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Tout comme Julien Green, Gabriel Marcel était en quête du mystère d’autrui, du mystère de l’Etre. Tout comme J. G., il se convertit au catholicisme et accorda une place importante à la transcendance et à la rencontre de l’homme et de Dieu dans la foi. Tout comme lui, il écrivit des pièces de théâtre. Les deux hommes étaient faits pour s’entendre. De cette longue et passionnante correspondance, qui mériterait d’être citée in extenso , nous nous bornerons à donner ici seuls quelques courts extraits. Dès 1926, après la lecture de Mont-Cinère , Gabriel Marcel n’hésite pas à comparer le jeune Green à Emily Brontë et Arnold Bennet et à lui dire combien il croit en son avenir littéraire. Après avoir parcouru le Pamphlet contre les Catholiques de France , il lui adresse quatre longues pages critiques sur l’Eglise et ses interprétations symboliques du dogme (G. M. se convertira au Catholicisme romain trois ans plus tard) avant de lui avouer « … une chose que je n’oserais écrire presque à personne ; mais il me semble qu’ à vous je puis le dire sans que vous soyez choqué… J’ai le sentiment que notre rencontre non seulement n’est pas fortuite… vous êtes entré dans ma vie, vous, et non pas du tout seulement le très beau livre… Oui, j’ai le sentiment qu’ il peut vous être donné de m’aider, moi qui n’ai jamais, à aucun moment connu cette indifférence que vous condamnez à juste titre, qui Dieu sait n’ai pas le culte de la raison, mais seulement de la Pensée, et qui cependant n’ai pu me résoudre encore…aux démarches décisives de la foi, moi qui ne suis hélas qu’un rôdeur de l’esprit. Il est hardi de vous écrire ainsi, à vous que je n’ai fait qu’entrevoir, et pourtant quelque chose…me dit que je ne risque rien… », etc. En novembre de lamême année, c’est d’ AdrienneMesurat dont il s’agit (« je suis impatient de connaître cette Adrienne »), et de la forme dramatique de la dernière pièce de G. M., « … celle que je compte adopter déﬁnitivement. C’est vous dire que nous sommes d’accord. Je regrette de n’avoir pas possédé cette technique quand j’ai écrit L’Iconoclaste… Vous êtes d’une criante injustice envers vos propres dialogues qui sont excellents… ».

1927. « … vous ne pouvez pas vous douter de tout ce que vous m’apportez. Depuis que je vous connais, je sais ce que c’est que l’amitié… je voudrais pouvoir faire quelque chose pour vous, vous aider… J’ai relu la 2 e partie d’Adrienne avec plus d’admiration… c’est d’une sûreté incroyable. Et d’où tout cela vient-il ? question qui me donne le vertige… » ; « … Je veux seulement vous dire que je vous aime plus encore aujourd’ hui qu’ hier. Je me suis senti affreusement gauche devant cet aveu ; et je sais à peine ce que j’au pu vous dire. Vous avez raison : il n’y a que cela qui compte… », il l’invite à venir l’écouter lire une de ses pièces ; « … La pièce dont j’ écris en ce moment le dernier acte paraîtra… assez déconcertante. On m’objectera qu’ il n’y a rien, qu’ il ne se passe rien, que mes personnages sont d’une médiocrité et d’une incohérence afﬂigeantes. C’est très loin de mon journal métaphysique… votre roman progresse, mais pourquoi se méﬁer ainsi de l’avenir ? Oh ! remarquez bien que cette incoercible angoisse de l’ inconnu des lendemains je l’ éprouve plus que personne. Mais je la condamne… ». En octobre, il le presse de questions à la suite de « … bruits qu’on se permet de faire circuler sur vous et avec des précisions, avec des noms… J’ai d’abord haussé les épaules. Et puis je me suis interrogé moi-même… », etc.

On joint :

1) 6 brouillons autographes de lettres adressées par Julien Green à Gabriel Marcel (dont 4 signés et 1 tapuscrit), intéressants textes littéraires et amicaux (deux de février 1966, relatifs à un différend : « Au nom de notre vieille amitié qui a compté et compte encore beaucoup pour moi, je viens vous demander la faveur de ne plus me parler de mon livre [Terre Lointaine] avant que je ne vous en parle moi-même » ; « que voulez-vous que je vous pardonne ? Votre sincérité ?... Non, ce qui m’a heurté c’est qu’alors que le sort de mon livre était encore très incertain, vous ayez cru bon de me dire que je n’aurais pas dû le faire paraître. Le moment était mal choisi. Il fallait me faire vos critiques plus tard… »). 2) Lettre signée de Jean-Marie Marcel, ﬁls de G. M., à Green, le priant de bien vouloir participer à un colloque lors des manifestations organisées par la Bibliothèque Nationale à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de Gabriel Marcel.