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Livres & Manuscrits
RTCURIAL
22 septembre 2020 14h30. Paris
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Livres & Manuscrits
RTCURIAL
22 septembre 2020 14h30. Paris
Succession Felia Leal — Lot 167 à 187
183
PICASSO (Pablo)
Picasso. Sculptures, ceramics,
graphic works.
Londres, Tate Gallery, 1967.
In-4 (29,7 x 20,5 cm), broché.
Catalogue d’exposition enrichi d’un
envoi autographe signé de Picasso à
Félia Léal, accompagné d’un dessin
original au feutre (visage moustachu
souriant).
Ce catalogue a été réalisé lors de
l’exposition des sculptures de Picasso
à la Tate Gallery en 1967 : « In
1967, Penrose curated an exhibition
of Picasso’s sculpture, again at the
Tate Gallery, securing the artist’s
reputation as one of the great
innovators in three dimensions as
well as in two. Since then, Picasso’s
influence on British art has continued
uninterrupted » (En ligne : Tate
Gallery).
Couverture un peu usée, petite
déchirure à un mors en-tête.
2 500 - 3 500 €
184
PICASSO.— CÉSAIRE (Aimé)
Corps perdu.
Paris, Éditions Fragrance, 1950.
In-folio (39,1 x 28,2 cm), en feuilles,
couverture rempliée illustrée, chemise
recouverte de papier vergé orange sur
les plats et de parchemin imprimé sur
le dos, étui.
Édition originale.
Ornée de 32 gravures originales de
Pablo Picasso : une eau-forte sur la
couverture, une eau-forte et pointe
sèche hors texte pour le frontispice,
10 aquatintes à pleine page illustrant
chacune un sous-titre et 20 gravures à
la pointe sèche hors texte.
Corps perdu
est tiré a 219 exemplaires,
signes par l’auteur et l’artiste.
L’un des 4 exemplaires du tirage de
tête sur papier du Japon nacré, le
numéro 1, comprenant une suite des
figures sur papier de Chine.
Elle est
accompagnée d’un feuillet manuscrit
signé de Picasso au crayon bleu
.
Certaines planches sont d’un autre
état que dans l’ouvrage, notamment le
frontispice.
Précieux exemplaire enrichi de
3
feuilles de dessins préparatoires
originaux, signés de Picasso et
offerts à Félia Léal, éditrice de
l’ouvrage
. Ces trois esquisses au
crayon de couleur bleu représentent
des fleurs aux pétales, aux feuillages
et aux pistils variées, dans le style
graphique, décoratif et audacieux
typique de l’artiste.
L’exemplaire est également enrichi
de 9 bons à tirer, dont un pour le
frontispice.
Il est également enrichi du feuillet
“Dit d’errance” en double.
Aimé Césaire et Pablo Picasso, tous
deux membres du Parti communiste, font
connaissance en 1948 à Wroclaw, en
Pologne, lors du Congrès Mondial des
intellectuels pour la paix. L’année
suivante, Aime Cesaire ecrit les dix
poemes qui constituent le recueil
Corps
perdu
et Picasso, sensible au besoin
d’émancipation des peuples africains et
antillais, en imagine l’illustration.
Le peintre s’approprie la poésie de
Césaire, dont les mots servent de
catalyseur à sa création.
En frontispice du recueil figure le
portrait d’Aimé Césaire, de profil,
la tête ceinte d’une couronne de
lauriers. L’image hellénistique du
Poeta laureatus
est un hommage à la
fascination de Césaire pour la culture
grecque antique. De par sa facture, le
frontispice se démarque du reste de
l’illustration. Les hachures serrées
à la pointe-sèche, rehaussées d’une
légère aquatinte, créent un relief et
confèrent beauté et majesté au poète.
Le recueil est subdivisé par dix
intertitres, chacun annonçant l’un des
dix poèmes. Picasso choisit d’élaborer
ces intertitres à l’aquatinte. Les
gravures de Picasso entourent et
enveloppent les titres imprimés des
poèmes.
Picasso laisse libre cours à son
imagination pour illustrer les poèmes
de Césaire. Il réalise 20 gravures à la
pointe-sèche et trace des formes aux
lignes courbes : feuilles et fleurs,
organes génitaux, figures fantastiques.
Le trait est stylisé, la représentation
graphique, épurée. Les images évoquent
les mythes fondateurs et l’art nègre
qui a tant inspiré l’artiste.
« Les poèmes sont le don d’une
identité pour l’avènement d’un peuple,
Césaire descend au gré de son lyrisme
incisif la lente dérive langagière
et géographique d’une migration. La
quête de soi est la diction de la
seule origine, tout le passé entrant
dans l’élégie, dans l’épopée intime
d’être cette saison, cet homme, ce
paysage, cette race, ce soleil. […]
La précision du poème, son ampleur
comme ses farouches ellipses, Césaire
n’accable ni monde ni langue, il les
comble d’intentions, il savoure chaque
prise et le risque des désinences.
Tout à côté, fraternellement, Picasso
intervient. En frontispice le portrait
du poète couronné du mythique laurier,
négritude quasiment romaine, l’hymne
est à venir. Picasso fait ici appel à
l’eau-forte et à la pointe-sèche. Tête
mélodieuse de l’arbre, poussée éponyme
de la statuaire. Et le rythme du livre
se donne de soi : chaque long poème
voit son titre, la blancheur de cette
page inaugurale, se noircir (plus ou
moins) sous l’assaut de l’aquatinte
à la morsure voluptueuse, le corps
du poème étant scandé de pages à
l’eau-forte suggérant un végétal, une
humanité, un objet, le rêve d’un ciel,
toute figure dressée dans sa géométrie
gracile, à coup de stylisation aigüe.
Et l’alternance se reconduit de poème
en poème, Picasso aux côtés de Césaire
module un canto, il fait sien ce
destin secoué qui d’un seul mouvement
de la main peut abattre, l’un après
l’autre, les soleils. Ce livre, malgré
son ambition (son format comme son
épaisseur), reste avant tout très
touchant, c’est la vie, dans sa pâte
unique et unanime, qui a été levée,
bonne cuisson du jour pour une belle
âme » (Peyré).
« C’est la rencontre du volcan et
du minotaure. Picasso plonge dans
l’univers poétique de Césaire, tout à
la fois luxuriant et débridé, pour lui
offrir quelques fétiches immémoriaux.
En écho à l’intolérable condition
imposée au Noir, mi-homme, mi-bête,
que décrit le poète, le peintre imagine
des hybridations explosives de sève,
femmes-fleurs, hommes-plantes, sexes-
racines… En 1950, Corps perdu paraît
en édition de luxe à tirage limité,
réservée depuis plus de soixante ans
aux seuls bibliophiles ; cet ouvrage
est une occasion unique de redécouvrir
la poésie de Césaire illustrée par
Picasso » (Egger).
Bibliographie
Monod, 2461. Yves Peyré,
Peinture et
poésie. Le dialogue par le livre
, 2001,
p. 148-149. Anne Egger, C
orps perdu,
Histoire d’une rencontre
, 2011.
Étui légèrement frotté, dos de la
couverture un peu frotté, quelques
petites piqûres aux épreuves ayant
servies de BAT.
40 000 - 60 000 €
© Succession Picasso 2020
© Succession Picasso 2020
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