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C

es

prétendus

fous

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[NERVAL (Gérard de)].

Les Illuminés.

Récits et portraits.

Paris, Victor Lecou, 1852.

In-12, demi-maroquin vert à coins, dos à nerfs richement orné à petit fer, non rogné, tête dorée

(Capé).

Édition originale.

Le volume réunit des essais et nouvelles publiés en revue entre 1839 et 1850. Dans cette galerie

de personnages si singuliers, le trait commun à l’abbé de Bucquoy, Restif, Spifame, Cazotte ou

Cagliostro, est d’avoir été victimes d’une “chimère”. Partant, aucun d’entre eux ne semble être

à sa place dans la réalité du quotidien. Nerval entend montrer, à travers ces

excentriques,

que

la ligne de démarcation entre le vrai et le faux, entre la raison et la folie, ne peut être tracée.

Curieux envoi autographe signé sur le faux-titre :

a Jules Janin

(que j’ai connu chez Nodier)

hommage reconnaissant

Gérard de Nerval

Envoi singulier à la fois par sa forme – pourquoi rappeler une rencontre jadis quand les

deux hommes se connaissaient parfaitement ? – comme en raison de la personnalité de son

destinataire.

Gérard de Nerval connut en février 1841 sa première crise de folie caractérisée ; il fut

transporté à la clinique de Mme de Saint Marcel où il resta jusqu’au 16 mars. Peu après, le 21

mars, à la suite d’une nouvelle crise, il fut transporté dans la clinique du Dr Esprit Blanche

à Montmartre, où il resta huit mois. Or, dès le 1

er

mars, Jules Janin avait publié dans le

Journal

des Débats

“l’épitaphe” de l’esprit de Nerval et, le 23 août, dans une chronique évoquant ses

souvenirs de la lecture chez Mlle Georges d’une pièce de Mazères et Empis créée à l’Odéon,

il déplorait que deux “parmi les plus heureux de cette bande poétique [soient] enfermés dans

la maison du Docteur Blanche” ! Consternation de Nerval qui adressa le 24 août une longue

lettre de protestation à Janin espérant une publication dans les

Débats,

en vain. Il réfutait

être “enfermé” et s’indignait d’avoir été “grandement compromis” par ces fausses nouvelles :

“En février dernier, à la suite d’un voyage dans le nord, je fus frappé d’un mal subit et le

bruit courut que j’étais mort d’apoplexie… Vous voulûtes bien me consacrer alors un article

biographique de douze colonnes dans lequel j’étais placé si haut… qu’il fallait me cacher

ensuite ou mourir de honte de n’être pas mort […]. On s’était accordé à faire de moi une sorte

de prophète illuminé […].”

Très bel exemplaire en reliure signée du temps par Capé, relieur de l’impératrice.

Il a été acquis à la vente Janin par Jules Noilly, le premier collectionneur de l’école romantique

dont la bibliothèque dispersée en 1886 devait devenir le modèle pour plusieurs générations

d’amateurs, les éditions originales dotées d’envois étant mêlées aux manuscrits autographes.

Provenance :

Jules Janin,

avec envoi et ex-libris.-

Jules Noilly,

avec ex-libris

(1886, nº 978 :

l’exemplaire a été acquis par Morgand).

30 000 / 40 000