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Une autocensure stratégique

249

Jean GENET.

Journal du voleur

. Épreuves.

Sans lieu ni date

[1947-1948]

.

Épreuves corrigées, 256 ff. in-8, et (8) ff. offrant des ajouts autographes : enveloppe de papier kraft

avec la mention autographe en rouge et bleu “Genêt / Journal du / voleur / épreuves” : chemise, étui en

cartonnage rouge, pièce de titre de maroquin rouge.

Un document inédit et singulier : premier jeu d’épreuves corrigées de la main de Genet

en vue de l’édition originale clandestine (Skira, 1948), sur lequel une seconde série de

corrections, toujours de Genet lui-même, a été portée par la suite en vue de la première

édition officielle (Gallimard, 1949).

Dans une note manuscrite insérée en tête (de la main de Jacques Guérin ?) on lit : “1

ères

épreuves

corrigées par J.G. Elles contiennent de nombreux passages supprimés de sa main par l’auteur comme

poussés trop loin par sa passion érotique.”

Les feuillets sont numérotés au crayon à papier de 1 à 256 avec, jusqu’au feuillet 169, une double

numérotation en bleu.

Huit feuillets sont accompagnés de fragments autographes au crayon bleu modifiant certaines phrases,

avec renvoi dans le feuillet faisant face. Une quinzaine de ces renvois dans les feuillets à partir du 169

ème

ne sont pas accompagnés d’ajout.

Les épreuves sont les plus anciennes dont on ait trace (sans que l’on puisse affirmer avec certitude qu’il

s’agit des toutes premières) : elles sont corrigées par Jean Genet à l’encre noire, et présentent un texte

encore imparfait (toutes ces corrections ont été intégrées à l’édition originale). Conformément à ses

habitudes, le romancier ajouta des passages au fur et à mesure de la réception et de la correction des

différents jeux d’épreuves avant l’impression définitive.

Jean Genet a repris les épreuves et barré en bleu les passages parmi les plus scandaleux en

vue de la première publication officielle du roman.

Si la première série de corrections en vue de l’édition clandestine de 1948 est relativement habituelle

(corrections lexicales, de ponctuation, d’orthographe et ajouts de passages manuscrits, notamment

en note), pour la seconde série, Jean Genet a barré en bleu les passages parmi les plus scandaleux.

Il s’agit dans ces corrections d’atténuer le caractère homo-pornographique du livre, qui justifiait sa

diffusion sous le manteau. On peut lire parfois le signe d’une hésitation chez Genet, qui maintient le

mot “couilles” et non celui de “queue”, et qui, après avoir songé à supprimer une occurrence du verbe

“enculer”, le maintient, car il est employé dans son sens métaphorique et non littéral.