ADER. Paris. Femmes de lettres et manuscrits autographes - page 396

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24 novembre
. Son état de santé est inquiétant : « je ne pèse plus que 103 livres, et je ne peux, ni manger, ni dormir. D’où une
faiblesse pénible, et un total ahurissement, que je secoue avec peine ». Elle est prudente dans sa correspondance, car une lettre
adressée au capitaine M
ANANCOURT
, dans laquelle elle faisait « des réflexions
peu bienveillantes
», a été interceptée par le ministère
de la Guerre ; elle avertit Cazanave : « on chope des lettres, et il est bon de le savoir ». Puis elle commente la désignation du
nouveau ministère Aristide B
RIAND
, et l’arrivée à la Guerre de Joseph G
ALLIENI
, « “le grand homme” de la bande », sur lequel elle
rapporte d’intéressants propos d’un « officier qui a marché avec lui […] On appelle le nouveau ministère : “
La pouponnière
” parce
que F
REYCINET
, M
ÉLINE
et C
OMBES
naviguent entre 88 et 80 ans », et Freycinet a fait une note remarquable « pour les neutres ». Échos
du « petit jeu des surnoms » : P
AJOT
, « qui a pris deux grades à Berne, depuis la guerre », est “
l’attaché d’embuscade
” ; Henri de
R
OTHSCHILD
, dont la femme malade mène une vie exemplaire, est appelé : “
Rien de nouveau sur le front
”. Elle rapporte les propos
d’un blessé sur l’accueil réservé au Président Raymond P
OINCARÉ
quand il va sur le Front : « Ça dépend !... des fois, on ne fait pas
attention, des fois on rigole... […] Méfiance, v’la l’c... r’tranché d’Paris qui s’amène ! »... Elle raconte une visite de Mme C
AILLAUX
dans un hôpital militaire du Mans, qui a dégénéré…Son fils Thierry est encore sur le
Charles-Roux
, où il opère beaucoup, et son
petit-fils Aymar est au 7
e
Spahis de Marche : « Il vient d’être nommé brigadier. Ça n’est pas encore très reluisant mais il n’a que
17 ans ½... Il est ravi, et trouve qu’il n’y a pas d’occupation plus charmante que de poser des fils de fer barbelés, tandis qu’on est
un peu canardé par les Boches »...
Les Neuf Muses, 2004
.
752.
Hélène VACARESCO
(1866-1947) poétesse franco-roumaine.
Lettre autographe signée « Hélène Vacaresco », [Paris 28 mars 1916], à M. A
MAUDRU
; 7 pages et demie in-8, enveloppe.
250/300
B
ELLE
LETTRE
SUR
LA
S
ERBIE
ET
LA
R
OUMANIE
.
Elle envoie, pour publication dans
L’Information
, le sentiment des Roumains sur les Serbes. La Roumanie a appris à admirer « le
courage désormais légendaire de ses voisins serbes » depuis leur rôle dans la guerre balkanique contre la Turquie, rôle héroïque
que les derniers événements ont poussé jusqu’au sublime, jusqu’au surhumain. Au matin du traité de Bucarest [10 août 1913],
la justice et la bonté flottaient dans la lumière malgré les Bulgares furieux, et l’alliance du Serbe Pachitch et du Grec Venizélos
synthétisait les symboles de ce jour-là... Aujourd’hui les cavales hongroises hennissent dans les plaines désolées de la Serbie et
la population affolée cherche refuge en Roumanie. Roumains et Serbes font excellent ménage. « L’antique civilisation dont le
Serbe a gardé en son âme des traces profondes, le rend un peu pareil à nous qui jalousement soignons nos traditions et nos lois.
Une grande Serbie sera acceptable face à une grande Roumanie [...] C’est à travers la Serbie que nous aboutirons à l’Adriatique.
C’est appuyée à nous qu’elle bravera le péril bulgare [...] Parler de l’héroïsme des Serbes paraît presque superflu tant il se dépasse
lui-même en ce que l’histoire et l’épopée de ce peuple inouï nous ont conservé de son passé »... Elle termine sa lettre en évoquant
la littérature serbe, « fort belle, rutilante de sang, pleine de clameurs guerrières », et en louant des poèmes déclamés par le roi
N
ICOLAS
du Montenegro à Cetinjé...
Vente 30 octobre 2001
(n° 241).
753.
Juliette L
AMBER
, Mme Edmond ADAM, dite Juliette ADAM
(1836-1936) femme de lettres et mémorialiste,
directrice influente de la
Nouvelle Revue
.
M
ANUSCRIT
autographe signé « Juliette Adam », [1919] ; 8 pages petit in-4.
300/400
A
RTICLE
PATRIOTIQUE
SUR
LA
LIBÉRATION
DE
L
’A
LSACE
.
« Pour la seconde fois, depuis ta délivrance, je viens vers toi, notre Alsace ! Je donne à ma vie, si vieille ! la joie sans égale de
te revoir libérée. Du joug qui fut aussi cruel à nos âmes vaincues qu’à toi prisonnière. Heure par heure, année par année, moi
l’enfermée parisienne de 1870, depuis que nous tous Français, nous t’avions
perdue, depuis que, sur ma carte de France, que je ne pouvais regarder
sans lar[me], il y avait une croix qui me semblait être à la place du cœur, ô
sentinelle de notre plus protectrice frontière, […] j’ai prié, j’ai supplié Dieu
pour que la victoire nous revienne. Et la majorité des envahisseurs de l’Alsace
après tant de longues années a été expulsée de nos foyers par cette victoire.
Mais n’en est-il pas trop resté, n’en revient-il pas un à un pour aider à la
dénonciation de nos divergences fatales créées par l’occupation ennemie et par
le temps ? Certes, la grande âme alsacienne n’avait pas un instant cessé d’être
française dans toute sa fidélité sublime... […] Alsace, nous t’en supplions,
nous qui avons souffert autant que toi de notre séparation, de notre exil
communs, efface inlassablement de ton esprit les traces des empreintes, de
l’intellectualité prussienne et de nos divergences créées par le temps. [...]
Après tant d’années de luttes, pour des libertés sans cesse menacées par les
occupants, l’Alsace qui, par son caractère a peut-être un besoin plus grand de
liberté que d’autres de nos provinces, est menacée de subir sans recours, les
lois laïques les plus sectaires et de perdre sans recours ses libertés religieuses.
L’âme alsacienne si énergique dans sa lutte contre l’emprise allemande ne
subira pas la tyrannie de l’incroyance. Nuls, plus que les Alsaciens n’ont le
respect des libertés religieuses, catholiques, protestants, juifs, n’ont jamais
connu l’irrespect ou l’entrave dans la pratique de leur religion »… Etc.
O
N
JOINT
une l.a.s. à Robert de F
LERS
, à propos de cet article (2 p. obl. in-12
à l’adresse de l’
Abbaye de Gif
).
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