L’auteur de ce recueil s’est inspiré pour les voyelles françaises et quelques consonnes (C, M, N) de l’alphabet manuel
anglais à deux mains du mathématicien et orthophoniste JohnWallis (1616-1703), créé dans les années 1660, et composé
de 22 lettres. Il utilise la
Digita Lingua
consistant à effectuer un mouvement des deux mains pour la représentation des
consonnes, tandis que les voyelles étaient désignées par les extrémités des doigts. Notre auteur s’est également inspiré
de la méthode du médecin suisse Johann Konrad Ammann (1669-1724) donnée dans sa
Dissertatio de loquela
(« Traité
sur la faculté de la parole », 1700) pour les lettres D, F, L, P, S et X ; le G et le H sont inversés ; les lettres Y et Z
s’inspirent du V et du X. Quelques consonnes pourraient être en partie issues de la méthode de Giambattista della Porta
(vers 1535-1615), décrite dans son ouvrage sur la cryptographie
De Furtivis Litterarum notis
(1563), consistant à toucher
une partie du corps commençant par la lettre que l’on voulait rappeler, par exemple pour la lettre « B » on devait toucher
la barbe (Barba) ou la bouche comme c’est le cas ici et pour le R on touche l’oreille. Les lettres F, G, H, P, Q, S et T sont
accompagnées d’explications au bas des dessins.
Le second alphabet donné dans notre manuscrit est celui dont la pratique comprenait l'usage des deux mains, cependant
cet alphabet ne tarda pas à disparaître en France, en raison de sa trop grande difficulté d’application, privilégiant ainsi
l’alphabet à une seule main. En France, l’abbé de l’Épée fut le premier à avoir donné un alphabet français destiné aux
sourds muets ; cependant, comme il s’était inspiré de l’ouvrage espagnol de Juan de Pablo Bonet, imprimé en 1620, sa
méthode eut moins de succès.
S
UPERBE MANUSCRIT PÉDAGOGIQUE DESTINÉ À L
’
APPRENTISSAGE DE L
’
ALPHABET DES SOURDS MUETS
, provenant de la
collection Mortimer L. Schiff, avec son ex-libris (III, 1938, n°1316).
Voir : Presneau,
Signes et institution des sourds XVIII
e
-XIX
e
siècle.
Seyssel, 1998.
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