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Parmi les poètes, ils ont Aristophane, Homère et Euripide, ainsi qu’un Sophocle

dans le petit caractère des Aldes ; parmi les historiens, Thucydide, Hérodote ainsi

qu’Hérodien… Aiguisé par les lettres, l’esprit des Utopiens est éminemment propre

à inventer des procédés capables d’améliorer les conditions de la vie. Ils nous doivent

deux arts, l’imprimerie et la fabrication du papier… Nous leur avons montré

des volumes sur papier, imprimés en caractères des Aldes. ” (Paris, 1987, pp. 187-188).

C’est en Angleterre et en France, à la fin du XVIII

e

siècle, que le goût pour la collection

d’éditions aldines semble s’être renouvelé. La dispersion de l’ordre des jésuites offrit aux

amateurs d’alors bon nombre d’occasions d’en acquérir et certains ouvrages de cette

collection portent des marques de provenance manuscrite de la bibliothèque de tel ou

tel collège de la Compagnie. Puis s’exerça l’influence discrète d’un précurseur oublié :

le cardinal de Brienne qui fit imprimer à Pise en 1790 le catalogue de sa collection :

Serie dell’ edizione Aldine

. Elle fut acquise en bloc par Antoine-Augustin Renouard,

célèbre bibliographe et collectionneur d’Alde. Il sut mettre à profit les fabuleuses ventes

révolutionnaires pour acquérir ou collationner un nombre considérable d’exemplaires

et publia par trois fois, en 1804, 1825 et 1834, ses

Annales de l’Imprimerie des Aldes

qui font encore autorité aujourd’hui. Son superbe exemplaire relié par Simier, au XIX

e

siècle, de la grammaire grecque de Constantin Lascaris, premier livre imprimé par Alde,

est l’un des fleurons de cette collection.

La collection Renouard fut vendue à Londres en 1819 consacrant pour longtemps,

malgré l’effort d’Ambroise Firmin-Didot, une forme d’appropriation britannique

de la collection aldine - cette grammaire de Lascaris demeura d’ailleurs pendant

plusieurs générations en Angleterre. Le catalogue de cette vente présente ainsi nombre

d’exemplaires avec de célèbres provenances anglaises comme celle du duc de Grafton

(1760-1844), celle de Beriah Botfield (1807-1853) tour à tour possesseurs du Théocrite

de 1495, celle de George John comte Spencer (1758-1834) : “ the choicest collection

of Aldines existing in any library ” (Seymour de Ricci, p. 76) ou celle du comte

d’Ashburnham (1797-1878). Chacun de ces deux collectionneurs est curieusement

représenté ici par deux exemplaires du

Diaria de Bello Carolino

d’Alessandro Benedetti

imprimé en 1496. Le

Thesaurus cornucopiae

, de 1496 également, a appartenu aux ducs

de Roxburghe (1740-1804) et de Sussex (1773-1843). L’Horace de 1501 fut celui

du comte de Crawford, le Quintus de Smyrne publié en 1505 fut celui de William

Beckford. “ Throughout Europe, bibliophiles formed libraries whose cases and cabinets

devoted space to Aldines ” (Ahmanson-Murphy catalog, p. 13). D’autres provenances,

comme celle de la mystérieuse Garden Library sur le rare Virgile de 1501, ou celle

d’André Rodocanachi sur le Gaza relié pour Marcus Fugger montrent encore que

la collection d’éditions aldines - ou pourquoi pas la

serie

pour reprendre le titre

du catalogue du cardinal de Brienne - a, de tous temps, été considérée par les amateurs

de livres comme le comble de l’élégance et de la culture.

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