59
une tradition de l’avant-garde ou de ce qu’on a coutume d’afficher comme tel. Un jeune homme qui s’exprime avec singularité
s’exprime à la minute même où sa révolte l’exige. Être un précurseur est chose impensable (cela reviendrait à se promener avec un
parapluie ouvert l’avant-veille d’un orage). Il serait plus juste de constater que les autres retardent sur un acte qui enfonce sa griffe
quand il se doit. Marc’O enfonce-t-il sa griffe ? Seule une tireuse de cartes pourrait me répondre »…
O
N
JOINT
une photographie originale de Jean Cocteau avec Marc’O à Cannes en 1954 (par A. Traverso, 13 x 18 cm), et une
photographie de Cocteau avec Guy Debord et Marc’O à la villa Santo-Sospir (vers 1951-1952, contretype).
Reproductions page 57
148.
Jean COCTEAU
. L.A.S. « Jean », Palais-Royal 20 janvier 1956, à « son voisin très chéri » Emmanuel B
ERL
; 2 pages
in-4 très remplies, enveloppe.
500/600
L
ONGUE
LETTRE
SUR
L
’A
CADÉMIE
ET
LA
CANDIDATURE
DE
L
’
HISTORIEN
J
ACQUES
C
HASTENET
. De nombreux incises, fables et
commentaires sont ajoutés en marge, ou tête-bêche, tout autour de la lettre.
« Je ne sais pas encore si je recevrai C
HASTENET
sous la coupole académique mais je le recevrai sous la tienne (puisque tu
plafonnes sur ma tête au Palais Royal)
et je le recevrai à contre poil de mon amour des exactitudes profondes
. Je ne lui reproche rien
en ce qui me concerne, sauf une dédicace contredite par les textes (son Fallières). Une fois de plus ma longue croisade contre
l’intellectualisme dont la France crève est prise pour grâce et sauts périlleux. Ceci entraîne une motte de lieux communs à droite
et à gauche […] L’académie m’était le seul lieu d’asile possible. […] Je reproche à ton copain de ne peindre que le dessus. Par contre
je préfère les historiens et les ducs et les ambassadeurs au dadais de la littérature contemporaine »… Il note ce quatrain : « Qui
chaste naît / Parfois le reste / S’il ne sa veste / Nous retournait. Bref livres trop chastes. Ne pas confondre avec livres trop purs »…
Il recommande de ne pas montrer cette lettre : « La bombe de mon journal ne doit éclater qu’après ma mort. La terre est une
mauvaise farce et l’espace temps un mensonge dont nous sommes les dupes. Mais si on ne se suicide pas, il faut essayer de prendre
cette farce au sérieux. Je cherche autour de moi un homme qui sans être dupe rendrait la justice sous un chêne. Il est probable que
les seuls historiens dignes de ce nom en France sont Michelet et Alexandre Dumas »… Etc.
149.
Jean COCTEAU
. L.A.S., Milly 1
er
novembre 1962, [à Henry de M
ONTHERLANT
] ; 1 page in-4.
300/400
À
PROPOS
DE
LA
RÉCEPTION
DE
M
ONTHERLANT
À
L
’A
CADÉMIE
FRANÇAISE
[Montherlant, élu le 24 mars 1960, sera reçu le 20 juin
1963, en séance restreinte de commission de lecture, par égard pour son agoraphobie].
« Ne vous inquiétez pas de l’Académie – c’est un phantasme et si vous voulez vous rendre compte que rien ne change lisez
le livre du duc de La Force
En marge de l’Académie
[…] La seule chose étrange c’est qu’on soit sous cette coupole qui refusait
Chateaubriand Hugo Vigny Balzac et recevait des gens que ni vous ni moi ne connaissons et n’aurions voulu connaître. Ils vous
veulent et vous auront coûte que coûte. Résignez-vous »…