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J

usqu’au 7 décembre, le domaine de Chantilly pré-

sente, dans le cadre des événements de “l’année

François 1er”, l’exposition “Le siècle de François Ier”.

Dans l’entretien qu’il nous a accordé, Olivier Bosc,

Conservateur en chef de la bibliothèque et des archives

du Château de Chantilly et commissaire général de cette

exposition, souligne combien ce roi issu du monde mé-

diéval a su, en soutenant vigoureusement les arts et les

lettres, faire entrer la France dans la Renaissance.

Lorsque l’on évoque François 1er, on songe plus spontanément

aux châteaux de la Loire qu’au domaine de Chantilly… Pourquoi

y avoir alors organisé une exposition dans le cadre des mani-

festations célébrant le 500e anniversaire de son sacre et de la

bataille de Marignan ?

Il est vrai qu’à la Renaissance, le grand homme de Chantilly,

c’est le connétable de Montmorency. En revanche Chantilly

était qualifié pour participer aux événements de l’année Fran-

çois Ier, grâce aux collections de tableaux, livres et objets d’art

qu’y a rassemblé, au XIXe siècle, le duc d’Aumale et dont de

nombreuses pièces sont relatives au règne de ce roi. Avec l’ex-

position de la BnF consacrée à l’image du roi et celle de Blois

dédiée à sa bibliothèque, l’exposition de Chantilly, s’affirme

comme le troisième grand rendez-vous de ces célébrations et

comme l’exposition la plus généraliste. Le parcours que nous

proposons vise en effet à explorer la façon dont François Ier,

défait militairement à Pavie, décida ensuite de réorienter son

action sur le terrain de l’art et de la culture. A l’occasion des

guerres d’Italie, lui-même et les membres de son entourage

avaient été fascinés par la façon dont les princes italiens parve-

naient à asseoir leur prestige et à faire rayonner leurs cités en

pratiquant le mécénat. Après sa défaite militaire, le roi a trans-

posé ce modèle mais à l’échelle du Royaume tout entier, fai-

sant ainsi entrer la France dans la Renaissance, ce qui laissera

à notre pays un héritage autrement plus fécond que n’importe

quelle victoire militaire.

Est-ce la raison pour laquelle François Ier est souvent qualifié

de “roi mécène” et de “roi humaniste” ?

Oui, et l’exposition témoigne de la justesse de ces qualificatifs.

Un exemple : François Ier s’attache les services du Primatice,

qu’il mandate pour réaliser des copies des plus belles statues

de la Renaissance qui vont orner le château de Fontainebleau.

Nous présentons ainsi les dessins commandés par le Roi à cet

artiste de premier plan pour décorer son château. Parmi ces

décors, certains ont été réalisés et d’autres non. Le joyau de

l’exposition est toutefois une tapisserie de 8 mètres de long

sur 5 mètres de haut réalisée sur un carton de Giulio Roma-

no. Selon Henri Loyrette, cette pièce d’époque représentant la

victoire de Zama au cours de laquelle les Romains ont défait

les Carthaginois est “l’éléphant blanc” de l’exposition. Elle

est d’autant plus remarquable que les objets d’art issus des

collections royales sont rarissimes en raison des destructions

dont ils ont été victime au cours de l’histoire. Ainsi, la plupart

des tapisseries réalisées sous le règne de François Ier ont

été brulées sous la Révolution afin d’en extraire les fils d’or

et d’argent. Il en est de même pour l’orfèvrerie, ravagée par

des fontes successives. Nous sommes donc très heureux de

pouvoir présenter le sceau et le goupillon des Frères du Saint-

Esprit prêtés par le département des objets d’art du Louvre.

L’exposition met également en lumière que François Ier fut un

grand collectionneur. L’était-il par goût personnel ou par volon-

té institutionnelle ?

François Ier est effectivement le premier grand roi collection-

neur. Cette démarche révèle certainement un goût personnel

mais aussi un positionnement politique. Collectionner, c’était

agir comme les Cesar qui étaient de grands collectionneurs.

Enfin, cela s’inscrit peut-être aussi dans sa volonté de rattra-

per le retard français dont il avait pris conscience lors des cam-

pagnes d’Italie. Ce goût de la collection s’est d’abord porté sur

le livre. Chantilly conserve trois véritables emblèmes de l’art

du manuscrit. Tout d’abord le manuscrit des Commentaires de

la guerre gallique enluminé par Godefroy le Batave, sommet de

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FRANÇOIS IER, ROI MÉCÈNE

ET COLLECTIONNEUR

Entretien avec Olivier Bosc,

commissaire général de l’exposition « Le siècle de François 1er»

au domaine de Chantilly