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III. NOTICES

HECTOR GIACOMELLI, « le Raphaël des oiseaux ».

Hector Giacomelli (1822-1904) fut un dessinateur, aquarelliste et graveur de grand talent. Contraint dans les années 1850 de s’éloigner

de Paris pour des raisons de santé, il se tourne alors vers l’étude de la nature. Ses représentations de plantes, d’insectes ou d’oiseaux,

aussi délicates que précises, sont reconnaissables entre toutes, que l’on retrouve par exemple dans ses illustrations pour les livres d’André

Theuriet (n

os

122 à 125) et les enluminures originales dont il orna les exemplaires des grands bibliophiles de son temps (n

os

121 et 122). Zola

dit de lui qu’il dessinait avec une aiguille qui avait toute la vigueur et toute l’ampleur du pinceau ; à quoi Henri Beraldi ajoutait : « Un oiseau

qui se respecte ne peut être que de Giacomelli. » Il avait été l’un des collaborateurs de La Sainte Bible de Gustave Doré (1866), pour laquelle

il donna des ornements. Il fut aussi l’un des plus ns connaisseurs de la gravure de son époque, auteur entre autres du catalogue raisonné

d’Auguste Raffet (1862) ; sa collection était réputée et t l’admiration d’Henri Beraldi.

CHARLES JOUAS, un historien de l’architecture par le dessin.

Après s’être initié à la peinture auprès de Clairin et de Regnault, Charles Jouas (1866-1942) revient au dessin auquel il s’était formé très

tôt en autodidacte et qui sera toujours à ses yeux « l’armature nécessaire, indispensable à la construction de toute œuvre ». En 1896, la

commande d’illustrations que lui con e le collectionneur Henri Beraldi pour les Poèmes parisiens d’Émile Goudeau (n° 26) décide de sa

carrière artistique. Cette première incursion dans le domaine du livre illustré marque le début d’une longue collaboration qui associe son

nom à ceux de Huysmans, Balzac, Régnier… Son goût pour l’architecture ancienne, qu’il dessine avec autant de bonheur que d’esprit,

confère à son œuvre une personnalité singulière. Au l des travaux, Charles Jouas se fait ainsi l’historien par le dessin de la France

monumentale et de ses paysages, qu’il s’agisse du Paris ou du Chartres de Huysmans, son ami dont il illustra le Quartier Notre-Dame

(n° 34) et La Cathédrale (n

os

33 et 37), du Versailles de Régnier, cette Cité des eaux aux splendeurs oubliées (n° 60), du Rouen de Dusbosc

(n° 18) ou des Méandres de la Seine que célèbre Focillon (n° 20). Valognes (n° 36), projet qui lui tenait particulièrement à cœur, fut l’un des

derniers auxquels il participa et qu’il laissa inachevé. Il fut également un maître de l’eau-forte.

AUGUSTE LEPÈRE, l’un des rénovateurs de la gravure sur bois.

Auguste Lepère (1849-1923) entre très tôt en apprentissage chez un graveur du Magasin pittoresque, tout en suivant des cours de dessin chez

Lecoq de Boisbaudran. En pleine apogée de la presse illustrée, laquelle nécessite le recours massif à la gravure sur bois pour l’impression

des images, graveur, dessinateur puis chef d’atelier au Monde illustré, il connaît les cadences intenses des ateliers et la division du travail.

En réaction à cette « mécanisation », à la n des années 1880, il s’intéresse à la gravure originale et produit ses premières séries, dont celle

sur Rouen. En 1888, avec Bracquemond, il participe à la fondation de L’Estampe originale, revue destinée à promouvoir de cet art, dont

il sera l’un des meilleurs représentants. Henri Beraldi lui ayant fait découvrir le livre illustré, Lepère comprend quelle place peut y tenir

la xylographie. In uencés par l’estampe japonaise ou les travaux de William Morris, ses bois gravés, au dessin spirituel et vif, dont la vie

quotidienne parisienne est l’un des thèmes principaux sans être le seul, illustreront dès lors de nombreux auteurs, parmi lesquels Louis

Morin (Dimanches parisiens (1898), n° 54), Joseph L’Hopital (Foires et marchés normands (1898), n° 40 à 42), Jean Richepin (Paysages et

coins de rues (1900) n° 63). Pour Huysmans, en 1901, il orna La Bièvre (n° 35) et, en 1903, À rebours, qui sera son chef-d’œuvre. Ses héritiers

se nommeront Laboureur, Beltrand ou Jou.

ÉDOUARD PELLETAN, artisan du renouveau de la belle édition au tournant de 1900.

En 1896, alors qu’il n’appartient pas au monde du livre, Édouard Pelletan (1854-1912) ouvre à Paris, boulevard Saint-Germain, les Éditions

d’Art Édouard Pelletan. Il publie alors un manifeste intitulé Le Livre, dans lequel il dé nit ce que sont selon lui les qualités du livre d’art,

assemblage harmonieux du texte et de l’image. Parmi les auteurs contemporains qu’il publie, citons Jean Lorrain, Jules Renard ou Anatole

France ; quant aux artistes : Henri Bellery-Desfontaines, auquel il con e l’illustration des Poèmes en proses de Maurice de Guérin (n° 29),

Eugène Grasset pour Le Procurateur de Judée d’Anatole France (n° 23), Auguste Leroux pour Les Noces corinthiennes du même (n° 24),

Paul Colin pour Les Philippe de Jules Renard (n° 61), Louis Dunki, Eugène Carrière ou Steinlen pour Cinq poèmes de Victor Hugo (n° 32).

Toutefois, la plus féconde de ces collaborations artistiques est certainement celle de Théophile-Alexandre Steinlen, dont sont présentés ici

Le Chien de Brisquet de Charles Nodier (n° 56), La Chanson des gueux de Jean Richepin (nos 64 et 65) et Crainquebille d’Anatole France,

l’un des plus belles réussites de l’artiste (n

os

21 et 22).

Le grand bibliophile bordelais Adolphe Bordes fut l’un des soutiens nanciers les plus dèles d’Édouard Pelletan. Trois ouvrages publiés

par les Éditions d’Art, proposés ici, proviennent de sa bibliothèque (n

os

23, 29, 32), ainsi que le catalogue des éditions de cette maison paru

en 1913 (n° 58).

LES CUIRS INCISÉS.

En 1880, Henri Marius-Michel remit à la mode cette pratique ancienne des cuirs incisés et modelés, dont il usa largement, en particulier

sur Les Quatre Fils Aymon, dont il relia ainsi près d’une trentaine d’exemplaires. Quelques années après, Camille Martin, Victor Prouvé

et René Wiener, tous membres de l’école de Nancy, s’enthousiasmèrent pour le procédé et réalisèrent des œuvres dans lesquelles s’exprime

toute la fougue qui les caractérise. Cette pratique ne fut pas sans choquer certains bibliophiles qui considérèrent qu’elle faisait obstacle à

la bonne tenue du livre dans la main. Mais, Martin et Prouvé, qui n’étaient pas relieurs eux-mêmes, initièrent un mouvement qui incita les

artistes à s’intéresser à la reliure et t entrer celle-ci de plain-pied dans l’Art. La simplicité du procédé qui consistait à inciser et à modeler

une plaque de cuir qui était ensuite patinée ou dorée avant d’être enchâssée sur les plats de la reliure, sa souplesse aussi qui offrait à l’artiste

plus de liberté et l’occasion d’approcher au plus près le contenu même du livre, furent autant de séductions pour de nombreux artistes, en

particulier des graveurs, tels que Auguste Lepère (n° 54), mais aussi des dessinateurs et des peintres, comme Théophile-Alexandre Steinlen

(n

os

16, 17, 21, 22 et 64) ou Paul Colin (n° 61).

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MERCREDI 23 OCTOBRE 2019