ADER. Paris. Femmes de lettres et manuscrits autographes - page 288

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522.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Lettre autographe signée « Juliette », 25 avril [1849] mardi soir, à V
ICTOR
H
UGO
; 4 pages in-8.
1 000/1 500
A
MUSANTE
SATIRE
DE
L
ACTIVITÉ
POLITIQUE
DE
V
ICTOR
H
UGO
,
DÉPUTÉ
À
L
’A
SSEMBLÉE
CONSTITUANTE
.
« Bonsoir, homme héroïque, bonsoir, courageux représentant, bonsoir. Seulement tâchez de ne pas me calomnier à la tribune parce
que je vous réponds que je répondrai à cette liberté par une autre plus pommée encore et qui mettra à néant votre INVIOLABILITÉ
dont je me fiche dès à présent. Je n’ai pas voulu me coucher sans vous dire cela entre quatre pages en attendant que je vous le dise
entre quatre ZIEUX. Je me fiche de vous et des 899 autres que vous êtes et de votre constitution et je tire le nez à la république et je
fais figue à la liberté. Vous êtes un gouvernement de Jocrisses, vous en avez la couleur et la queue, voir même les papillons blancs
en papier que le Socialisme et autres macairismes vous accrochent au chapeau avec des fils d’archal. Voilà ce que vous êtes mais
vous avez la liberté de la tribune et le droit de répéter les coups de pied au cul préalables qu’on vous prodigue avec le plus vif et le
plus touchant enthousiasme. Ah ! c’est un beau spectacle à ravir la pensée que la chambre ainsi faite avec ces neuf cents braillards
inviolables plus ou moins décorés. […] Jouissez de vos droits superbes, mon amour, mais prenez [garde] aux représailles. La Juju
est féroce c’est là son moindre défaut. Aussi prenez garde à vous. Je ne vous dis que cela pour le quart d’heure. Baisez-moi comme
si de rien n’était et venez me chercher le plus tôt possible demain. Je vous attends, je vous adore pour mieux cacher mon jeu. »
Vente 24 janvier 1972
(n° 78).
523.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Lettre autographe signée « Juliette », 7 octobre [1849] dimanche matin 10 h., à V
ICTOR
H
UGO
; 4 pages in-8. 800/1 000
« Quel temps, mon pauvre bien-aimé, c’est à ne pas mettre un représentant à la porte. J’espère cependant que tu viendras te
réfugier chez moi et je me dépêche de tout mettre en place pour te recevoir et t’installer dans mon logis en maître que tu es.
D’ailleurs il n’est pas probable que les solliciteurs et surtout les
solliciteuses
se mettent en route par ce temps hideux. Je compte
donc que tu pourras venir de très bonne heure travailler auprès de moi, à moins que tu n’y mettes de la mauvaise volonté, ce qui
n’est pas impossible. Ah ! que je vous y prenne, Monsieur Toto, et vous aurez affaire à une Juju démocratique et peu sociable qui
vous en fera voir des foncées. Dépêchez-vous de faire votre toilette et venez, car je vous attends avec toutes sortes d’impatiences.
Je vous le conseille dans votre intérêt bien entendu, si vous voulez hériter de ma petite maison de dix mille francs. Sinon, je la
lègue à un autre plus empressé et plus assidu que vous, ce qui ne sera pas difficile à trouver. C’est aujourd’hui même que je prends
possession de
ma propriété
. Je profite de l’absence de P
ROUDHON
pour me permettre cette facétie compromettante. Dieu et l’abbé
Jous aidant, je vais être propriétaire tout à l’heure. Quel Bonheur !!!!!!! »
524.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Lettre autographe signée « Juliette », 16 mars [1850] samedi midi 3/4, à V
ICTOR
H
UGO
; 4 pages in-8.
800/1 000
« Je suis bien triste, mon amour, car je n’aurai pas fait ta tisanne aujourd’hui et je ne pourrai pas te conduire à la séance de
l’Assemblée. Hélas ! je te verrai à peine quelques minutes tantôt quand tu iras à la Chambre car ce soir tu assisteras à la première
représentation de
la Notre-Dame de Paris
» [adaptée par Paul Foucher, Ambigu-Comique, 16 mars 1850]. Le lendemain, elle doit
aller à un dîner de fête chez ses amis Montferrier. « Ainsi, mon Victor, je prévois que je te verrai en tout cinq minutes en deux
jours. C’est bien peu, pour un cœur affamé comme le mien, et je ne sais pas comment je ferai pour me résigner à cette portion
congrue que me font les circonstances. Pour un peu je pleurerais à chaudes larmes tant je suis agacée et triste de cette vie :
chacun
de son côté
. Vois-tu, mon petit homme, jamais je ne m’habituerai à ne pas faire de toi la seule préoccupation de ma vie et l’unique
objet de mes actions. Ce n’est pas de ma faute mais c’est ainsi. Plus je vais et plus tu m’es indispensable. J’en suis arrivée au point
de désirer d’être encore plus hideuse et plus souffrante [elle souffre alors de la gale] demain qu’aujourd’hui pour avoir le droit
de rester chez moi, sans impolitesse, à t’attendre et à te désirer dans mon coin toute seule. J’espère que j’y parviendrai car jusqu’à
présent mes gales ne font que croître et qu’enlaidir : c’est infâme, c’est horrible, c’est effroyable ! quel Bonheur ! quel Bonheur !
quel Bonheur ! »
Ancienne collection Alfred D
UPONT
(III, 3-4 décembre 1958, n° 81).
525.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Lettre autographe signée « Juliette », Bruxelles 4 avril 1852, dimanche matin 9 h., à V
ICTOR
H
UGO
; 4 pages in-8.
1 000/1 500
B
ELLE
LETTRE
LORS
DE
L
EXIL
À
B
RUXELLES
[ayant fui la France le 12 décembre 1851, suivi le lendemain par Juliette et la malle aux
manuscrits, Hugo restera à Bruxelles jusqu’au 1
er
août 1852, pour gagner Jersey].
« Bonjour, mon Victor bien-aimé, bonjour. Je reviens de la messe où j’ai prié pour toi et pour tous les tiens. Si le bon Dieu m’a
entendue, tout ce que tu désires, tout ce que tu espères t’arrivera, mon doux aimé, car je lui ai demandé de te faire le plus heureux
des hommes.
Comment vas-tu ce matin, mon bon petit homme ? As-tu déjà pris ta drogue ? Je crains que tu l’oublies. C’est un grand regret
pour moi, chaque fois que l’occasion se présente de te soigner, de ne pouvoir le faire. Il me semble pourtant que je ne suis venue au
monde que pour cela. Aussi est-ce doublement triste pour moi de manquer forcément à cette douce vocation. […] J’espère que cela
fera disparaître à tout jamais cette vilaine douleur de cœur qui n’est déjà restée que trop longtemps. Mon Victor bien aimé, bien
aimé, bien aimé, il ne faut pas que tu souffres de nos maux à nous. Tu n’es pas fait pour cela et tu ne saurais pas t’en servir. Pour
te préserver de toute tentation à ce sujet je te donne cette petite branche de buis [collée sur la lettre] bénie par mes prières et par
mes baisers. Chacune des feuilles contient le pardon des sept années que tu as volées à mon amour [allusion à la liaison de Victor
avec Mme Biard]. Que tous les coupables anniversaires qui se rattachent à leur nombre deviennent pour toi des siècles de gloire
et de bonheur. Que ce petit rameau de paix et d’oubli soit ton talisman contre tous les maux et tous les dangers. Qu’il garde ton
corps en même temps que ton âme. C’est la mission que je lui confie avec la pieuse conviction qu’il n’y manquera pas car chacune
de ces feuilles est faite de dévouement, de tendresse, d’espérance, d’abnégation, de courage, de confiance et d’amour. Sois béni,
mon Victor, avec toutes les larmes que j’ai versées »...
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