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22
U
N
MAGNIFIQUE
EXEMPLE
DU
STYLE
DE
LA
RÉGION
D
’A
RRAS
.
Cette région, connue pour des commandes de la
comtesse Mahaut d’Artois et du comte de Dammartin, s’assura vers 1300 une place importante dans la
production du livre, bien documentée d’après les archives.
Le présent psautier se rattache plus particulièrement au style du
Roman de la Manekine
, manuscrit enluminé
à Arras vers 1300 (Paris, BnF. fr. 1588), étudié par Alison Stones. Ce style, qui
fl
eurit dans les années 1270 à
environ 1315, se distingue par des architectures gothiques et de nombreuses drôleries marginales.
Notre psautier présente notamment des similitudes marquées avec le manuscrit connu le plus récent du
groupe de ce style : le livre d’heures à l’usage d’Arras actuellement conservé à Baltimore (W. 104), dont les
écus indiquent qu’il fut réalisé pour le mariage en 1315 de Jean de Flandre et Béatrice de Châtillon de Saint-
Pol. L’assistant du peintre de ce manuscrit a également peint deux psautiers-livres d’heures.
Les mains semblent ici un peu di
ff
érentes des manuscrits étudiés par Alison Stones, les
fi
gures étant moins
allongées et les visages plus ronds.
C
OMMANDITAIRE
M
ANUSCRIT
PROBABLEMENT
COMMANDÉ
PAR
I
SABELLE DE
L
ENS
,
ÉPOUSE DU GOUVERNEUR DE
L
’A
RTOIS
:
au f. 164 v° se
trouvent conjointement une représentation de femme en prière dans l’initiale historiée – très certainement la
mécène –, et des armoiries dans une autre initiale située immédiatement en dessous. Ces armoiries, écartelées
d’or et de sable, se retrouvent également aux
ff
. 45 r°, 98 r°, 118 v° (dans une initiale, avec interversion des
couleurs), 132 v° et 146 r° (sur le lapin). Elles furent portées par les châtelains de Lens jusqu’à l’époque
moderne : d’abord la famille de Lens, puis celle de Recourt au début du
XIV
e
siècle, alliée au début du
XV
e
siècle
aux Licques (Popo
ff
, n° 118 ; d’Hozier). Une Isabelle de Lens devint, « par la mort de ses frères, l’héritière de
la châtellenie de Lens, dame de Chocques & de Camblain [et] porta, vers l’an 1300, la châtellenie de Lens, les
terres de Chocques & de Camblain, dans la maison de Recourt, par son mariage avec Philippe de Recourt,
sieur de La Comté, gouverneur du pays d’Artois, lequel conjointement avec ladite Isabelle de Lens,
fi
rent
échange en l’année 1312, de leur châtel & seigneurie de Chocques avec dame Mahaut, comtesse d’Artois »
(Recourt Du Sart, p. 7).
L
E
PRÉSENT
PSAUTIER
CONTIENT DE NOMBREUSES
AUTRES
REPRÉSENTATIONS HÉRALDIQUES
,
peintes dans ses marges et
ses initiales. Leur identi
fi
cation précise et assurée s’avère souvent délicate, mais des attributions plausibles se
rapportent principalement à des familles de Picardie, d’Artois, de Flandre et de Hainaut. Les armoiries aux
occurrences les plus fréquentes sont celles des familles de Landas, de Créquy et de Brimeu :
L
ANDAS
:
parti émanché d’argent et de gueules de 5 pièces,
ff
. 1 r° (dans le tabernacle de l’initiale historiée),
36 v° (dans une initiale), 45 r°, 118 r° (dans une initiale), 126 r° (dans une initiale), 132 r° (dans une initiale).
Armoiries portées entre autres par la famille de Landas (Roger, p. 321).
– C
RÉQUY
:
d’or au créquier de gueules, f. 8 r°, 18 r° (dans une initiale), 45 v°, 51 v° (sur l’hybride), 114 v°,
127 v° (sur l’écu du chien), 131 r°, 132 v° (timbrées sur le tout de deux crosses adossées placées en pal), 147 r°
(sur l’écu du diable). Armoiries portées entre autres par la famille de Créquy (Roger, p. 292). Enguerrand de
Créquy fut évêque de Thérouanne de 1301 à 1330.
– B
RIMEU
:
d’argent à 3 aigles de gueules, parfois armées et lampassées d’azur,
ff
. 20 r° (dans une initiale),
45 v°, 79 v°, 97 v° (dans le décor du tabernacle de l’initiale historiée et sur le chien en marge), 118 v° (dans une
initiale), 132 v°, 135 v°, 136 r°, 147 r° (sur l’écu du moine), 149 r° (dans une initiale). Armoiries portées par la
famille de Brimeu (Roger, p. 229, et
Grand armorial de la Toison d’or
manuscrit conservé à la BnF).
– N
EUVILLE
:
d’or fretté de gueules à un franc-canton du même, f. 33 r° (dans l’initiale), 130 v°, 146 v° (dans
une initiale), 161 v° (dans une initiale). Probablement les armoiries de la famille de Neuville (Roger, p. 303)
avec brisure par un franc canton.
– C
AMBRAI
:
d’or à 3 lions d’azur, f. 41 r°, 42 r°, 130 r°, 131 r°, 132 r°. La ville de Cambrai, notamment, portait
de telles armoiries.
– D
ONCŒUR
:
d’or au chevron de gueules, f. 45 v°, 48 r° (dans une initiale), 129 v° (sur le lapin), 167 v°.
Armoiries portées notamment par la famille de Doncœur ou Domqueur (Belleval, t. I, p. 116) et par les
seigneurs de Bouvaincourt (ibid., t. II, p. 319, « Armorial de Ponthieu de l’an 1425 », n° 15).
– E
STOURMEL
:
de gueules à la croix engrelée d’argent, f. 46 r°. Armoiries notamment de la famille d’Estourmel
(Roger, p. 317).
– P
ICQUIGNY
:
fascé d’argent [ou d’hermine] et d’azur de 3 pièces à la bordure de gueules, f. 48 r°, 127 v° (sur
le lapin), 131 v°. Armoiries de la famille de Picquigny (Belleval, t. II, p. 318, « Armorial de Ponthieu de l’an
1425 », n° 3).
– F
IENNES
:
d’argent au lion de sable, f. 59 r° (dans une initiale), 97 v° (sur un hybride), 162 r° (dans une