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On joint
2 brouillons autographes de lettres,
[fin septembre-début octobre 1870] (Bollery I 115 et
118), demi-page in‑8 et 1 page petit in‑4 (petite déchir.)
d’une écriture très serrée. – « Monsieur, vous n’ignorez
pas dans quelle situation douloureuse se trouve la
France. Notre grande nation se trouve réduite à jeter
contre l’ennemi tous ses corps de réserve et enfin la
garde mobile, sa dernière et suprême ressource. D’ici
à quelques jours je vais partir avec les jeunes gens de
mon âge sans aucun regret […] Il est impossible de
prévoir où cette incroyable guerre peut entraîner la
France et ce que deviendront ceux qui se seront levés
pour la défendre »… – À un prêtre de Périgueux :
« Je suis aujourd’hui à Amboise, environné de visages
bienveillants et dans très peu de jours sans doute,
nous serons tous devant l’ennemi. Dieu m’a fait la
grâce de m’inspirer une grande ardeur et d’éloigner
de moi toute crainte. Cette guerre est une croisade,
la plus grande et la plus sainte de toutes les croisades.
Les Prussiens envahissent la France, c’est la lèpre
protestante par-dessus notre ulcère de cartésianisme.
[…] Il paraît certain que nous serons l’avant-garde de
l’armée de la Loire. Tant mieux. Je meurs d’envie de me
mesurer avec les Prussiens. […] Ma patrie, à moi, c’est
avant tout l’Église romaine et j’entends être un soldat
du Christ »...
163.
Léon BLOY
.
Carnet
autographe, 1870-1871 ; carnet in‑12 d’environ 46 pages à l’encre ou au crayon, les
contreplats recouverts de notes et d’un
dessin
original (qqs ff. blancs), couverture toile noire. 1.500/2.000
Carnet de la guerre de 1870, alors que Bloy est mobilisé dans la Garde nationale 
; le carnet sera utilisé
pour
Sueur de sang
.
Minute de lettre à son ami Georges
Landry
 : « Comme tu dois porter saignantes les plaies de la France, de cette
grande nation catholique, coupable d’avoir prostitué son mâle génie à des doctrines de néant et qui à cette heure
terrible, sue par le cœur de tous ses enfants, le poison qu’elle n’avait plus la force de vomir et qui finirait par lui
dévorer les entrailles si la miséricordieuse Providence n’intervenait pas par cette épouvantable purification »…
Prière
du B. Benoit Labre
. Minute de lettre à des amis sur la situation politique, critiquant le gouvernement de Bordeaux
et appelant à voter pour les candidats de la liste de Thiers, pour « l’ordre et la paix » : « La guerre ou la paix, l’ordre
ou le désordre. D’un côté l’épouvantable perspective d’une guerre atroce, insensée, sans solidarité, sans ensemble,
sans aucun centre d’action avec M. Gambetta sur le dos, par-dessus nos sacs. De l’autre côté une paix affligeante mais
nécessaire »… Longue lettre à son ami Victor Lalotte, racontant sa campagne depuis le départ de Périgueux jusqu’à
l’armistice, avec le récit de la bataille de Vibraye : « le 4 X
bre
(ce jour est inoubliable pour moi) vers 9 h du soir, on
vient apprendre à notre commandant que l’armée française que nous croyions derrière nous a repassé la Loire que
les Prussiens ont repris Orléans que nous sommes absolument seuls en face d’un corps d’armée de 50 000 prussiens
campés à 2 kil. Nous levons le camp immédiatement, nous traversons au milieu de la nuit les lignes ennemies avec un
bonheur inouï et nous marchons ainsi pendant 30 heures, sans repos, sans pain et avec un froid terrible qui a fait geler
la Loire. […] Cependant les Prussiens avaient juré de prendre les redoutables soldats de Cathelineau et ils ne cessèrent
de nous poursuivre pendant 8 jours et 8 nuits. […] À Vibraye, pas un soldat français, M. de Cathelineau avait la
consigne d’attendre, il attendit. À midi, l’armée Prussienne arriva, nous étions toujours seuls, 1 contre 30. Nous tinmes
2 heures. […] Comment ne suis-je pas mort, c’est le secret de Dieu. Je fus pendant près d’une heure presque seul sur
une colline, complètement à découvert – le corps ceint d’une flamboyante écharpe rouge visible à 2 lieues, exposé au