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Deux volumes in-4, [8]-XXIV-522 pages et [1] feuillet
d’errata + [4]-XVI-564 pages. Veau jaspé de l’époque,
dos à cinq nerfs et fleuronné, pièces de titre rouges et
tomaisons fauve, tranches dorées sur marbrure.
Première réimpression parisienne
de l’
Esprit des lois
,
émise quelques mois après l’édition originale du libraire
genevois Barrillot, et comportant l’errata à 35 correc-
tions, figurant sur un seul feuillet à la fin du premier
tome. Barrillot n’ayant bénéficié d’aucun privilège pour
protéger ses droits, il n’est pas tout à fait admis de parler
de contrefaçon pour cette nouvelle impression, quoique
la composition du texte ait été copiée avec minutie, page
à page et presque ligne à ligne. Cette réimpression est
identifiée comme telle grâce aux différences typographiques
et surtout grâce à la page de titre, maladroitement imitée,
«Barrillot & Fils » devenant «Barillot, & Fils », avec un seul
« r » et l’addition d’une virgule. De plus, aux nombreuses
coquilles qui affectent l’édition originale, de nouvelles se
sont immiscées dans le texte. La découverte de la demande
de privilège déposée par Laurent Durand dès novembre
1748, alors que l’impression de Genève vient tout juste
d’être accomplie, a permis d’identifier ce librairie parisien
comme l’auteur de la première réimpression, dont de très
nombreux exemplaires se trouvent en circulation dans la
capitale à partir du 15 ou du 20 janvier 1749, où ils font
« tourn[er] la tête de tous les français » ; on se les arrache,
en dépit du prix alors exorbitant de 15 francs, là où l’édition
de Barrillot, largement moins diffusée, est vendue 18 francs.
Montesquieu, peu enclin à rentrer dans l’inévitable confrontation
avec les autorités civiles et religieuses françaises, avait pris pour habitude de
s’adresser à des libraires étrangers, plus libres, pour imprimer et diffuser son œuvre ; lui-même
ne surveillait pas personnellement la composition de ses ouvrages, mais en confiait le soin à des
personnes de confiance. Il en est allé ainsi de l’
Esprit des lois
; c’est à Jacob Vernet qu’il revint
de surveiller l’impression de Genève. Elle déçut pourtant fort Montesquieu, tant par l’aspect
matériel que par les nombreuses erreurs qui s’y étaient glissées : ce mécontentement donna lieu
à la production successive de plusieurs errata en vue d’un « nettoyage » du texte, qui aboutira
à une édition enfin correcte aux yeux de l’auteur en 1750. L’auteur envoie un premier errata
à 35 corrections à l’imprimeur genevois fautif, afin qu’il en fasse à sa charge l’impression et la
diffusion ; Barrillot s’exécute, faisant imprimer l’errata sur deux feuillets, destinés à être insérés
à la fin de chaque volume. C’est cet errata que « Barillot » (entendre Durand), copie pour son
édition ; il en modifie un détail renvoyant à une spécificité grammaticale de l’édition parisienne
(« ne représentoient point un signe » pour « représentent » dans l’édition de Genève). Il commet
également deux petites erreurs de copie. Il faut en conclure que l’imprimeur parisien a eu en
main l’errata que Montesquieu destinait à Barrillot et en a fait dans l’urgence des copies un
peu maladroites à insérer dans l’édition qu’il venait tout juste de «contrefaire» et dont un petit
nombre avait déjà été imprimé. Bon exemplaire, coins un peu usés, traces de restaurations aux
coiffes. Sur l’ensemble de cette question éditoriale, voir Catherine Volpilhac-Auger,
Un auteur
en quête d’éditeur
... - Vian,
Bibliographie de Montesquieu
, p. 15 - Tchemerzine VIII, p. 459-460.
4500 euros
C.
; 2 pages non chiffrées pour le
Catalogue des pièces qui ont esté gravées d’après les tableaux, ou
desseins de Léonard de Vinci.
Les exemplaires connus de cet ouvrage présentent tous des variantes. L’exécution des gravures
est due au comte de Caylus (1692-1765), grand ami de Pierre-Jean Mariette (1694-1774), tous
deux familiers du cercle d’érudits et d’amateurs d’art qui se réunissait chez Pierre Crozat (1661-
1740). Mariette confia à Caylus le soin de graver les belles têtes d’expression provenant d’un
recueil de dessins qu’il détenait de son père Jean Mariette. Cet album, dit «Album Mariette »
est aujourd’hui conservé au Louvre [Arts graphiques RF 28725 - RF 28785] : contrairement à
ce que son propriétaire a toujours soutenu, il ne contient pas des dessins originaux de Léonard
de Vinci, mais des copies réalisées dans la seconde moitié du xvii
e
siècle, dont seules les 38 pre-
mières ont été exécutées d’après le maître florentin. De l’«Album Mariette », Caylus a reproduit
55 figures, ainsi que le frontispice d’après Annibal Carrache figurant Hercule combattant l’hydre
de Lerne. Les gravures sont naturellement inversées par rapport aux dessins de Mariette. Tous
les exemplaires connus contiennent, en plus, au moins 5 têtes copiées à partir d’autres sources ;
l’une provenant du Cabinet du roi, auquel le comte eut accès par l’entremise d’Antoine Coypel,
les autres provenant du cabinet de Crozat. Elles sont pour la plupart entourées d’un médaillon
de doubles cercles concentriques [100 x 100 mm] et signées «C» pour Caylus.
L’album A
, encré en bistre, contient ce «minimum» de 60 têtes, à l’instar de l’exemplaire conservé
à la Bibliothèque nationale [Richelieu, Ee. 24 4°], avec lequel il partage une autre particularité ;
la figure n° 14 y est chiffrée par erreur « 41 ».
L’album B
, tiré en noir, contient donc les mêmes figures : le numéro de la tête n° 14 a été rectifié
et 6 têtes ont été rajoutées, aucune d’entre elles ne portant de numéro. Deux sont signées par
Caylus, les autres s’approchent suffisamment, par la manière, pour qu’elles lui soient également
attribuées. Une seule de ces figures ajoutées contient, en légende, une indication de provenance :
«Tiré du cabinet de M
r
Hirckman ». Elle représente un homme de profil, portant un bonnet,
compris dans un médaillon non pas rond mais ovale : l’imprimeur l’a placée directement en des-
sous de la tête n° 55. À la suite de la planche des têtes n° 58 et 59, trois feuillets supplémentaires
contiennent : deux figures en médaillon rond gravées au trait (signées) ; un profil masculin ; un
profil féminin, ces deux dernières figures étant comprises dans de larges médaillons ovales [140 mm
de hauteur à la cuvette]. Enfin, une sixième gravure, considérablement plus grande que toutes
les autres [160 x 215 mm] a été placée à la fin du recueil, à la suite de la tête de «Cigoli ». Dite
la « Savonarola », elle représente le profil tourmenté d’un vieux moine. Non signée, elle porte en
haut la légende «Dessin de Léonard de Vinci tiré du cabinet de M. Crozat et originairement du
livre de Vasarie [sic]. ». À la manière du frontispice et de la tête de «Cigoli », elle est rehaussée
de lavis bistre : le dessin se trouve aujourd’hui à l’Albertina de Vienne. En définitive, l’album
ainsi constitué est très proche de celui que conserve la bibliothèque Jacques Doucet (INHA) :
les 66 têtes y sont en effet toutes présentes et seule l’erreur de numérotation de la figure n° 14
semble différencier les deux exemplaires (notons également que le recueil de Doucet s’achève
sur le «Cigoli », la « Savonarola » étant placée juste avant lui). Louvre 2003,
Léonard de Vinci,
dessins et manuscrits
, n° 74. Cohen 212.
8.
MONTESQUIEU.
De L’Esprit des loix
, ou du rapport que les loix doivent avoir avec la constitution de
chaque gouvernement, les mœurs, le climat, la religion, le commerce, &c. À quoi l’auteur
a ajouté des recherches nouvelles sur les loix romaines touchant les successions, sur les loix
françoises, & sur les loix féodales.
À Genève, chez Barillot, & Fils [Paris, Durand, 1749].
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