C
E MANUSCRIT CONTIENT UN ENSEMBLE DE PRIÈRES ET DE TEXTES DÉVOTS COPIÉ POUR L
’
USAGE DES SŒURS TERTIAIRES DE
SAINTE
-
AGNÈS ÉTABLIES À AMERSFOORT
, non loin d’Utrecht.
Les sœurs tertiaires de Sainte-Agnès se rattachent au mouvement des tertiaires franciscaines, dont plusieurs communautés
étaient établies dans le diocèse d’Utrecht. Le Tiers-Ordre franciscain est une association pieuse laïque fondée en 1222 dans
la ville de Bologne, en Italie, par François d'Assise, à la demande de personnes mariées voulant vivre à l'exemple des frères
franciscains sans entrer dans un ordre religieux. Toutefois, malgré le rattachement à la spiritualité franciscaine, il est
admis maintenant que les couvents de tertiaires du nord des Pays-Bas étaient de fait associés au mouvement des
Frères et Sœurs de la Vie commune, un mouvement laïc de dévotion chrétienne qui se rattache au courant plus vaste
de la « dévotion moderne » ou « Devotio moderna » (Corbellini, S. « Mapping Spiritual Life : A Spatial Approach
to Late Medieval Spirituality, in
Anuario de los estudios medievales,
2014, pp. 84 : “As recent research has very
convincingly demonstrated, the tertiaries in the Northern Dutch area (the diocese of Utrecht) belonged - despite
their Franciscan denomination - to the
Devotio moderna
movement. The vast majority of the communities were
gathered in the so-called Chapter of Utrecht that served as an “umbrella organization” and was responsible for
the drawing of the statutes, the organisation of annual chapter general and the visitation of communities. The
Chapter was officially set up in 1399 in the Northern Dutch town of Amersfoort, during a meeting that was
presided by a number of disciples of Geert Grote from towns in the Northern Low Countries”).
Le fondateur de ces communautés de laïcs soumis à des règles de vie commune inspirées de celles des
moines et moniales (mais sans l’obligation de clôture) fut le diacre Gérard Groote (1340-1384) qui
forma une première communauté de « Sœurs de la Vie commune » dans sa propriété familiale de
Deventer (province d’Overijssel) le 20 septembre 1374. Les membres des communautés prêchaient
parmi les pauvres ; ils copiaient également des manuscrits, pour financer la fraternité ; et certains
enseignaient dans les écoles. Il se créa rapidement une quarantaine de maisons de la Vie
commune (aussi appelées maisons de la
Devotio moderna
) dans les grandes villes des Pays-
Bas, du Nord et du centre de l'Allemagne. Les communautés de femmes doublaient ce chiffre
(la première avait été fondée par Groote lui-même à Deventer). Après la mort de Gérard
Groote, certains de ses disciples fondèrent la Congrégation des chanoines réguliers de
Windesheim (vie canoniale désormais consacrée).
Ce manuscrit est un bon exemple de la production du livre dans les milieux proches de
la
Devotio moderna,
mouvement profondément attaché à l’écrit et au livre (manuscrit
et imprimé). Les Frères et Sœurs de la Vie commune (ainsi que les mouvements
affiliés telles les tertiaires d’Amersfoort) favorisent l’enseignement et l’appropriation
des textes sacrés aboutissant à la multiplication de recueils manuscrits, souvent en
langue vernaculaire (annonçant d’ailleurs la Réforme du XVI
e
s.). La méditation
des sœurs et frères s’appuyait sur des recueils dévots comme le présent
manuscrit, support d’une spiritualité nouvelle, plus personnelle.
PROVENANCE : 1. Sœurs tertiaires du couvent de Sainte-Agnès de
Amersfoort (Pays-Bas, à l’est d’Utrecht), comme l’indique la mention
manuscrite au fol. 1 recto : «
Dit boeck hoert toe den susteren tot sancte
agnieten t’amersfoert
(t’Amersfoert) » [Ce livre appartient aux sœurs
du couvent de Sainte Agnes de Amersfoert]. Le couvent des sœurs
tertiaires d’Amersfoort fut fondé en 1399 avec un ensemble de
couvents de tertiaires relevant toutes du diocèse d’Utrecht. Citons
un autre manuscrit provenant de la bibliothèque des sœurs tertiaires
de Amersfoort (Missel à l’usage d’Utrecht, daté 1457 [Enschede,
Musée de l’Etat « Twenthe », inv. 381, provenant de Hattem, Frères
de la Vie Commune, avec la mention : « Dit boeck hoert toe sinte
agnieten convent binnen amersfoort » ; voir Lieftinck et Gumbert,
Catalogue des manuscrits datés des Pays-Bas,
1988, vol. 2, p. 77 ;
un autre Missel, daté 1464, réalisé pour Amersfoort est conservé à
Utrecht, Catharijnconvent, MS ABM h 119] ; La Haye, KB, Hs. 75
H 18 : Memorial registers of St Agnes convent in Amersfoort
(
Memoriale van Sanct Agnieten t'Amersfoert
), 101 ff., notons
l’écriture et décor très proches du présent manuscrit). – 2. Alfred
Lindeboom (Belgique), avec son ex-libris ; reliure à l’imitation
effectuée pour Lindeboom avec mention sur le plat supérieur : “Pro
Alfredo Lindeboomio grato animo compegit” et au plat inférieur :
“Carolus Desemblanx bibliopegus. Anno domini MCMXIX
[1919].” La reliure est signée de Charles De Samblanx (1855-1943),
relieur actif en Belgique. Voir [Exposition, 1992].
Charles De
Samblanx & Jacques Weckesser, relieurs : collection Raoul
Warocqué
[catalogue exposition. Musée royal de Mariemont du 26
mars au 13 septembre 1992].
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