouvons nous passer de la nomenclature grâce à la simplicité du costume de Nouhiva. Ces beautés océaniennes n’ont en effet d’autres vêtements que celui de Vénus sortant de l’onde. Une étroite ceinture, le modeste maro, est pour elle le seul voile de la pudeur [...J. Ces filles de Satan rangées autour de nous étalent à nos yeux tous les moyens de séduction, leur taille quoique replète et peu élancée, n’est pas dénuée de grâce, des yeux grands et pleins de feu, une bouche bien faite à lèvres assez épaisses, ornées de fort belles dents, un nez très légèrement épaté, des cheveux noirs flottant librement sur les épaules, ornés quelquefois d’une couronne de fleurs, tel m’a paru l’ensemble d’un visage noukahivien qui n’est pas sans agrément. [...] Les filles désolées de n’avoir pu envahir d’emblée le pont du navire voulurent donner un assaut général au gaillard d’avant [...] Un coup de canon tiré à 6 h du soir annonça aux indigènes que le tabou était levé et que les femmes pouvaient monter à bord. Les hommes durent s’éloigner avec leurs pirogues et ne reparaître que le lendemain. A ce signal si longtemps attendu les filets d’abordage s’abaissèrent pour laisser passer nos bayadères, et se relevèrent aussitôt pour garantir la corvette de toute surprise nocturne. Il est inutile de parler de toutes les scènes qui furent enveloppées des ombres de la nuit »…
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