Page 22 - cat-vent_drouot18-12-2012

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
.
François, comte de BULKELEY
(1686-1756) lieutenant général au service de France. L.A., Orléans
14 mai 1736, au Président de M
ONTESQUIEU
à Paris ; 3 pages in-4, adresse avec cachet cire rouge aux armes
(brisé). [CM 439]
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« Quil est doux de recevoir des marques du souvenir de mon cher Monsieur le president que tout le monde
cherit, et que les princes recherchent ; si vous m’adorez de loin, il faut convenir que vous ne m’aimez guere de prez,
puisque la veille de mon depart vous m’avez evité honteusement, mais je suis sans rancune, et je ne feray plus de
reproches ». Il raille l’abbé d’H
ARCOURT
, fils du maréchal, aux propos dignes d’un « officier de l’Inquisition […]
luy et ses freres serviront toujours de preuve qu’un homme de beaucoup d’esprit peut faire de tres sots enfants. Mr
le Card. de P
OLIGNAC
a grande raison de conserver ces precieux restes de l’antiquité pour l’ornement de sa patrie ;
mais Madame la Vicomtesse l’a encore mieux servie, en luy donnant non des statues mais des hommes qui seront
un jour aussy utiles qu’agreables ». Il parle encore du « pauvre Mr de L
AMBERT
», veuf inconsolable : « sur ma
parolle il vaudra bien mieux sans cette femme. […] Pour moy mon cher president, je tache à passer tranquillement
mes jours, et je trouve reellement dans une douce société de quoy me consoler de mon eloignement du grand
monde ». Il incite Montesquieu à venir séjourner à Orléans chez Mme Richard C
ANTILLON
(sa maîtresse, veuve de
Richard Cantillon, que Bulkeley va bientôt épouser): « elle est tres sensible à l’honneur de votre souvenir, elle vous
demande une lettre à Fatime [allusion aux
Lettres persanes
], et que vous confirmiez ses esperances qu’elle trouvera là
haut ces hommes divins que vous lui avez promis, car ceux d’icy bas sont bien loin de leur perfection ». Puis sur la
mort du P
RINCE
E
UGÈNE
(21 avril) : « pour moy jen suis affligé sans l’avoir jamais vû, parce qu’il n’existe plus
d’hommes de cette espece ; on peut dire que c’étoit le dernier general qui restoit »…
.
Marie-Anne Goyon de Matignon, Madame de GRAVE
(1697-1738) fille du maréchal de Matignon, elle
fut la maîtresse de Montesquieu. L.A., Montpellier 21 mai 1736, à M
ONTESQUIEU
à Paris ; 3 pages in-4,
adresse avec cachet cire rouge aux armes (brisé). [CM 440]
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C
HARMANTE LETTRE DE SON ANCIENNE MAÎTRESSE
,
AVEC UNE ALLUSION AUX
L
ETTRES PERSANES
.
« Je contois mon president qu’unne mauvaise memoire me sauveroit des torts que jay de vous devoir depuis tres
lontemps une reponce mais je me suis bien trompée et j’en suis ravie. […] Vous souvenir dunne provincialle exilée
depuis un an, sentir encorre quelque chose pour elle, luy en donner des preuves, luy consacrer des moments qui
pouvoient estre employés à lamusement et à ladmiration du publiq cela me prouve que vous faites cas dunne
ancienne amitié dont vous este et devez estre bien sur. […] Il me paroist que vous faitte des projets bien éloignés
pour votre Guyene sy vous estiez homme à tenir votre parolle et à me venir voir je souhaitterois quasy que vous
fussiez obligé dy aller car je vous assure que quant à moy je seray encore dans mon chien de Languedoc dans neuf
mois dicy preste à vous y recevoir avec mon bouilli mais à vous entendre on diroit que je nay jamais mangé de rôts
vous traittez ma table avec une modestie qui moffence et qui me piquera bien dhonneur quand vous y paroistrés
pour vous en donner une idée moins frugalle, dans le vray vous devriez me venir voir je croy quun Persan même na
pas vû tout ce qu’il y a d’étrange en ce monde quant il nest pas venu à Monpellier. Ainsi vous y trouveriez de la
nouveauté. Vous pouriez faire votre chemin depuis Bordeaux par eau jusquau port du pont Juvenal qui afin que vous
le sachiez est un tres fameux port où jirois vous recevoir comme dame du lieu ». Elle évoque « les bons propos » de
l’abbé d’H
ARCOURT
: « je suis bien aise de savoir quil regarde la roüe et la brulure comme un assez petit tort que lon
fait à son prochain ». Puis elle parle du « mariage du petit P
OLIGNAC
avec Mlle de L
A
F
ORCE
[…] ils ne sont point
assez riche lun pour lautre » ; de la santé de la duchesse de B
OURBON
; des élections à l’Académie en donnant sa voix
au duc de F
LEURY
