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

.
Germaine Necker, baronne de STAËL
(1766-1817). L.A., Coppet 23 mai [1815], au comte
Trophime-Gérard de L
ALLY
-T
OLENDAL
; 3 pages in-4, adresse.
. ⁄ .
M
AGNIFIQUE LETTRE POLITIQUE DES
C
ENT
-J
OURS
.
… « c’est le roi qui nous a rendus heureux pendant dix mois si courts de notre vie, c’est la pauvre France que j’aime
encore sans savoir presque à qui adresser ce sentiment. Deux hommes politiquement ont abandonné notre parti li-
béral qui comptoit plus de victimes que de transfuges mais de ces deux c’est Benjamin [C
ONSTANT
] qui m’inspire le
plus haut degré d’irritation. Quand à moi vous ne croirez pas j’espère que j’aille à Paris malgré toutes les séductions
que l’on employe pour m’y attirer. Je reste ici. Je suspends, au moins, le mariage de ma fille et je m’en irai cet hyver
en Grèce et à Jerusalem si tout n’est pas fini. Il faut bien aller en terre sainte pour être plus loin de la terre impie, et
cependant c’est notre pays ! » Elle donne des nouvelles : « On a offert à Mr de L
A
F
AYETTE
et à Mr de B
ROGLIE
d’être
pairs et ils ont refusé. Notre pauvre vieux jeune D
UPONT DE
N
EMOURS
est parti pour l’Amérique. Il paroit sans cesse
à Paris des écrits pleins de regrets pour le roi mais ce nom d’étrangers produit une irritation invincible. Je ne connois
que le midi qui dit-on le supporte très bien. Tachez de vous nationaliser le plus possible. Je voudrois le roi en Suisse
dans un pays neutre environné de Suisses qu’on est accoutumé à regarder comme des François. Enfin c’est l’opinion
qu’il importe de conquérir. La guerre est chose aisée mais après elle il reste toujours 24 millions d’hommes dont plus
de la moitié a le cœur ulcéré. […] Je ne suis pas du nombre de ceux qui croyent à une résistance invincible en France
mais je ne crois pas non plus à une révolution à Paris et il me semble que la pire des situations se prépare – c’est à
dire les étrangers faisant tout et la nation toujours ulcérée, au reste qu’y faire ? Cet homme [N
APOLÉON
] n’est pas
conciliable avec l’espèce humaine. Sa constitution est meilleure que la charte constitutionnelle mais sa chambre des
pairs l’a singulièrement dépopularisé elle ne sera jamais cette chambre qu’une anti-chambre ou qu’un corps de garde.
On n’a pas tout dit en appelant des gens des
pairs
et pour lui je le vois dans la nécessité de tirer à la courte paille entre
Mr le Baron de Vaux et le comte Mouton »… Elle demande des nouvelles de la princesse d’H
ÉNIN
, et elle conclut :
« Mon Dieu que je voudrois causer avec vous. Mais il faut rester ici pendant cet orage avec mon pauvre petit rosier
de fille qui a sa part aussi du malheur public »…
O
N JOINT
une L.A.S. de Lally-Tolendal à Mme de Staël, au sujet d’une invitation à une soirée chez la Princesse
d’Hénin (2 p. in-8, adr.) ; et 3 L.A.S. de la fille de Mme de Staël, Albertine duchesse de B
ROGLIE
, au comte de Lally-
Tolendal ou à la princesse d’Hénin.