Page 13 - cat-vent_paris19-04-2012-regina

Version HTML de base

11
30.
Jean COCTEAU
. L.A.S., Milly-la-Forêt 20 novembre 1960, à Henry de Madaillan ; 1 page in-4, enveloppe.
400/500
Belle lettre sur son élection controversée au titre de « Prince des poètes ». « Ce titre idéologique ne possède pas
d’armes et il vaut davantage par l’accueil qu’on lui réserve que par la manière dont il est donné. Rien de plus mystérieux ni
de plus simple. Mais sans Aragon et sans les innombrables lettres qui me reconnaissent le droit de porter un titre fantôme, je
ne saurais pas que je le porte. Un poète doit recevoir les hommages comme une manière de punition “
pour s’être laissé voir
,
puisque la profonde élégance consiste à demeurer invisible”. Seulement un hommage fantôme s’adresse à cette invisibilité du
poète et c’est pourquoi je l’accepte de tout cœur et sans la moindre honte ».
31.
colette
(1873-1954). L.A.S., 1
er
mars [1945], à Marguerite Moreno ; 2 pages in-4 et 3 pages obl. in-8 (une
enveloppe jointe).
700/800
Émouvante lettre sur la mort de son amie la poétesse Hélène Picard. Elle mérite les reproches de Marguerite comme
elle mérite son indulgence : « J’étais ensauvagée de travail »… S’y ajoutent une visite de sa fille, une maladie de Morhange,
et encore du travail. « Puis, mort (affreuse) d’Hélène Picard. Comme la plus romantique des poètes, elle meurt à l’hôpital,
inconnue, méconnue, seule, et muette. Une voisine, Marguerite d’Escola, la découvre à S
t
Jacques,
ne la reconnaît pas
, dans une
salle commune non chauffée. Elle lui parle, voit qu’elle entend encore et sourit à mon nom. “Je vais faire le déjeuner de mon
mari et je reviens !” […] Mais Hélène, qui s’était cachée de tous pour mourir, et pour qu’on ne sache pas que ses lésions osseuses
avaient fait d’elle une naine méconnaissable, a déjoué M
me
d’Escola : au retour de celle-ci, Hélène s’était arrangée pour mourir
et on l’avait déjà descendue à la salle des morts. […] Quand on a ramassé Hélène pour la porter à S
t
Jacques, depuis
des mois
elle ne marchait plus qu’à quatre pattes. […] Ses dernières forces ont été pour se cacher. Enfin, avec l’aide d’un brave médecin
de quartier, tout a réintégré le protocole inflexible : cimetière de Bagneux, et la sœur est venue pour bazarder les petits vases
d’opalines et les images de piété »… Colette travaille depuis dix jours pour la
Revue de Paris
, qui lui a demandé une petite étude
sur Hélène : « Je n’ai jamais rien fait de semblable et je n’avance guère »… Elle donne des nouvelles des Carco, qui sont rentrés
en ramenant « un chien-catastrophe », d’autres de la santé de Morhange, et elle apprécie la lettre de Marguerite sur la vie de
Nice. « Je voudrais m’asseoir à l’ombre de ton moulin avec toi, et écouter l’oiseau qui dit 888888 »…Maurice [Goudeket] « est
toujours “le chien actif-qui-n’aboie-pas”. Bonne espèce »…
32.
François COPPÉE
(1842-1908). Poème autographe signé,
Fragment d’un poème inédit
, et L.A.S. d’envoi,
1
er
février, à Émile Blémont
; 2 pages in‑fol. et 1 page in‑12 (cachets encre
Maison de Poésie, Fondation Émile
Blémont
).
150/200
Il lui envoie « quelques vers pour
La Renaissance
où je serais flatté de voir mon nom parmi ceux de poètes amis ». Joli
poème de 58 vers, qui sera recueilli en 1876 dans
Olivier
:
« Ce serait sur les bords de Seine. Je vois
Notre chalet voilé par un bouquet de bois.
Un hamac au jardin, un bateau sur le fleuve »...
30
31