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39

H

uysmans

,

avec une

clairvoyance

sans

égale

,

[a]

formulé de

toutes

pièces

la

plupart des

lois qui

vont

régir

l

affectivité moderne

” (André Breton)

23

Joris-Karl HUYSMANS.

L’Art moderne.

Paris, G. Charpentier, 1883.

In-12 : demi-maroquin noir à la Bradel avec coins, dos lisse, non rogné, tête dorée, couverture

et dos conservés

(Creuzevault).

Édition originale.

Un des 5 premiers exemplaires sur Japon (nº 5), seul tirage de luxe avec 5 Hollande.

Recueil d’articles parus pour la plupart dans la presse à l’occasion des Salons et des expositions

des Indépendants ; ils ont été remaniés et certains sont inédits.

Éloge des impressionnistes, que l’on appelait aussi les

Indépendants

, et d’artistes avec lesquels

Huysmans entretenait des relations étroites. Il rejette les gloires officielles pour défendre Degas,

Forain, Renoir, Gustave Moreau ou Odilon Redon : ce dernier dira que c’est Huysmans qui

le fit connaître. Félix Fénéon voyait en lui “l’inventeur de l’impressionnisme”. En 1893, Roger

Marx vanta “le double don de la divination et de l’expression, qui fait des écrits esthétiques

de J.K. Huysmans des pages définitives et de leur auteur en ce temps, non point un juge parmi

les juges, mais une personnalité unique : le critique de l’art moderne.”

On a relié en tête une remarquable page autographe de Huysmans consacrée à la

sculpture.

Manuscrit de premier jet, dont seules quelques idées ont été utilisées dans l’ouvrage, mais pas

le paragraphe consacré à Rodin qui sera repris, très modifié, dans la chronique de

La Revue

indépendante

(juin 1887) consacrée à l’exposition internationale de la rue de Sèze dans le cadre

du

Salon de 1887.

Oui, je sais bien, la sculpture est le grand art français !

”, entame-t-il, pour mieux démolir

les “

maçons

” et “

la trop copieuse troupe des sculpteurs, les gens qui refont l’éternelle femme nue,

couchée et debout, glacée dans son plâtre et dans son marbre.

Huysmans déplore la création contemporaine dans laquelle il ne voit “nulle tentative – ou alors

si indigente, si mesquine !”

A chercher partout pour découvrir depuis les apéritives vulgarités de Carpeaux, une œuvre

qui vive, il faut encore s’arrêter devant Rodin qui pousse les cris embrasés du rut, tord des

étreintes charnelles violentes comme des phallophories transposées de draps. Ses couples

enlacés se broient et se pâment, hurlent, crispés, les dents sur les dents, les yeux croisés et

les doigts fous. Les antiques fureurs des Ménades renversées devant les faunes cabrés dans

d’impures joutes, revivent sous le poing luxurieux de cet homme qui, à l’ heure présente,

d’une voie parcourue, est le seul artiste capable de faire ainsi crier et panteler le marbre !

Bel exemplaire de la bibliothèque

Jean Stern

(1875-1962), avec ex-libris.

Dos légèrement insolé.

5 000 / 6 000