Lot n° 158
Sélection Bibliorare

MIRÓ JOAN (1893-1983). — 19 L.A.S. et 6 cartes a.s. «Miró», 1958-1973, à Louis BRODER ; 49 pages formats divers (plusieurs à son adresse de Palma de Mallorca), enveloppes, montées sur onglets (ou détachées) en un volume in-fol. relié...

Estimation : 15000 - 20000
Adjudication : 26 000 €
Description
demi-maroquin bleu-nuit à coins, étui. — Belle correspondance avec l'éditeur Louis Broder autour de leurs réalisations communes.
Spécialisé dans les estampes, Louis BRODER commença son activité à la fin des années trente et fut l'un des grands éditeurs d'art de l'après-guerre, à côté de Maeght ou Tériade. Ami des surréalistes, sachant parfaitement allier poésie et illustrations, attentif à la modernité artistique autant qu'attaché au travail artisanal, Louis Broder était pour Miró un interlocuteur idéal. Le ton de leur correspondance témoigne d'une complicité et d'une amitié qui dépassent la relation professionnelle, mais la même exigence de perfection pour leurs réalisations communes, avec l'aide du lithographe Fernand Mourlot et du pressier Jean Célestin, souvent nommés ici : La Bague d'aurore de René Crevel (1957), Nous avons de René Char (1959), et Le Lézard aux plumes d'or, grand projet qui occupa les deux hommes dès 1963 et achevé d'imprimer en novembre 1971, superbe livre entièrement conçu par Miró à la longue genèse dont témoigne cette correspondance.

•Palma de Mallorca 25.VII.1957. Il a bien reçu ses exemplaires de La Bague d'aurore dont il donne les numéros et qu'il trouve «très réussi [...] Nous avons tous très bien travaillé, [...] je suis heureux de collaborer avec vous, qui entreprenez les choses avec passion pour les mener jusqu'au bout, à la dernière limité»...
•Palma de Mallorca 30.XII.1958. Miró remercie Broder de l'avoir gâté pendant son séjour parisien, «avec des beaux papiers et de magnifiques gravures [...] Le poème de CHAR est extraordinaire, un des plus beaux textes que j'ai jamais lu. Suis très heureux de l'illustrer, la maquette vient d'être terminée et je crois qu'on va faire quelque chose de très bien. Le texte de Char, si grandiose, exige quelque chose d'une extrême sobriété»...
•28.III.1959. La suite de La Bague d'Aurore est exposée dans sa rétrospective au Momart de New York qui a «un très gros retentissement» ; il va partir pour l'Amérique...
•18.IV, sur Nous avons. Les épreuves d'essai sont «magnifiques, la matière du fond est une grande réussite» ; quant aux épreuves à colorier : «C'est fait, j'espère que la façon dont je les ai traitées vous plaira». Pour la couverture, il n'est pas de l'avis de Broder : «je vois la couverture à double page, ce qui donne à l'architecture du livre un aspect monumentale, et se marie avec le texte grandiose de René». Il faut aussi déplacer les numéros des pages, «qui prenaient trop d'importance plastique. Nous allons faire un grand petit livre, ce qui est plus difficile»...
•New York 20.V. Il donne le bon à tirer : «Il faut néanmoins, et ceci est d'une importance capitale, que l'intérieur du livre ait cette puissance d'expression plastique, que les accents de couleurs aient cette véhémence, autrement il y aurait un décalage. Il faut que le livre soit marqué par une grande tension d'esprit, comme le texte et la conception plastique l'exigent»...
•Palma de Mallorca 26.II.1963. Préparant «une grande exposition de céramique», il doit se «déplacer tout le temps pour surveiller les cuissons et les fournées chez ARTIGAS». Quant au projet du Lézard, «il faut suivre toutes les péripéties pour trouver des solutions et arriver à une parfaite réussite»...
•17.VII : «j'ai beaucoup pensé à notre livre, je crois que nous sommes sur le bon chemin [...] Célestin a très bien travaillé et les résultats sont, jusque maintenant, excellents». Il recommande à Broder d'aller souvent chez Mourlot surveiller l'avancement du travail... Il pense «ajouter au livre deux doubles pages qui vont encore l'enrichir par un nouvel accent de poésie, dans l'esprit de mes œuvres les plus récentes»...
•Montroig 24.VIII. «La litho pour le livre est une parfaite réussite, si on parvient à se maintenir sur le même ton dans l'ensemble, [...] nous ferons quelque chose qui aura une dignité classique». Il a cherché de nouveaux textes pour enrichir le livre : «Cette étape littéraire dans ma vie est un document unique et qui explique beaucoup de choses». Cela va l'amener à «faire de nouvelles lithos pures, traitées dans un esprit différant de celles qui ont déjà été gravées, qui se marient très bien avec le reste. Il faudra les traiter d'une manière directe et brutal»...
•19.IX. Il a ajouté au livre de nouveaux textes et de nouvelles lithos : «Tout en conservant l'unité et l'architecture, je pense employer des nouvelles techniques.
[...] avec un ouvrage pareil, il faut aller jusqu'au bout, sans rien négliger pour obtenir un résultat exceptionnel, la collaboration entre nous tous est donc une chose primordiale»...
•Palma de Mallorca 1.XII. «Le résultat me semble d'une très grande qualité et grande noblesse artisanale. En y mettant les dernières pages calligraphiées à côté que j’ai fait cet été, le mariage entre les deux éléments est parfait et garde le frémissement poétique qu’on se proposait, très difficile à atteindre. Nous allons faire, je l’espère, un livre classique »…
•Palma de Mallorca 21.IV.1965. Il envoie « les maquettes pour les deux graphismes sur les beaux fonds », pour que Célestin prépare les planches. « Le livre ainsi conçu est d’une architecture parfaite, tout se tient et une chose met en valeur l’autre. J’ai étalé toutes les épreuves, l’ensemble est magnifique »…
•Montroig 2.VIII. « Les épreuves que vous m’avez envoyées sont magnifiques, les fonds peuvent me servir de choc et point de départ pour de belles choses. J’y travaille déjà et je crois que vous serez content de ce nouvel enrichissement du livre. […] je vais y ajouter quelques coups de clairon très vifs et aigus pour le compléter »…
•20.IX. Il a envoyé à Célestin de nouvelles maquettes pour le livre, qui « est devenu petit à
petit un monument, maintenant je crois que nous arrivons au sommet. […] Pour un ouvrage pareil, il ne faut rien négliger, pas le moindre détail, pour arriver à la plus belle réussite. Je sais que vous partagez mon avis, c’est pour cela que je vous admire »… Etc.
Il est également question de son travail avec le céramiste Joseph Llorens ARTIGAS, dont une L.A.S. « Papitu » illustrée d’un grand dessin, adressée à Miró, est jointe (2 p. in-fol.) ; en catalan, elle concerne un projet de céramique dessiné sur toute une moitié de page, avec indications de dimensions et de formes possibles.

─ On joint :
- divers documents, dont des doubles de lettres et télégrammes
de Louis Broder,
et
- une photographie de Miró et sa femme Pilar.

19 L.A.S. and 6 cards a.s. "Miró", 1958-1973, to Louis BRODER ; 49 pages in various sizes (several to his address in Palma de Mallorca), envelopes, mounted on tabs (or detached) in a folio volume bound in half blue morocco with corners, slipcase. — Nice correspondence with the publisher Louis Broder about their common achievements. — Specialized in prints, Louis Broder started his activity at the end of the thirties and was one of the great post-war art publishers, next to Maeght or Tériade. A friend of the surrealists, knowing perfectly how to combine poetry and illustrations, attentive to artistic modernity as much as he was attached to craftsmanship, Louis Broder was for Miró an ideal interlocutor. The tone of their correspondence bears witness to a complicity and friendship that went beyond the professional relationship, but the same demand for perfection in their joint creations, with the help of the lithographer Fernand Mourlot and the pressman Jean Célestin, who are often named here : René Crevel's La Bague d'aurore (1957), René Char's Nous avons (1959), and Le Lézard aux plumes d'or, the great project that occupied both men from 1963 onwards and was completed in November 1971, a superb book entirely conceived by Miró with the long genesis to which this correspondence bears witness. — Palma de Mallorca 25.VII.1957. He has received his copies of The Ring of Dawn, the numbers of which he gives and which he finds "very successful [...] We have all worked very well, [...] I am happy to collaborate with you, who undertake things with passion to see them through to the end, to the last limit"... — Palma de Mallorca 30.XII.1958. Miró thanks Broder for having spoiled him during his stay in Paris, "with beautiful papers and magnificent engravings [...] CHAR's poem is extraordinary, one of the most beautiful texts I have ever read. I am very happy to illustrate it, the model has just been completed and I believe we will do something very good. Char's text, so grandiose, requires something of extreme sobriety"... 28.III.1959. The continuation of La Bague d'Aurore is exhibited in his retrospective at the Momart in New York, which has "a very big impact" ; he is going to leave for America... 18.IV, on Nous avons. The trial proofs are "magnificent, the background material is a great success" ; as for the coloring proofs : "It's done, I hope you will like the way I have treated them". As for the cover, he disagrees with Broder : "I see the double-page cover, which gives the architecture of the book a monumental aspect, and goes with the grandiose text of — René". It is also necessary to move the page numbers, "which were taking too much plastic importance. We're going to make a big little book, which is more difficult"... New York 20.V. He gives the press release : "It is nevertheless necessary, and this is of capital importance, that the interior of the book has this power of plastic expression, that the accents of colors have this vehemence, otherwise there would be a shift. The book must be marked by a great tension of spirit, as the text and the plastic design require"... — Palma de Mallorca 26.II.1963. Preparing "a big ceramic exhibition", he has to "move all the time to supervise the firings and the baking at ARTIGAS". As for the project of the Lizard, "it is necessary to follow all the vicissitudes to find solutions and to arrive at a perfect success"... 17.VII : "I've been thinking a lot about our book, I think we're on the right track [...] Célestin has worked very well and the results are, so far, excellent". He recommends Broder to go often to Mourlot's house to check the progress of the work... He thinks "to add to the book two double pages which will still enrich it by a new accent of poetry, in the spirit of my most recent works"... — Montroig 24.VIII. "The litho for the book is a perfect success, if we manage to maintain the same tone in the whole, [...] we will make something that will have a classic dignity". He has been looking for new texts to enrich the book : "This literary stage in my life is a unique document that explains many things". This will lead him to "make new pure lithos, treated in a different spirit from those already engraved, which will blend in very well with the rest. It will be necessary to treat them in a direct and brutal way"... 19.IX. He added new texts and lithos to the book : "While maintaining the unity and architecture, I am thinking of using new techniques. — [...] with a work like this, it is necessary to go to the end, without neglecting anything to obtain an exceptional result, so the collaboration between all of us is of primary importance"... Palma de Mallorca 1.XII. "The result seems to me to be of a very high quality and great craftsmanship. Putting the last pages of calligraphy next to it that
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