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BOULANGER Georges (1837-1891) général et homme politique.
Lettre autographe signée, 25 août [1891], à son ami joseph de
Ménorval ; 4 pages in-8 (deuil).
Émouvante lettre après la mort de sa maîtresse
Marguerite de Bonnemains (15 juillet 1891) ; il se suicidera
sur sa tombe au cimetière d’Ixelles un mois après cette
lettre (30 septembre).
… « Les derniers événements prouvent encore que nos adversaires travaillent
pour nous, et que nous n’avons qu’à attendre pour récolter. je ne saurais donc
trop désapprouver ces farceurs qui, sous couleur de patriotisme agitent l’opinion
inconsidérément sans autre préoccupation que leurs intérêts électoraux. un
jour viendra, et il n’est pas loin, où le vrai peuple les vomira avec tout le dégoût
qu’ils méritent. je ne les hais pas d’ailleurs personnellement ; je ne leur en
veux que pour la défaveur qu’ils pourraient jeter sur notre cause. Ceci dit
pour la politique […] je ne puis vous cacher que je ne me relève pas du terrible
coup qui m’a frappé. Chaque jour je me sens plus triste, plus malheureux, plus
découragé. En peut-il être autrement ? Vous l’avez vue, vous, l’ange de grâce,
de douceur, de bonté, que je pleure, qui m’a tout sacrifié et qui de son vivant n’a
récolté que l’injure et la calomnie. Malgré mes soucis politiques, elle avait fait
de moi le plus heureux des hommes. Aujourd’hui j’en suis le plus malheureux.
je vous donne ma parole d’honneur d’honnête homme que je n’ai jamais fait
à notre cause de sacrifice plus grand que celui d’essayer de vivre sans elle. Y
arriverai-je ? je ne sais. Mais je fais tous mes efforts pour cela ; et, quoiqu’il
arrive, on n’aura rien à me reprocher »...
On joint une l.a.s. de Louis Barthou offrant cette lettre à l’actrice Mme
Ghislaine (future princesse de Monaco, elle avait joué au théâtre le rôle
de Mme de Bonnemains) ; plus un billet a.s. en italien de Maximilien
II de Bavière, et une charte au nom de la reine Elizabeth I d’Angleterre
(parchemin mauvais état).
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BOVE Emmanuel (1898-1945) romancier.
Lettre autographe signée, Lausanne 20 août 1929, à son frère
Léon Bobovnikoff ; 4 pages petit in-8.
Belle et rare lettre de conseils littéraires et sur la vie,
à son jeune frère.
Il travaille beaucoup en ce moment « afin de finir mon roman pour cet hiver.
à la rentrée, je m’occuperai de ton livre. je corrigerai les fautes et les petites
choses et cela te fera gagner un peu d’argent ». Il lui demande de lui indiquer
ses mensualités en retard : « tu sais comme je suis, pas très pratique […] et ne
me souvenant jamais de rien ». Il s’inquiète des lectures de son frère : « Lis-tu
beaucoup ? C’est indispensable si tu veux que […] je te trouve une situation
importante. Lire est la principale des choses, non pas lire pour avoir lu, mais
lire pour se compléter par tout ce que l’humanité intelligente nous apprend
sur les autres et sur nous-mêmes. As-tu lu Proust ? C’est très important. Et
les grands classiques ? […] Achète immédiatement le
Côté de chez Swann
de
Marcel Proust, paru à la nouvelle revue Française. Ce sont les deux premiers
volumes de son œuvre magnifique qui s’appelle
À la recherche du Temps perdu
.
Tu verras qu’il y a quand même sur terre des hommes intelligents, qui sont
autrement plus grands que de vagues hommes d’affaires »… Ce sont des
conseils désintéressés qui « apprennent plus à trouver le bonheur dans une vie
tranquille, dans sa petite maison à soi, dans ses réflexions sages, que dans une
ambition illogique et vague »…
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