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Impressions italiennes
Les livres décrits ci-après pour être proposés à la vente constituent une collection de livres italiens.
Il s'agit bien d'« impressions italiennes », de livres imprimés en Italie (ou pour l’un d’entre eux, en italien,
hors d’Italie), et non pas une collection de livres consacrés à l’Italie et aux « impressions », aux sentiments si
variés et si suggestifs que les poètes et les écrivains de la Renaissance au début du XX
e
siècle ont pu tirer de
leur voyage d'Italie, cette expérience fondatrice de la culture européenne. Ces deux collections, celle de livres
sur l’Italie et celle de livres italiens, réunissent des objets souvent différents et se rattachent à des traditions
bibliophiliques bien distinctes.
La première est la plus récente. Elle n’a pour principe d’organisation que le goût, l’imagination ou les
souvenirs de son possesseur, sa capacité de mettre en résonance, sur un mode poétique et subjectif des textes,
des images et des noms, en faisant jouer leur capacité d'évocation. Elle est le fait d’amateurs raffinés, fins
lettrés, amoureux de l’Italie, qui ont cherché à réunir sur les rayons de leur bibliothèque les livres les plus
évocateurs d'une Italie réelle ou rêvée. C'était l'objet de la première partie de la Bibliothèque Charles Filippi,
L'Italie de Pétrarque
à Stendhal,
dispersée il y a vingt-cinq ans. Ce n'est pas un hasard si, à côté de très beaux
livres italiens, livres à figures, grands textes littéraires, documents rares, on y retrouvait une majorité de livres
non italiens, parmi lesquels les récits de voyages, de Montaigne à l'abbé de Saint-Non et surtout une section
romantique principalement consacrée à Stendhal, l’inventeur du mythe moderne d’une Italie, lieu rêvé de
l'art, de l'égotisme et du bonheur. Quelques livres italiens, provenant de cette belle collection, se retrouveront
ici (n
os
3, 140, et en particulier 152, un exemplaire du célèbre Vitruve de Côme).
La seconde collection, celle de livres italiens, imprimés en Italie ou en langue italienne, est de tradition
plus ancienne. Dès les premières années de l'imprimerie, de tels livres parvenaient en France, poursuivant
et renouvelant une ancienne circulation de manuscrits. Vers 1533, François I
er
avait constitué une collection
privée, presque exclusivement composée de livres italiens. À la suite, de nombreux lettrés français possédaient
des ouvrages en italien ou imprimés en Italie, parfois nombreux, qu'ils avaient acquis chez les libraires
parisiens ou lyonnais qui en assuraient la distribution, ou parfois au cours de leur voyage dans la Péninsule.
Dans son
Journal du voyage,
Montaigne rappelle qu'il avait acheté « un paquet d'onze Comédies et quelques
autres livres » dans la boutique des Giunti, à Florence. De Thou possédait plusieurs centaines de livres italiens,
en tout genre, qu'il faisait relier à ses armes (l'un d'entre eux est décrit ci-dessous, n° 71). Mais ce ne fut qu'à
partir du milieu du XVIII
e
siècle que les amateurs se mirent à réunir et à valoriser des collections italiennes en
tant que telles, en même temps qu'ils inventaient ou identifiaient de nouveaux objets bibliophiliques, destinés
à leur curiosité et à leur délectation, dont certains avaient été imprimés en Italie, en particulier les incunables
et surtout les impressions aldines, qui, à leur manière et bien que portant pour la plupart des textes en grec ou
en latin, allaient être considérées comme l'expression la plus achevée d'un art du livre spécifiquement italien.




