Lot n° 295
Sélection Bibliorare

STAEL Germaine de (1766-1817). L.A., 10 mars [1803] , s.l., adressée à Claude HOCHET. 7 pages …

Estimation : 1 500 - 2 000 EUR
Adjudication : 2 899 €
Description
STAEL Germaine de (1766-1817).

L.A., 10 mars [1803] , s.l., adressée à Claude HOCHET. 7 pages in-8 autographes à l'encre noire sur 2 feuillets doubles (coin inférieur droit du second feuillet déchiré sans manque, trace de cachet, pliures).

Lettre de Madame de Staël à son ami Claude Jean-Baptiste Hochet, écrite pendant son exil en Suisse sous le Consulat.
Comme à son habitude, Mme de Staël marque très peu la ponctuation. Nous l'avons partiellement rétablie pour le confort de la lecture. « Je vous remercie du fond du coeur mon cher ami, de votre longue lettre. Je ne connais pas, dans cette Delphine dont vous me parlez, deux pages plus spirituelles que votre visite chez Pietet et sur l'hospitalité. Je serais bien tentée d'en faire usage. Quel singulier caractère en effet ! que ce besoin continuel de prétendre à l'excès contraire, à un défaut et quelle illusion que se flatter de tromper les hommes sur sa propre nature. On dissimule les faits, les opinions, mais les qualités et les défauts se trahissent par tout ce qui impose notre être. J'en viens à moi. Ma lettre à lui est de la politique et malheureusement j'y suis condamnée par ma situation. Il m'avait montré sans le vouloir toute la servilité de son caractère et il était parti furieux de ce que je l'avais aperçue. Comme l'opinion de ce pays est beaucoup plus morale que celle de France, il ne peut pas fairrrrreee le Talley. avec moi. Il a donc écrit deux lettres de 8 pages qui contiennent trente parenthèses rentrantes et sortantes de l'explication et ma cousine m'a fort pressé de lui écrire pour le lier à être bien ou du moins pas mal. Je l'ai fait et je m'en tiens là. La France est nécessaire à mon bonheur. Sans cette triste dépendance je serais une autre et cependant réfléchissez s'il est possible de moins faire pour son bonheur. Avez-vous un doute que telle lettre de moi ou tel éloge imprimé finirait tout ? A propos de l'éloge imprimé, me croyez-vous assez absurde pour écrire cette préface avant que mon affaire soit terminée ? Maradan fait dans ce moment la 4ème édition sans que j'y aye joint un seul mot. Il en veut faire deux autres pour le commencement de l'hiver et c'est pour celles-la que je vous demande vos observations. Ce n'était point les critiques mais le ton de ces critiques qui m'avait un peu chiffonné. D'ailleurs, je suis s'il est possible, plus attachée encore à vous que je ne l'étais alors et rien au monde, à présent, ne peut altérer mon affection pour vous. La plus grande épreuve cependant que vous puissiez lui faire subir, ce serait de montrer mes lettres. Si vous voulez qu'elles soient plus intimes encore, il faut que j'aye à cet égard une sécurité qui me manque. Ne serait-il pas possible d'insérer dans le Publiciste même ces faits-ci : le nombre des éditions à Paris ? Deux traductions à Londres et trois en Allemagne. Il me semble que ces faits se mettant sans réflexion sont sans danger. Je ne parle pas de vous mais d'eux. Non mon ami, si je redeviens heureuse vous n'éprouverez pas ce que vous a fait éprouver Mme de D. Il y a dans le sens français quelque chose qui ôte aux affections leur durée, aux qualités mêmes leur réalité. Ah que Old England me touche d'avantage. Remarquez-vous le discours de Lord Attenborough en condamnant le colonel Deyard, et la justification du capitaine Macnamara, et toute cette nature vraie, sensible, digne, contenue qui, au milieu de la poussière des phrases françaises, fait l'effet de pas d'homme dans le désert. Vous dites qu'à notre age on ne peut former d'affections nouvelles. Plus en français mais bien en anglais. Ils me témoignent ici une affection qui me touche et sans laquelle je n'aurais pas si bien supporté ces jours d'exil et ce commérage rétréci de Genève qui va si mal à mon caractère ou à mon esprit. Mais les amis de l'enfance, mais la patrie, mais la langue. Ah ! il faut vivre en France. Mais si cette Angleterre était renvers [...]
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