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compagnie... les petits animaux à fourrure désignant fréquemment, par euphémisme, les organes sexuels.
Également : deux hommes nus tentant d’attraper un papillon avec leur robe (f. 16 v°,
cf.
Randall,
Images
,
n° 342 et 343), un homme dressant un chien (f. 95 r°), un homme nu s’aspergeant de liquide (f. 126 v°), un
jongleur faisant tourner un plat avec des bâtons (f. 15 v°), deux femmes joutant à cheval (f. 114 v°), un moine
et un diable combattant armés chacun d’une massue et d’un bouclier en forme de cœur (f. 147 r°),
S
CÈNES
ANIMALIÈRES
,
DONT
DES
SINGERIES
:
singe donnant un ordre à trois congénères (f. 6 r°), singe pêchant
avec un chat derrière lui qui essaye de lui voler le poisson de son panier (f. 59 r°,
cf.
Randall,
Images
, n° 44, 45,
47), singes à l’école f. 62 r° (
cf.
Randall,
Images
, n° 634 à 637, 639), chien faisant danser un lapin au son d’un
tambour (f. 3 r°), chien ou lapin armé d’une lance et d’un bouclier combattant un monstre hybride (
ff
. 8 r°,
129 v°, 146 r°), chien poursuivant un lapin (f. 31 v°), chien et lapin joutant à pied (f. 127 v°), lapin jouant du
tambour devant un chien habillé en franciscain (f. 41 r°), oiseaux, écureuil, papillons, lion, etc.
M
ONSTRES HYBRIDES
, anthropomorphes ou purement zoomorphes : évêque (
ff
. 10 v°, 80 v°, 96 v°), chanoine
portant l’aumusse (
ff
. 114 v°, 124 v°), moine (f. 164 v°), moniales dont une abbesse (
ff
. 96 v°, 147 v°, 164 v°),
roi (130 r°, 147 v°), personnage buvant à un tonneau (f. 30 r°), personnage tenant une
fi
ole, sans doute un
médecin (
ff
. 55 v°, f. 73 v°, f. 90 v°, f. 99 r°,
cf.
Randall,
Images
, n° 561), personnage chassant un lapin et
sou
΁
ant dans une trompe (f. 83 r°), personnages joutant à pied (f. 51 v°), personnage jonglant avec deux
balles (f. 127 r°), personnage jouant à la balle avec un bâton (f. 96 v°), personnage lisant ou chantant (
ff
. 4 r°,
95 v°, 114 v°), centaure décochant une
fl
èche (f. 123 r°), sirène (88 r°, 92 v°, 125 r°), etc.
T
RÈS
NOMBREUSES
REPRÉSENTATIONS
DE MUSICIENS
JOUANT
DE
TOUTES
SORTES
D
INSTRUMENTS
,
hommes et femmes,
anges, animaux, et surtout monstres hybrides : f. 1 r°, 2 r°, 5 v°, 12 v°, 25 r°, 37 v°, 42 r°, 46 v°, 50 v°, 54 r°,
73 r°, 81 v°, 84 r°, 85 v°, 92 r°, 93 v°, 97 v°, 101 r°, 102 v°, 121 r°, 121 v°, 122 r°, 122 v°, 124 r°, 124 v°, 125 v°,
126 r°, 128 r°, 147 v°, 148 v°, 169 v°.
L’
ART DES MARGES
:
appelées au Moyen Âge des « drôleries », des « fables », des « curiosités », des « singeries »
(
babuini
), ou encore des « fatrasies », en référence à un genre de poésie comique, ces images envahissent les
marges des manuscrits peu après le milieu du
XIII
e
siècle, notamment dans les régions franco-
fl
amandes.
Leur mode connaît son apogée dans le premier quart du
XIV
e
siècle, où les artistes brillèrent par leur capacité
à combiner des motifs traditionnels de manière neuve et provocante, avant de se
fi
ger dans le stéréotype.
Le développement de ces
marginalia
est principalement à mettre en rapport avec une demande plus forte
de livres dans les milieux laïques, les manuscrits les plus fréquemment ornés de drôleries marginales
étant destinés à la dévotion privée, bibles, bréviaires, psautiers, livres d’heures. Le Moyen Âge avait une
propension à faire contraster le sérieux et le comique, sans toutefois dépasser la simple juxtaposition. Dans
cette société hiérarchisée sensible aux désordres et aux déplacements, les marges géographiques, sociales et
naturelles prenaient une grande importance que l’on discerne dans le folklore, dans la littérature du « monde
renversé » des fabliaux, dans les
exempla
des sermons, ou dans les illustrations marginales des manuscrits.
Remarquables par leurs e
ff
ets comiques distordant la réalité et osant l’anticléricalisme près des textes sacrés,
ces images ont cependant pour fonction de renforcer les modèles mêmes contre lesquels elles se dressent :
« l’art des marges trahit tout à la fois une angoisse de la classi
fi
cation et un souci de ne rien signi
fi
er a
fi
n que
le centre puisse être le lieu du sens » (Camille, p. 69).
D
EUX MAINS
DISTINCTES
SEMBLENT
ALTERNER
DANS
LE
PRÉSENT
TRAVAIL
D
ENLUMINURE
,
sur un même programme
iconographique, avec des traits préparatoires recouverts ou e
ff
acés dans les « bas de page » qui suggèrent
sans doute une composition d’ensemble par un seul artiste. Les changements de main correspondent à des
changements de cahiers.
Le premier enlumineur, au style puissant, occupe la page de manière plus compacte, trace des traits noirs plus
gras pour des éléments de plus gros module, peint des encadrements plus épais, plus rigides et généralement
fermés, avec des vignettes plus courtes, moins fournies de feuilles, et des bouts de lignes dépassant la taille
des lettres du texte. Cet enlumineur a, semble-t-il, travaillé sur les cahiers 1 à 5, 9, 12, 14 à 16, 19, 20 et 22 à 24,
soit les
ff
. 1 à 40, 65 à 72, 89 à 96, 105 à 128, 145 à 160 et 169 à 186.
Le second enlumineur, au style plus délicat et gracieux, plus virtuose aussi, notamment dans les détails
anatomiques, occupe la page de manière plus aérée, trace des traits noirs plus
fi
ns pour des éléments de
module plus petit, peint des encadrements plus étroits où les tiges végétales sont plus fréquentes, plus
souples, s’écartant plus volontiers de la ligne droite, avec des bouts de lignes accordées à la hauteur des
lettres du texte. Cet enlumineur a, semble-t-il, travaillé sur les cahiers 6 à 8, 10, 11, 13, 17, 18 et 21, soit les
ff
.
41 à 64, 73 à 88, 97 à 104, 129 à 144 et 161 à 168.