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les collections aristophil

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TROTSKI Léon

(1879-1940)

théoricien révolutionnaire et homme politique russe.

L.S. « Leon Trotsky » avec 2 CORRECTIONS autographes,

Coyoacán 6 mars 1938, [à la journaliste Henriette CELARIÉ] ;

4 pages in 4 dactylographiées et agrafées (petite fente au

dernier feuillet).

2 500 / 3 000 €

Importante analyse politique de la situation en U.R.S.S. sous

Staline et des procès de Moscou.

Trotski donne une brève analyse de la situation et des méthodes de

STALINE, se référant à son livre

La Révolution trahie

(Grasset 1936) :

« Il est bien difficile, Madame, d’exprimer en une brève formule

les divergences irréconciliables qui existent entre la politique de

STALINE et la mienne. […] Ma politique représente les intérêts des

masses laborieuses, celles qui ont fait la révolution d’Octobre.

La politique de Staline représente les intérêts de la bureaucratie,

de cette nouvelle caste de parvenus qui domine et opprime le

peuple ». Les masses populaires haïssent autant qu’elles craignent

cette bureaucratie, qui pour conserver son pouvoir illimité et ses

privilèges étouffe « toute opposition, toute critique, toute expression

de mécontentement. Mais comme elle ne peut pas dire au peuple

que le crime de l’opposition consiste à demander plus de liberté,

plus de bien-être pour les travailleurs […], elle doit attribuer aux

opposants des crimes qui puissent apporter aux yeux du peuple

une justification à la répression. Telle est l’origine des sensationnels

procès de Moscou ». Ces procès sont l’aboutissement d’un travail

de répression de l’opposition : « dès 1923-1924 la couche dirigeante

a commencé à diffamer et à calomnier l’opposition en lui attribuant

des buts contraires à ses fins réelles. Cette falsification systématique

fut possible grâce au régime totalitaire qui permet la concentration du

contrôle de la presse » par la classe dirigeante. Peu à peu, « Staline

arriva à empoisonner l’opinion publique et à imputer à l’opposition

des visées et des méthodes inimaginables dans leur abomination, leur

cruauté et leur absurdité. Après cette préparation, qui prit au moins

dix ans, on est passé à la mise en scène des procès préparés dans

les caves de la

G.P.Ou

. ». Et il renvoie la journaliste à son livre

Les

Crimes de Staline

(Grasset 1938), qui donne une explication, « aussi

bien politique que psychologique, des dérisions de justice, théâtrales,

perfides et terribles à la fois, qui se succèdent à Moscou, surtout

depuis 1934 »… Il explique « l’unanimité avec laquelle les accusés

se reconnaissent coupables », comparant les services socialistes à

l’Inquisition, et il dénonce les tortures physiques et psychologiques : «

Les nerfs humains n’ont pas beaucoup changé depuis le Moyen-Age.

Ils ne peuvent supporter une pression qui dépasse une certaine limite.

S’agit-il de tortures physiques ? Pas dans le sens brutal du mot. La

technique de l’Inquisition s’est modernisé, mais en restant au fond

la même » : isolement complet, interrogatoires ininterrompus de 24

heures « sous la lumière hypnotisante de puissants projecteurs. On

arrête leur femme, leur mère, leurs enfants et on exige la confession

comme rançon de la libération des otages », exécutions des plus

résistants à reconnaître des crimes qu’ils n’ont pas commis, à titre

d’exemple, etc. Ces procédés sont efficaces…

Quant à l’avenir de l’URSS : « Je peux dire ici seulement que le régime

de Staline ne peut pas durer. Il se trouve dans une impasse historique.

Les procès de Moscou ne sont que les convulsions de ce régime

agonisant ». Trotski évoque deux alternatives. Soit le renversement

de Staline par des forces capitalistes, extérieures ou intérieures, ce

qui serait la fin de la propriété nationalisée et de l’économie planifiée,

pour laisser place au capitalisme : « Le régime politique serait le

fascisme le plus brutal, pour dompter les masses passées par l’école

de la Révolution ». Soit le renversement de la bureaucratie par les

masses populaires, pour établir une vraie démocratie « sur la base

de la propriété socialisée et de l’économie planifiée ». C’est pour cela

que Trotski continue de se battre : « tous mes efforts sont orientés

dans cette direction ».